Belaiz, 70 ans, faisait partie, avec le chef de l’Etat par intérim Abdelkader Bensalah et le chef du gouvernement Noureddine Bedoui, des « 3B » dont les contestataires réclament le départ, depuis la démission le 2 avril, sous la pression conjuguée de la rue et de l’armée, de Bouteflika après 20 ans de pouvoir. Son poste en faisait un des plus importants personnages de l’Etat algérien et lui conférait un rôlé-clé dans la présidentielle prévue le 4 juillet pour élire un remplaçant à Bouteflika. Le Conseil constitutionnel est notamment chargé de valider les dossiers de candidatures à la présidentielle et de contrôler la régularité des opérations de vote en Algérie.
« Au tour de Bensalah!« , ont clamé des milliers d’étudiants rassemblés à Alger en accueillant la nouvelle de la démission de Belaiz qui était par ailleurs chargé par la Constitution d’assurer l’intérim à la tête de l’Etat en cas de démission de Bensalah. Ancien magistrat, ministre de façon quasi-ininterrompue durant plus de 10 ans – essentiellement à la Justice et à l’Intérieur -, Belaiz, 70 ans, avait été nommé le 10 février à la tête du Conseil constitutionnel par Bouteflika – dont il était devenu conseiller spécial – pour remplacer Mourad Medelci, décédé quelques jours auparavant.
Il avait déjà présidé le Conseil constitutionnel de mars 2012 à septembre 2013. A ce titre, c’était à lui que revenait de déclencher le processus devant constater « l’empêchement » de gouverner du chef de l’Etat, lorsque Bouteflika, victime d’un AVC, avait été hospitalisé 80 jours en France en 2013. Il avait résisté aux multiples appels de l’opposition et de la presse en ce sens. Il avait à nouveau résisté fin mars aux appels sybillins du chef d’état-major de l’armée le général Ahmed Gaïd Salah suggérant cette procédure constitutionnelle pour écarter Bouteflika afin de mettre fin à la crise née de la contestation populaire.
La démission de Belaiz intervient au 1er jour d’une révision exceptionnelle des listes électorales, qui doit durer une semaine, dans la perspective de la présidentielle du 4 juillet. Des magistrats et des maires ont d’ores et déjà indiqué qu’ils boycotteraient la supervision de cette étape importante dans l’organisation du scrutin.
Pour les contestataires algériens, le maintien à la tête de l’Etat des structures et personnalités issues du « système » mis en place par Bouteflika ne permettent pas de garantir un scrutin libre et équitable pour élire son successeur. Des dizaines de milliers d’étudiants manifestent mardi dans plusieurs villes d’Algérie, Alger mais aussi Constantine, Annaba ou Béjaïa. Dans la capitale ils ont scandé « silmiya » face à un important dispositif policier. Après s’être initialement vu interdire l’accès au parvis de la Grande Poste, bâtiment devenu le point de ralliement de la contestation au coeur d’Alger, les étudiants ont fini par accéder à la place sous la pression du nombre.
La police restreint de plus en plus la liberté d’action des manifestants, sauf le vendredi, jour de repos hebdomadaire en Algérie et de mobilisations monstres depuis le 22 février. Le mardi précédent, les policiers avaient, pour la première fois depuis le début du mouvement, tenté de disperser une manifestation d’étudiants. Depuis la rentrée des vacances universitaires, début avril, des mouvements de grève ont débuté dans plusieurs campus.
Les étudiants d’une dizaine d’universités ont indiqué à l’AFP que leur établissement était en grève, reconductible chaque fin de semaine, afin d’exiger le départ de l’ensemble du « système » au pouvoir. « On termine ce qu’on a commencé« , lance Linda, 20 ans, étudiante en télécommunications dans la principale université d’Alger, l’USTHB, présente dans le cortège mardi. « Nous sommes en grève illimitée à l’USTHB jusqu’à ce que tout le « système » dégage, à commencer par Bensalah et Bedoui qui nous ramènent les policiers pour nous empêcher de manifester, alors que nous sommes pacifistes« , précise-t-elle.
« Nous allons marcher jusqu’à la mise en place d’une période de transition dirigée par des personnalités propres« , c’est à dire n’ayant pas participé au régime Bouteflika, renchérit Mira Laifa, 20 ans, étudiante en médecine. « Les étudiants algériens veulent un gouvernement de transition« , peut-on lire sur une banderole.