Polémique autour de l'arrestation et de la fouille zélée de manifestantes

Interpellées avec 6 autres militants, les quatre femmes ont dû se dénuder avant d’être fouillées par une policière samedi  dernier. Alors que la police dément les faits, plusieurs associations ont annoncé leur intention de porter plainte.

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Manifestation en Algérie, début 2019.

L’interpellation ce samedi de quatre militantes de l’Association RAJ et du Mouvement démocratique et social (MDS), en marge de manifestations à Alger, continue de faire polémique. Les jeunes femmes ont en effet été obligées de se dénuder pour ensuite être fouillées par une femme policière dans un commissariat de police à Baraki, près d’Alger. Amnesty International a dénoncé un traitement “humiliant et dégradant” et pour lequel l’ONG réclame des autorités “l’ouverture d’une enquête impartiale et indépendante” ainsi qu’à “prendre toutes les mesures nécessaires pour que ces pratiques ne se reproduisent plus”.

La Direction générale de la sureté nationale (DGSN) algérienne a publié aujourd’hui un communiqué pour démentir les faits dénoncés. L’une des militantes, Hania Chabane, a alors répondu dans une vidéo postée sur Facebook où elle confirme avoir été obligée de se dénuder pour ne garder que les sous-vêtements inférieurs et être ainsi fouillée. “On croyait qu’il s’agissait d’une procédure normale et ce n’est qu’après qu’on a compris que ce que nous avons subi était un abus d’autorité attentatoire à notre dignité”, dénonce-t-elle.

Une autre militante, Amel, témoigne également dans une vidéo relayée par Algérie 360° : “Ils ont commencé à nous fouiller, les filles passaient une par une dans un bureau et on nous a totalement déshabillées”. Elle poursuit : “elle (la policière) m’enlève mon soutien-gorge et fouille ma poitrine (…) elle m’a enlevé ma culotte et m’a demandé d’écarter les jambes”.

Pour leur part, l’association RAJ et le MDS ont convenu de déposer plainte, en accord avec les concernées. Tout comme Amnesty International, ils ne dénoncent pas uniquement la manière dont leurs militantes ont été traitées, mais plus généralement leurs arrestations “arbitraires”.

Il s’agit d’une arrestation ciblée. En effet, les femmes ont été arrêtées bien avant le début de la marche pacifique. Elles allaient participer à un rassemblement, devenu presque quotidien, par lequel les Algériens souhaitent dénoncer les tentatives de la police d’interdire, depuis la semaine dernière, les manifestations sauf le vendredi. Chaque jour étudiants, militants et associations se retrouvent à 17h pour dénoncer l’interdiction et se réapproprier de l’espace public”, nous explique Abdelouhab Fersaoui, président de l’association RAJ.

Hassina Oussedik, directrice de la branche algérienne d’Amnesty International, dénonce de son côté “une violation flagrante du droit à la liberté d’expression et de réunion garantie par la Constitution et les engagements internationaux de l’Algérie, dont le pacte international relatif aux droits civils et politiques”.

Abdelouahab Fersaoui estime que le traitement réservé aux manifestantes ne peut pas être justifié, “car il vise à humilier des militantes et de manière générale les femmes algériennes qui participent à des manifestations”. “Nous le considérons comme une atteinte à la dignité de toutes les femmes algériennes. En effet, ce genre de procédure n’est pas adaptée à des militantes associatives ou politiques. Elles ne sont pas des criminelles ou des délinquantes, elles ne représentent pas un danger public”, s’insurge-t-il. Pour lui, “l’objectif est de faire peur pour casser le mouvement. C’est pour cela que le principe de déposer plainte est très important”.