Anas Doukkali veut donner un coup d'électrochoc aux urgences

Anas Doukkali a présenté, le 25 décembre, son plan d'accélération de mise à niveau des urgences. Celui-prévoit un investissement dans les équipements ainsi qu'un renforcement des ressources humaines.

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Anas Doukkali, ministre de la Santé. Crédit: MAP

C’est au Centre hospitalier préfectoral Prince Moulay Abdellah à Salé que le ministre de la Santé a dévoilé son nouveau plan d’accélération de mise à niveau des urgences le 25 décembre.

Son objectif : poursuivre le développement des services d’assistance médicale urgente (SAMU), ainsi que des services mobiles d’urgence et de réanimation (SMUR). Il est aussi question de développer les ressources humaines sur les plans quantitatif et qualitatif et prendre le relais d’El Houssaine Louardi, le prédécesseur de Doukkali, qui avait initié un plan national en 2012. «Le bilan réalisé par le ministère a révélé l’existence de besoins en termes d’amélioration de la qualité des services d’accueil des urgences et des soins qui y sont prodigués», nous affirme le ministre de la Santé.

Spécialisation et nouveaux équipements

Pour remédier à ces maux, le nouveau plan conçu par les équipes d’Anas Doukkali prévoit le développement de filières spécialisées dans les urgences . «Nous commencerons par les urgences néonatales et infantiles, les urgences obstétricales, les urgences des maladies cardiovasculaires, les urgences des maladies neurologiques, et les urgences traumatologiques», explique-t-il.

Le ministère de la Santé prévoit également l’élaboration d’un guide référentiel pour la prise en charge des urgences médicales, le développement de la téléurgence entre les centres hospitaliers universitaires (CHU), les établissements régionaux, les centres hospitaliers provinciaux et les hôpitaux de proximité, et l’accélération de la promulgation de la loi sur les urgences préhospitalières et le transport sanitaire.

Le département d’Anas Doukkali compte également investir massivement dans les équipements hospitaliers et extrahospitaliers. En vertu du nouveau plan présenté par le ministre, le transport sanitaire se verra doté d’équipements spécifiques destinés à chaque spécialité, tandis que le parc ambulancier dans les 12 régions du Royaume sera renforcé par l’acquisition de nouveaux véhicules.

«Nous avons mis davantage de financement pour doter les hôpitaux régionaux de 30 nouvelles ambulances de type A hypermédicalisées, et 60 ambulances de type B. Cela va améliorer la qualité de la référence entre les hôpitaux régionaux, provinciaux et les hôpitaux universitaires», explique le ministre sans toutefois évoquer le coût de cette modernisation. «Nous avons doté chaque hôpital régional d’un budget de 3 millions de dirhams pour acquérir les équipements biomédicaux nécessaires à une meilleure prise en charge des patients», poursuit-il.

Pénurie en ressources humaines

En prévision de ce plan d’accélération, une vague de recrutement a été effectuée par le département d’Anas Doukkali. « Pour l’exercice 2018, nous avons procédé au recrutement de 300 médecins formés en soins d’urgence et qui seront encadrés par les spécialistes en urgentologie, répartis sur les différents centres hospitaliers régionaux».

Une mesure qui reste toutefois insuffisante, face aux besoins actuels selon les urgentistes. «Les ressources humaines spécialisées en médecine d’urgence sont très rares. Ainsi, la plupart des services des urgences sont gérés par des médecins généralistes qui n’avaient pas été formés en urgentologie et qui sont donc incapables de faire face à une urgence», nous affirme Lahcen Belyamani, président de la Société marocaine de médecine d’urgence (SMMU).

«Le concours de résidanat, passé la semaine dernière, ne consacre aucun poste à la médecine d’urgence», regrette Lahcen Belyamani, qui se demande comment il est possible de lancer le plan d’accélération de la mise à niveau des services des urgences médicales sans former en parallèle des médecins urgentistes.

Actuellement, le pays dispose de 18 médecins spécialistes en médecine d’urgence et de catastrophe, répartis sur les 12 Centres hospitaliers régionaux, ainsi que 100 infirmiers spécialisés en soins d’urgences et soins intensifs. A ceux-là, il faut ajouter 304 techniciens ambulanciers, dont 35 recrutés récemment, selon les chiffres du ministre de la Santé.

Le département d’Anas Doukkali semble avoir pris la mesure de l’urgence du chantier en termes de formation . «Nous comptons, dans le cadre de ce plan d’accélération, mettre en œuvre un programme de formation continue sur la prise en charge des urgences au profit du personnel médical et paramédical, et organiser le parcours professionnel du personnel des urgences », promet le ministre.

«La formation des médecins spécialisés prend beaucoup de temps et est moins attractive pour les étudiants en médecine. Par ailleurs, nous sommes en discussion avec le ministère de l’enseignement supérieur pour qu’on puisse valoriser et rendre plus incitative la spécialité de médecine d’urgence. Cette dernière sera donc revisitée dans le cadre de la réforme des études médicales», assure encore Anas Doukkali.

Intégrer le paramédical

En plus de la formation continue, le ministère de la Santé s’est penché également sur la formation de base des professions paramédicales en ouvrant une nouvelle filière dédiée aux soins d’urgence et soins intensifs au sein des Instituts supérieurs spécialisés dans les métiers de la santé et les techniques sanitaires (ISPITS). «Cette formation – licence, master, doctorat – a été lancée en 2014 avec la vocation de former des infirmiers spécialisés en soins d’urgence et soins intensifs. Ces infirmiers seront capables de prendre en charge des patients dont l’état est grave et qui ne peuvent être traités dans les autres services», nous explique Maria Mazouri, directrice des études à l’ISPITS de Casablanca.

En plus du corps infirmier, le ministère de la Santé formera aussi des aides-soignants. «Ils auront comme tâche d’assurer auprès des patients des soins d’hygiène et de confort, sous la supervision des infirmiers, ce qui aura une répercussion positive sur la qualité des soins », nous explique Anas Doukkali. «La formation du personnel médical et paramédical travaillant au niveau des différents services d’accueil des urgences est la véritable cheville ouvrière de ce plan d’accélération», conclut le ministre.