Les «Savants du Sahara» voient les choses en grand. Ce groupe d’une cinquantaine de scientifiques issus des quatre coins du globe, dont une vingtaine de Marocains, ambitionne depuis 2015 de faire du désert un «espace vert». Baptisé «Trois S», le collectif rassemble des experts en sciences nucléaires, en informatique ou encore en agronomie. Il a été créé par le professeur hongrois Jozsef Steier. Le but de cette initiative environnementale : favoriser le reverdissement des régions arides au sud du pays.
Un site pilote dans la région de Dakhla a été choisi par l’équipe de savants pour expérimenter les résultats de leurs recherches en faveur de la lutte contre la désertification et en faveur du développement des rendements agricoles dans le Sahara. Le coût de ce projet, s’étalant sur une superficie de 25.000 hectares, est estimé par Jozsef Steier à 625 millions de dollars. Si des mesures et des moyens technologiques concrets (reforestation, pluie artificielle par laser, condensation de l’humidité…) sont déjà dans les tuyaux, le programme vient tout juste d’être présenté au gouvernement marocain.
Green Sahara
C’est en effet en marge des travaux de la 3e édition de la Foire agricole internationale de Dakhla-Oued-Eddahab, que, en se réunissant pour le troisième «Sahara Scientist Summit», les experts de «Trois S» ont fait part de l’avancée de leurs travaux. Leurs recherches s’inscrivent dans la prolongation des objectifs du premier Quadrat du Sahara vert (First quadrat of the green Sahara project’s objectives). Il s’agit d’un plan international qui a pour objectif la lutte contre la sécheresse ainsi que l’optimisation de la production agricole dans les zones désertiques. Le projet expérimental, qui est sera mis en oeuvre à 50km au sud de Dakhla, «va également dans le sens des objectifs affichés par le Plan Maroc-Vert et pourrait même participer à son accélération», nous indique le professeur installé depuis quatre ans à Marrakech.
Séduisant sur le papier et innovant d’un point de vue purement scientifique, le projet doit toutefois attendre «le feu vert du gouvernement», informe Jozsef Steier. A ce jour, le collectif n’a «pas encore eu de nouvelles des différents ministères concernés (Agriculture, Intérieur, Énergie, et Industrie notamment, NDLR)». Ces derniers «devraient se réunir en colloque pour examiner notre proposition. Nous espérons vivement qu’ils se manifestent et qu’ils participent aussi financièrement au moins à une hauteur de 10% , puisque ce programme ne pourrait qu’être bénéfique pour le pays», avance Jozsef Steier.
Egalement concernée, la direction de la Chambre d’agriculture de la région de Dakhla ne nous a pas donné plus de précisions quant à son éventuelle implication. Son administrateur chargé des fonctions du directeur, Machnane El Ghaylany, a seulement indiqué que les scientifiques de «Trois S» procéderont à «des essais sur des Paulownia, afin de généraliser prochainement cette expérience».
Optimisation de CO2
Le Paulownia est un arbre qui se développe rapidement et qui est connu pour sa grande capacité d’absorption de Co2 (capturant 86 kgs de C02 par an). L’arbre pousse facilement dans les cultures intercalaires et est «capable d’absorber 3 à 5 fois plus de CO2 que d’autres arbres».
Des Paulownias seront «plantés sur une importante surface du projet», avance Jozsef Steier. La mise en application de cette méthode permettrait d’utiliser le C02 comme fertilisant direct à ciel ouvert et de pallier ainsi «la pénurie d’eau et la baisse catastrophique des nappes phréatiques dans cette région»,
Jozsef Steier estime également que l’élaboration du projet engendrerait «un effet social positif», puisque des «personnes de la région seraient embauchées en tant qu’employés agricoles. Ce qui permettrait aussi de freiner le flux de migration».
Le collectif «Trois S» a déjà entamé des négociations avec des investisseurs internationaux, européens et privés pour financer l’enveloppe budgétaire estimée à une valeur de 625 dollars. Mais, à ce jour, et en attente de leurs retours, «nous ne dévoilerons pas pour l’instant l’identité de nos interlocuteurs financiers avant d’avoir le feu vert du gouvernement marocain», confie le leader du groupe de savants.
Pour le moment, «le principal concerné par le projet», le ministère de l’Agriculture, n’a pas répondu à nos sollicitations. Si une réponse favorable est émise par les différents ministères concernés, les scientifiques espèrent dans l’idéal mettre en exécution le début des travaux «dans six mois à un an», a confié Jozsef Steier à nos confrères du Matin.
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