Je voulais me donner une leçon de persévérance, mais j’ai découvert que mon histoire en était une pour les autres ». C’est par cette phrase emplie de sagesse que Lahcen Chakiri, bachelier le plus âgé de la promotion 2018, décrit son parcours. Un itinéraire atypique qui lui a permis de décrocher son diplôme du bac à l’âge de 69 ans, alors qu’il avait débuté ses études dans le Maroc postindépendance.
« J’ai dû arrêter mes études en 1967 à cause de la situation financière de ma famille. A 17 ans, j’ai travaillé dans les chantiers de la promotion nationale », raconte le tout fraîchement diplômé à TelQuel Arabi. Le jeune homme y restera pendant trois ans avant de quitter le Maroc pour s’en aller à Strasbourg, où il suivit une formation en mécanique et trouva un emploi.
C’est dans l’Hexagone que Lahcen Chakiri se découvre une nouvelle passion : celle des livres. »C’est la France qui a renforcé mon amour pour la lecture. J’adorais la littérature des Lumières et leur analyse des transformations sociales et économiques de la France. Les romans de Zola et de Balzac m’ont également beaucoup influencé », témoigne-t-il.
Un bibliophile déterminé
Près d’une décennie après son départ du Royaume, en 1982, Lahcen Chakiri revient au Maroc pour lancer une entreprise spécialisée dans la mécanique dans sa ville natale de Tinghir. Mais, ne pouvant mettre le projet sur les bons rails, il décide de travailler pour une société minière de la région avant de prendre sa retraite.
C’est à ce moment-là que Lahcen Chakiri a une révélation. Alors qu’il regarde un documentaire français consacré à l’éducation au Japon, il décide de revenir sur les bancs des écoles, près d’un demi-siècle après les avoir quittés. « L’amour que portent les Japonais envers l’éducation m’a énormément impressionné ».
Soutenu par ses proches, l’homme reprend alors son cursus scolaire en 2014. Après quatre années passées en classe, il passe la première session du baccalauréat et obtient une moyenne 9,88. Déterminé à obtenir son diplôme, le père de six enfants passe l’examen de la session de rattrapage, à l’issue duquel il finit par obtenir son Graal avec une moyenne de 11,29.
Retour aux premières amours
Son objectif accompli, le diplôme du lycée Boumalen Dads de Tinghir ambitionne désormais de poursuivre ses études supérieures en littérature française. Une évidence pour celui qui a dû mettre sa passion pour la lecture de côté durant ses études. « J’ai abandonné la lecture pour préparer l’examen du baccalauréat », nous confie-t-il.
Ses études supérieures, le plus âgé des bacheliers marocains compte les poursuivre à la faculté polytechnique d’Errachidia, la plus proche de Tinghir. Pour ne pas priver l’un de ses futurs camarades d’une place en résidence universitaire, Lahcen Chakiri a décidé de louer un appartement pour sa nouvelle vie d’étudiant. Une nouvelle vie qui lui permettra de marcher sur les traces de trois de ses enfants, tous licenciés en littérature française et auxquels il a transmis sa passion.
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