Bouteflika déposera sa candidature le 3 mars

Le président algérien Abdelaziz Bouteflika va déposer le 3 mars sa candidature à un cinquième mandat auprès du Conseil constitutionnel, a annoncé mardi son directeur de campagne, Abdelmalek Sellal.

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Le président algérien Abdelaziz Bouteflika en novembre 2017 Crédit: AFP PHOTO / RYAD KRAMDI

Le candidat Abdelaziz Bouteflika va respecter les délais et les lois et déposera son dossier de candidature le 3 mars”, soit le dernier jour prévu pour cela, a déclaré M. Sellal lors d’une réunion à Alger avec des partisans du chef de l’Etat.

En annonçant le 10 février sa décision de briguer un 5e mandat, le chef de l’Etat, au pouvoir depuis 1999 et qui souffre des séquelles d’un accident vasculaire cérébral (AVC) depuis 2013, a mis fin à de longs mois d’incertitude. Mais il a aussi déclenché une contestation inédite depuis des années, de par son ampleur nationale, sa mobilisation et ses slogans visant directement le chef de l’Etat et son entourage.

Après les manifestations de masse de vendredi dernier, puis de nouveaux cortèges de moindre ampleur dimanche et lundi, les étudiants ont pris le relais mardi, avec une multiplication des rassemblements à Alger, mais aussi dans la plupart des grandes villes du pays.

En matinée, dans la capitale, environ 500 étudiants se sont tout d’abord regroupés aux cris de “Non au 5e mandat!”, “Bouteflika dégage!”, “Algérie libre et démocratique”, à l’intérieur de la “fac centrale”.

Les agents de sécurité de l’université ont cadenassé les grilles pour les empêcher de sortir, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Policiers et étudiants sont des frères”, ont aussi crié ces étudiants aux membres des forces de l’ordre, déployés en nombre dans la rue, de l’autre côté des grilles.

Pour éviter la confrontation avec la police, les étudiants de plusieurs facultés d’Alger ont décidé de se rassembler dans l’enceinte de l’université”, a expliqué à l’AFP Raouf, étudiant en master de journalisme, qui n’a pas donné son nom de famille.

Les policiers n’ont pas le droit d’entrer” dans les universités, a-t-il rappelé.

Quelque 100 à 200 autres étudiants, munis de pancartes et scandant des slogans contre le 5e mandat, se sont eux regroupés à l’extérieur du campus, a constaté une journaliste de l’AFP.

Dans l’après-midi, ceux-ci ont pris la direction de la place Audin, et ont été ensuite rejoints par d’autres groupes, formant un cortège de plusieurs milliers de personnes, près du palais du peuple, selon la même source.

Comme vendredi dernier, la police était très présente, mais aucun incident n’a été rapporté. Elle était en revanche intervenue pour disperser les cortèges à l’aide de gaz lacrymogène dimanche et lundi.

De nombreux autres rassemblements ont été rapportés par des médias locaux ou sur les réseaux sociaux dans l’agglomération algéroise.

Environ 500 étudiants en journalisme se sont réunis sur leur campus, tandis que quelques centaines d’autres étaient regroupés à l’extérieur, selon une journaliste locale sur place.

Hors de la capitale, des rassemblements ont été rapportés, via les réseaux sociaux notamment, sans qu’il soit possible de déterminer précisément leur nombre et leur ampleur.

Le site d’information TSA (Tout sur l’Algérie) a notamment évoqué le cas des villes de Constantine (400 km à l’est d’Alger), Tizi Ouzou (100 km à l’est d’Alger), Ouargla (est), ou encore Annaba (nord-est), mais d’autres images –authentifiées– ont été publiées à Oran (ouest), par exemple.

Pas en mon nom!”, est un des mots d’ordre de la contestation de mardi, qui a été lancée sur les réseaux sociaux après le soutien affiché par 11 associations estudiantines à la candidature de M. Bouteflika.

Nous organisons une démonstration de force afin de montrer que ces 11 associations n’ont pas parlé en notre nom”, a expliqué à l’AFP Hakim, 23 ans, étudiant en génie civil à l’université des sciences et technologie de Bab Ezzouar (USTHB), à une quinzaine de km de la capitale.

Des enseignants et universitaires avaient appelé leurs collègues à se joindre aux étudiants. “Nous avons le devoir d’incarner la voix du peuple qui se lève contre un système politique devenu une véritable menace pour notre avenir et la stabilité du pays”, avaient-ils expliqué.

Face à ce mouvement, le pouvoir a donc affiché sa détermination, puisque s’exprimant devant des partisans du chef de l’Etat, le directeur de campagne Abdelmalek Sellal a annoncé que le dossier de candidature du président sortant serait déposé le 3 mars.

Lundi, les autorités avaient répondu pour la première fois en exhortant les manifestants à s’en remettre aux urnes.

Les élections auront lieu dans moins de deux mois et chacun choisira librement”, a commenté le Premier ministre Ahmed Ouyahia, selon qui les “urnes trancheront”. Il a également mis en garde les Algériens “contre les risques de dérapages sérieux”.

Ces derniers jours, face à la contestation, plusieurs membres du camp présidentiel ont agité plus ou moins explicitement le spectre de la “décennie noire” de guerre civile en Algérie (1992-2002), à laquelle M. Bouteflika est largement crédité d’avoir mis fin.

Réélu sans discontinuer depuis 1999, M. Bouteflika n’apparaît plus que très rarement en public depuis qu’il a subi un AVC en 2013. Il se trouverait actuellement en Suisse pour des “examens médicaux”.

Plusieurs étudiants rencontrés par l’AFP lundi avaient résumé leur état d’esprit, soulignant n’avoir “connu que M. Bouteflika comme président”.