Promotion économique au ralenti
Le rapport note la faible efficacité du dispositif d’aide à la promotion de l’investissement. La Cour des comptes reproche ainsi à l’Agence marocaine de développement des investissements et des exportations (AMDI) la lenteur du processus décisionnel. Le rapport note que « l’approbation d’un projet d’investissement, dont l’opportunité était prouvée, pourrait nécessiter un traitement au niveau de plusieurs commissions administratives nationales juridiques et locales pour lever les contraintes techniques, mais surtout urbanistiques».
Ces projets créent peu d’emplois par rapport au montant des investissements engagés. Le coût de création d’un poste d’emploi reste élevé, juge la Cour des comptes. Ce coût varie entre 0,4 MDH dans la branche restauration, et 26,5 MDH dans le secteur de l’énergie. Le coût moyen étant de 2,2 MDH par poste créé.
Concernant l’Agence nationale pour la promotion de la petite et moyenne entreprise (ANPME), l’institution de Driss Jettou juge que « la procédure d’octroi des prestations et primes liées à ces programmes souffre de lenteur » et que « le taux de réalisation des actions initiées demeure en deçà des attentes».
Dans le secteur du tourisme, le rapport relève que l’Office national marocain du tourisme (ONMT) « n’a pas réussi suffisamment à explorer d’autres voies pour promouvoir des produits de niche susceptibles de faire bénéficier d’autres destinations, hors Marrakech et Agadir, des retombées des flux touristiques». Le document met également en lumière les dysfonctionnements du plan Azur, un des piliers de la Vision 2020.
Ainsi, la Cour des comptes constate l’absence de «processus susceptibles d’aider à l’identification des objectifs réalisables, d’allouer des moyens budgétaires et humains et de définir des tâches précises qui incombent à chaque intervenant aussi bien au sein de l’ONMT qu’au niveau des délégations du ministère du Tourisme».
Les objectifs du plan Azur restent aussi difficiles à atteindre : en termes de capacité litière, « sur un objectif global de 57.956 lits touristiques pour les six stations du plan Azur à l’horizon 2020, seulement 1.576 lits ont vu le jour en 2015, soit un taux de réalisation de 2,7%. Pour le volet résidentiel, ce taux est de 6,5%».
Pour les exportations, Maroc Export souffre d’ « absence de visibilité stratégique dans le domaine du commerce extérieur », ainsi que de « carence au niveau de l’approche retenue en matière de promotion des exportations». Les auteurs du rapport constatent par ailleurs une augmentation du nombre d’entreprises accompagnées par Maroc Export, mais relèvent aussi « une rotation faible des participants et une concentration élevée et récurrente au niveau de certains bénéficiaires».
Aussi, l’instance de Driss Jettou apporte une nuance aux bonnes performances de l’économie marocaine à l’export. Celles-ci restent le fait d’un nombre restreint d’entreprises qui sont de toute façon hors du champ couvert par les actions de Maroc Export.
Des logements sociaux à coucher dehors
Les dispositifs de production du logement social restent peu cohérents selon la Cour des comptes. Deux produits sont analysés par le rapport : le produit à 140.000 dirhams et celui à 250.000 dirhams. Pour le logement social à 140.000 dirhams, un produit destiné prioritairement aux ménages résidant dans les bidonvilles et les quartiers menaçant ruine, les réalisations « ne semblent pas à la hauteur des efforts déployés», juge le rapport.
Sur une production de 21.006 unités réalisées fin décembre 2016, seules 6.020 ont été affectées au programme Villes sans bidonvilles (VSB). 1.113 autres unités ont été consacrées au programme de l’habitat menaçant ruine (HMR). Ces chiffres représentent des taux respectifs de 29% et 5%. La contribution du produit à 250.000 dirhams à ces programmes reste dérisoire, et n’a guère dépassé 1,47% de la production totale.
La Cour des comptes relève aussi que les différents dispositifs initiés par l’Etat en matière de logement social se ressemblent en termes de « nature de produits, de modes d’intervention et de leurs caractéristiques techniques ». Ainsi, sur le plan des exonérations des impôts et taxes, les deux produits «adoptent le même mécanisme d’exonération au profit des promoteurs». La seule différence se situe au niveau de l’exonération totale de la TVA au profit de l’acquéreur pour le produit à 250.000 dirhams.
Ces dispositifs n’ont pas permis d’absorber de manière significative le déficit et le besoin en logements sociaux. Ainsi, 40% des bénéficiaires du logement à 140.000 dirhams se situent dans la tranche de revenus entre 3.800 dirhams et 4.700 dirhams, alors que la part de ceux dont les revenus sont inférieurs à 2.000 dirhams par mois est de 21%.
