Il y a du cannabis un peu partout, sous toutes ses formes, sur les stands de Cannabis Expo, organisée de 13 au 16 décembre à Pretoria. La règle ? On expose, on regarde, mais on ne fume pas. De quoi néanmoins appâter des centaines de personnes, producteurs, fabricants, distillateurs, brasseurs, vendeurs ou simples consommateurs.
« C’est une immense opportunité, je ne pense pas que les gens réalisent à quel point », se réjouit Steve Carver, responsable de U Can Grow Africa, qui sous-loue des pans de terre pour la culture de cannabis. « Si l’on regarde le marché, ce qu’il se passe aux États-Unis ou au Canada, c’est énorme », poursuit-il. Les bénéfices tirés des produits fabriqués avec du cannabis sont « incroyables », assure également Sifiso Pretorius, qui détient une licence pour cultiver de la marijuana. « C’est une industrie principalement basée sur l’exportation, en dollars : le potentiel est énorme ».
Huiles médicales, friandises pour chien, habits en fil de chanvre, vaporisateurs, boissons énergétiques, casquettes, tatouages et conseils personnalisés… Sans oublier le kit de culture à domicile qui contient le nécessaire pour faire pousser sa propre herbe – thermomètre, lampe, sablier, produits chimiques et instructions : durant cette foire pour le moins originale, les visiteurs découvrent tout un monde de produits et de services dérivés du cannabis en provenance du sud de l’Afrique.
Fumer oui, mais chez soi
La Cour constitutionnelle a légalisé en septembre dernier la consommation du cannabis à usage personnel, épilogue judiciaire d’un dossier qui suscite la polémique depuis des années dans ce pays comme dans le reste du monde. Concrètement, un adulte peut désormais consommer, posséder ou cultiver du cannabis, pour sa consommation personnelle, à domicile. L’usage de la marijuana en public et sa commercialisation restent interdits. La plus haute instance judiciaire du pays a laissé deux ans au Parlement pour adopter un nouveau texte.
Haanes Swan, Zimbabwéenne de 25 ans, vend des habits en chanvre. Elle ne tarit pas d’éloge sur la matière. « Le tissu est quatre fois plus solide que le coton et (le chanvre) nécessite moitié moins d’eau pour pousser. On va pouvoir habiller les gens pour presque rien ». Pour certains, c’est l’opportunité de se lancer dans un nouveau boulot fixe ou d’appoint, dans ce pays où le taux de chômage atteignait 27% en décembre. « Je voulais m’informer sur la manière de faire pousser (de l’herbe). Je suis plutôt content par ce que j’ai trouvé ici: je sais où trouver les graines et tout le reste pour me lancer », explique Amogelang Shadi, étudiant en droit de 24 ans.
Rasta Sphesihle Madola, directeur de la compagnie Marijuana Board of South Africa, explique lui que la communauté rasta collabore déjà avec des associations de cultivateurs. « En tant que rasta, on s’y connaît sur l’économie du cannabis, on sait que cela génère de l’argent dans le monde. On appelle des investisseurs internationaux à investir et rendre l’industrie viable », explique-t-il à l’AFP.
Plusieurs pays ont déjà dépénalisé l’usage (récréatif et/ou thérapeutique, selon les pays) et la détention de cannabis, renonçant aux peines de prison envers les consommateurs (l’Uruguay en pointe, le Canada, la capitale Washington et huit États américains, les Pays-Bas ou l’Espagne).