Theresa May cherche une solution de compromis avec l'opposition

La Première ministre britannique Theresa May a rencontré mercredi le chef de l'opposition travailliste Jeremy Corbyn pour tenter de trouver un compromis sur le Brexit afin d'éviter au Royaume-Uni une sortie de l'Union européenne sans accord le 12 avril.

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AFP

La dirigeante conservatrice a tendu la main à son adversaire politique mardi soir et annoncé son intention de demander un nouveau report de la date du Brexit aux dirigeants européens, pour se laisser le temps de convenir d’une solution susceptible d’être enfin acceptée par les députés qui ont jusqu’ici rejeté tous les scénarios proposés.

« Ce que nous voulons faire désormais, c’est trouver une solution soutenue par cette Chambre et concrétiser le Brexit« , leur a déclaré la dirigeante conservatrice en milieu de journée. Sa tentative de dialogue de dernière minute lui a attiré les reproches de députés de sa majorité partisans d’une rupture nette avec l’UE, qui craignent que cela n’ouvre la voie à un divorce dit « doux », avec le maintien de liens étroits.

Elle a aussi provoqué deux démissions au sein de son gouvernement mercredi: Chris Heaton-Harris, un secrétaire d’Etat au Brexit, pour dénoncer le report du Brexit, prévu initialement le 29 mars, et Nigel Adams, secrétaire d’Etat au Pays de Galles, parce qu’il craint que le Royaume-Uni ne finisse dans une union douanière avec l’UE.

Theresa May et Jeremy Corbyn, qui se sont rencontrés dans l’après-midi, ont jusqu’ici affiché des positions diamétralement opposées.
La Première ministre défend une sortie du marché unique, pour mettre fin à la liberté de circulation des personnes, et de l’union douanière, pour que le Royaume-Uni mène sa propre politique commerciale. M. Corbyn souhaite, lui, une union douanière étroite et a voté pour le maintien dans le marché unique lundi.

L’Union européenne a souligné, par la voix du président de la Commission Jean-Claude Juncker, qu’elle travaillerait « jusqu’au dernier moment » pour éviter un divorce sans accord qui ne profiterait qu’aux « populistes » et aux « nationalistes« . La chancelière allemande Angela Merkel a affiché le même ton, en promettant de « se battre jusqu’à la dernière heure » pour éviter ce scénario qui inquiète les milieux économiques et dont le risque est à un niveau « alarmant« , a estimé mercredi le gouverneur de la Banque d’Angleterre Mark Carney sur la chaîne SkyNews.

Le référent du Brexit au Parlement européen, Guy Verhofstadt, a pour sa part estimé que c’était « une bonne chose que Theresa May cherche un compromis transpartisan« , ajoutant : « Mieux vaut tard que jamais« . Au sein du Parti travailliste, certains comme le député Ben Bradshaw se méfiaient cependant de l’offre de la Première ministre, estimant qu’il pourrait s’agir d’un « piège » destiné soit à « faire passer l’accord désastreux de Mme May« , soit à tenir le Labour pour responsable de l’échec du Brexit.

Le gouvernement n’a pas exclu de représenter l’accord de divorce conclu fin novembre avec Bruxelles, qui a déjà été rejeté trois fois par les députés, s’il estime avoir les soutiens suffisants. Pour éviter une sortie brutale, plusieurs élus, emmenés par la travailliste Yvette Cooper et le conservateur Oliver Letwin, veulent soumettre au vote des députés mercredi soir une loi destinée à empêcher une sortie sans accord au 12 avril et obtenir un report du Brexit, qui doit mettre fin à 46 ans d’appartenance au bloc européen.

Alors que ce dernier était censé avoir lieu le 29 mars, les dirigeants européens ont déjà accordé à Londres un sursis, jusqu’au 12 avril. Un nouveau délai devra être approuvé à l’unanimité des 27 autres pays membres de l’UE, qui se réunissent à Bruxelles pour un sommet exceptionnel le 10 avril. Un report au-delà du 22 mai impliquerait que le Royaume-Uni participe aux élections européennes, prévues pour se dérouler du 23 au 26 mai, ce que le gouvernement britannique veut éviter.

Un de ses porte-parole a toutefois reconnu que le Royaume-Uni était susceptible d’entamer les préparatifs en vue de participer au scrutin, quitte à les interrompre en cas de concrétisation du Brexit. Dans ce contexte incertain, le secteur britannique des services (finance, commerce, transports…), qui constitue la locomotive de l’économie britannique, a subi un sévère coup d’arrêt en mars. L’activité dans ce secteur s’y est contractée pour la première fois depuis juillet 2016, soit juste après le référendum de juin qui avait décidé de la sortie de l’UE pour le Brexit.