Une gestion boiteuse des retraites
La situation financière de la Caisse marocaine des retraites (CMR) est jugée fragile par l’institution. Cette caisse gère deux régimes de retraite : le régime des pensions civiles (RPC) et le régime des pensions militaires (RPM). Ainsi, le RPC a connu un déficit technique de 2,68 milliards de dirhams en 2015 et de 4,76 milliards en 2016.
Les auteurs du rapport rappellent qu’avant la réforme de 2016, les pensions de retraite étaient calculées sur la base du dernier salaire d’activité. Ceci a créé un déséquilibre important entre les cotisations payées et les pensions servies. Il faut ajouter à cela « la tendance à la quasi-généralisation des promotions et avancements de grade dans l’administration, à l’approche de l’âge de la retraite», note la Cour.
Les autres causes de cette situation sont à rechercher dans la prise en charge des allocations familiales par le régime, alors qu’il n’existe ni fonds de réserve ni cotisations spécifiques destinées au financement des allocations familiales. A cela s’ajoute l’allocation immédiate des pensions en cas de départ anticipé à la retraite, contrairement au RCAR et au régime de retraite géré par la CNSS.
Gestion des aéroports tous azimuts
Le document reproche à l’Office national des aéroports (ONDA) le non-respect du schéma directeur planifié par le ministère de l’Equipement et du Transport, planifiant son développement à l’horizon 2030. « Ces investissements engagés dans la réalisation de projets non prévus dans le document d’orientation se sont avérés dans la plupart des cas inopportuns. Ils ont d’autant plus été réalisés aux dépens d’autres projets prévus par le schéma directeur ».
Ainsi, le schéma directeur prévoyait la construction d’une troisième piste au niveau de l’aéroport Mohammed V de Casablanca afin de pouvoir accueillir des avions de classe F (A380). Cette piste n’ayant jamais été réalisée, l’aéroport a dû soumettre ce type d’avions à des restrictions en termes de charge pour l’atterrissage sur l’une des deux pistes existantes.
Concernant l’aéroport de Rabat-Salé, et alors que le schéma directeur avait jugé son développement non prioritaire, l’ONDA a quadruplé sa capacité d’accueil. Une décision injustifiée et qui ne s’est basée sur aucune étude préalable, conclut le rapport.
Même constat au niveau de l’aéroport de Zagora. Ignorant les orientations du schéma directeur, l’Office a procédé en 2011 à l’installation d’une structure capable d’accueillir 250.000 passagers annuellement. Une décision qui s’est avérée infructueuse, puisque la fréquentation de l’aéroport a atteint moins de 5.000 passagers en 2016.
Centres hospitaliers régionaux cherchent spécialistes
La Cour des comptes relève dans son rapport que certains centres hospitaliers n’offrent pas l’intégralité des prestations devant être assurées selon le décret N°2.06.656 du 13 avril 2007 sur l’organisation hospitalière.
Ainsi, le centre hospitalier régional de Marrakech n’offre pas de prestations en chirurgie générale, en neurochirurgie et en pneumologie. Alors que les prestations de cardiologie et d’endocrinologie se limitent aux consultations externes du fait de l’existence d’un seul médecin par spécialité.
Quant au centre hospitalier préfectoral de Berkane, les prestations de stomatologie et de chirurgie maxillo-faciale ne sont pas assurées. Les services d’ophtalmologie et de santé mentale ne sont pas fonctionnels du fait de l’absence d’équipement et du manque en personnel paramédical. De plus, les prestations en endocrinologie ne sont pas non plus disponibles depuis fin 2015, suite à la mutation du seul médecin spécialiste qui exerçait au sein de ce service.
Les délais de consultation et d’hospitalisation sont aussi jugés anormalement longs. Au niveau du centre hospitalier préfectoral de Berkane par exemple, les délais en otorhinolaryngologie ont dépassé 10 mois, trois mois en rhumatologie, et deux mois et demi en endocrinologie. Ces délais ont atteint deux mois pour la médecine interne et la chirurgie infantile.
Pour le centre hospitalier préfectoral d’El Jadida, le délai d’attente pour une consultation en cardiologie atteint sept mois et demi. Il est de sept mois pour la neurologie, cinq mois et 20 jours pour l’endocrinologie, cinq mois pour la rhumatologie et deux mois et 20 jours pour la chirurgie infantile.
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