A Davos, l'élite cueillie à froid par des inquiétudes sur la croissance et les inégalités

Alors qu'elle arrive à peine à Davos, l'élite économique mondiale a été cueillie à froid le 21 janvier par un avertissement du FMI sur la croissance et sur le mécontentement populaire qu'alimentent des inégalités toujours plus criantes.

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Un policier sur le toit d'un hôtel de Davos, à proximité du Centre des congères où ce tient le Forum économique mondial. Crédit: Fabrice COFFRINI / AFP

Une récession mondiale n’est pas au coin de la rue mais le risque d’un recul plus prononcé de la croissance mondiale a augmenté », a averti la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde.

De quoi faire encore baisser la température dans la station de ski huppée des Alpes suisses, couvertes d’un épais tapis neigeux, où vont converger jusqu’à vendredi les quelque 3.000 participants au Forum économique mondial.

Grands patrons, chefs de gouvernement, ministres mais aussi activistes doivent participer à des débats sur les thèmes les plus variés, allant des déchets plastiques à la géopolitique en passant par l’intelligence artificielle.

Ils sont accueillis cette année par une grande campagne d’affichage des organisateurs les incitant à délaisser jets et berlines.

L’élite de la finance et de l’économie mondiale est invitée à prendre les transports en commun ou chausser les crampons pour se déplacer dans les rues glissantes, bordées de locaux loués à grands frais par les entreprises et d’hôtels où se succèderont les réceptions.

Le FMI a abaissé, pour la deuxième fois en quelques mois, le rythme d’expansion de l’économie mondiale, désormais estimé à 3,5% (-0,2 point) pour cette année, après 3,7% en 2018. La prévision pour 2020 est également moins bonne à 3,6% (-0,1 point).

Christine Lagarde a fait un parallèle de circonstance avec le ski: « nous avons besoin que tout le monde reste sur la piste ».« Cela va être plus laborieux, plus d’efforts seront nécessaires », a-t-elle prévenu, citant la guerre commerciale et le Brexit comme les principaux risques qui pèsent sur l’économie mondiale.

La nouvelle cheffe économiste du Fonds, Gita Gopinath, qui effectuait son baptême du feu à Davos, y est allée de son avertissement concernant le Brexit alors que la Première ministre britannique, Theresa May, entend rediscuter avec Bruxelles de la question, épineuse entre toutes, de la frontière irlandaise.

« Il est impératif que les dirigeants politiques mettent rapidement un terme à cette incertitude », a dit Mme Gopinah, à deux mois de la date prévue pour le divorce. Plus surprenant de la part du FMI: Mme Gopinath a adressé un message aux dirigeants politiques pour qu’ils répondent rapidement au mécontentement populaire qui s’exprime dans certains pays.

« Je pense que ce qui est important, ce n’est pas d’attendre une escalade des risques politiques mais que les dirigeants politiques s’occupent d’éviter un tel mécontentement avec la manière dont les choses fonctionnent », a-t-elle affirmé. « Ce sont de vraies préoccupations qui doivent être traitées ».

L’appel sera-t-il entendu en France par exemple? La crise des « gilets jaunes », qui retient le président français, Emmanuel Macron, à Paris alors qu’il avait été l’un des chouchous de Davos l’an dernier, a coûté à l’économie tricolore 0,1 point dans les prévisions du FMI, à 1,5% cette année. Son absence est officiellement justifiée par un agenda « surchargé ».

Le Forum se déroule également en l’absence du président américain, Donald Trump, qui a renoncé en raison de la fermeture partielle des administrations fédérales (« shutdown »), depuis plus d’un mois, un record historique, sur fond de crise politique autour de sa politique d’immigration. Theresa May a aussi renoncé pour cause de Brexit.

De quoi céder le devant de la scène au nouveau président brésilien, Jair Bolsonaro, arrivé lundi en fin d’après-midi et dont le discours mardi est très attendu. Mais aussi au chef du gouvernement italien, Giuseppe Conte. Deux figures de la montée du populisme dans le monde, un phénomène qu’alimente le creusement apparemment inexorable des inégalités, dénoncé comme chaque année par l’ONG Oxfam en lever de rideau du Forum économique mondial.

Dans son rapport annuel, elle révèle que 26 milliardaires ont désormais entre leurs mains autant d’argent que la moitié la plus pauvre de l’humanité. Trois d’entre eux sont sur la liste des quelque 3.000 participants à Davos cette année: l’Américain Bill Gates, le magnat de l’industrie indien Muksh Ambani et le fondateur du géant chinois Alibaba, Jack Ma.