L'administration Trump vue par le journaliste à l'origine du Watergate

Le Washington Post vient de publier les passages forts du livre à paraître de Bob Woodward. Intitulé Fear : Trump in the White House, l’ouvrage dresse le portrait d’un Donald Trump critiqué par ses propres proches et révèle des propos-chocs du président, comme celui de prévoir l’assassinat de Bachar El-Assad.

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Donald Trump, 45e président des États-Unis. Crédit: AFP

Un nouveau brûlot risque, encore une fois, de porter préjudice à la Maison-Blanche. Neuf mois après la publication de Fire and Fury : Inside the Trump White House, ouvrage incendiaire sur la campagne et la première année de Donald Trump signé Michael Wolff, le Washington Post publie les premiers extraits du livre de son ancien journaliste, Bob Woodward. L’homme de plume âgé de 72 ans est l’auteur de nombreux best-sellers, notamment le célèbre Les Hommes du président à l’origine des révélations du Watergate, et auréolé de deux prix Pulitzer.

À paraître le 11 septembre, Fear : Trump in the White House (« Peur : Trump à la Maison-Blanche »), signe un portrait tragi-comique des coulisses de la résidence présidentielle des États-Unis. Au menu : « Une maison de fous » au bord de la « crise permanente », des conseillers en proie aux doutes, voire à la « rébellion » face à un président irresponsable. En témoigne, l’un des passages croustillants du livre sur la volonté de l’ancien magnat de l’immobilier d’assassiner le président syrien Bachar El-Assad.

« Tuons-le, putain ! Allons-y ! On leur rentre dedans et on les bute », se serait fendu le locataire du Bureau ovale selon Bob Woodward. La scène se passe la veille d’un bombardement de représailles contre le régime syrien, le 16 avril dernier. Lors d’une conversation téléphonique avec son secrétaire à la Défense, le général James Mattis, Donald Trump aurait donné l’ordre d’abattre le chef d’Etat syrien. Une requête d’abord confirmée par l’ex-militaire au bout du fil, avant d’être balayée devant les conseillers une fois l’entretien terminé. « On ne va rien faire de tout ça, on va être beaucoup plus mesurés. » 

Dans une autre anecdote publiée par le Washington Post, James Mattis aurait comparé le comportement et les connaissances de Donald Trump sur les stratégies militaires à « celui d’un enfant de CM2 ou de 6e ».

Donald Trump, « un idiot » qui a « déraillé »

L’exaspération de James Mattis traduit la consternation générale de la part des ministres et conseillers du président américain. D’après l’auteur , cette lassitude est notamment présente au sein de ses plus proches relais, à l’image du secrétaire général de la Maison-Blanche, John Kelly. A l’occasion d’une réunion en petit comité, cet ancien officier de la marine aurait déclaré : « C’est un idiot. Il est inutile d’essayer de le convaincre de quoi que ce soit. Il a déraillé, on est chez les fous, je ne sais même pas ce que nous faisons. » Avant d’asséner d’un ton cinglant: « C’est le pire boulot que j’ai jamais eu. »

Des propos démentis par l’intéressé qui affirme, dans un communiqué relayé par Donald Trump, « passer plus de temps avec le Président que n’importe qui » et assure avoir « une relation incroyablement forte et franche ». « C‘est une tentative pathétique de salir les proches du président Trump et de détourner l’attention des nombreux succès de l’administration », poursuit John Kelly.

Même son de cloche pour Donald Trump qui s’est fendu, via son réseau social favori, d’une série de tweets dénonçant une escroquerie. Dans ces posts, il dénonce « un livre négatif« , discrédite son auteur et affirme que le recueil est composé d’interviews arrangées qui ont pour unique but de « nous [l’équipe présidentielle, ndlr] diviser ». Avec des élections de mi-mandat qui approchent (6 novembre) et une cote de popularité à la baisse, Fear : Trump in the White House n’arrive en effet pas au bon timing pour le président américain et ses acolytes.

« Coup d’État administratif »

Dans cette enquête de 448 pages qui dépeint un président colérique et irresponsable, Bob Woodward raconte également comment Gary Cohn, ancien conseiller économique de la Maison-Blanche, subtilisa du Bureau ovale un décret prévoyant de retirer les États-Unis d’un accord commercial avec la Corée du Sud.

Un court-circuitage « en règle » au nom « de la sécurité nationale« , avança-t-il avant de rééditer cette opération commando avec un autre texte mettant fin à la participation américaine à l’accord de libre-échange avec le Canada et le Mexique. Comble de l’ironie, ce « coup d’État administratif » a été perpétré sans que Donald Trump s’en aperçoive, avance l’auteur de l’ouvrage.

Une administration semblant au bord du chaos que Rob Porter, ancien secrétaire du personnel de la Maison-Blanche décrit en ces termes dans le livre : « C’était comme marcher constamment au bord d’une falaise. Parfois, on tombait de la falaise et il fallait agir ». 

Par Medhi Mahmoud

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