Alphadi: "Mohammed VI est un roi très sensible aux valeurs créatives d'Afrique"

Rencontre avec Alphadi styliste nigérien incontournable qui a choisi Dakhla comme point de chute pour la 11e édition de son festival international de mode africaine.

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Alphadi Crédit: DR

C’est une première, le Maroc va accueillir la 11e édition du festival international de mode Africaine du 21 au 24 novembre prochain. C’est un créateur de mode haut en couleur qui est derrière cette manifestation panafricaine de mode. Il s’appelle Seidnaly Sidhamed, mais on l’appelle Alphadi. Il est nigérien, né au Mali. Et depuis plus de deux décennies, le « magicien du désert » a une grande notoriété à l’international avec des représentations de sa griffe « à Bamako, Abidjan, Paris ou encore New York« .

Pour l’édition 2018 de son festival, Alphadi a donc choisi la ville de Dakhla. Au programme, une soirée musicale d’ouverture avec des musiciens de talents comme Youssou N’dour et Selif Keita, nous détaille le créateur que nous avons rencontré dans un hôtel casablancais.

La deuxième journée sera consacrée à un défilé panafricain, la troisième aux travaux des finalistes d’un concours de création et de mannequinat, et pour la clôture un défilé rassemblant des créateurs des cinq continents avec, entre autres, la prêtresse de la mode sénégalaise Oumou Sy, le styliste burkinabé Pathé Ouédraogo qui a notamment habillé Nelson Mandela, ou encore le styliste malien Lamine Badian Kouyaté.

Au menu des conférences sur l’industrie culturelle de la mode et son financement. Ainsi qu’une exposition d’art contemporain africain et une autre consacrée à l’artisanat (bijouterie, maroquineries, textiles) dans les pays du sud.

Telquel.ma : Vous dites que Hassan II, un monarque notamment réputé pour sa sape, a soutenu le festival depuis sa première édition en 1998. Comment vous a-t-il aidé ?

Alphadi : J’aurais tellement aimé avoir Hassan II comme roi et je vais vous expliquer pourquoi. Avant le lancement de la première édition du festival, j’ai demandé à l’ancien et feu président du Niger Ibrahim Baré Maïnassara d’écrire au roi du Maroc afin qu’il puisse nous aider à monter le projet. Il a été réactif et nous a dit « tout ce que vous voulez, je vous le donne« . Suite à cette correspondance, j’ai pu rencontrer plusieurs ministres, dont celui de la culture. Sa Majesté a mis 14 rotations d’avion de matelas, de tentes caïdales, musiciens et artistes marocains. Un soutien indéfectible qui continue jusqu’à aujourd’hui.

Vous êtes un « admirateur » de feu Hassan II, mais quel est votre rapport avec Mohammed VI ?

J’ai rencontré Mohammed VI pour la première fois à Bamako au cours de l’investiture du président malien (Ibrahim Boubacar Keïta, ndlr) en 2013. Quelques mois plus tard, j’ai envoyé une lettre au cabinet royal expliquant mon idée d’organiser le festival de la mode africaine à Dakhla et on m’a donné le patronage de Sa Majesté ainsi qu’un soutien. Aussi, je suis honoré que Sa Majesté porte mes créations. Il est déjà passé dans ma boutique d’Abidjan. Nous l’aimons beaucoup, nous sommes fières d’avoir un roi panafricain comme lui.

Par rapport au festival, Mohammed VI continue ce que son père a commencé. Le fait que le festival ait lieu cette année au Maroc est tout un symbole. C’est un roi très sensible aux valeurs créatives d’Afrique, qui a compris que la coopération sud-sud est primordiale pour l’éveil des peuples africains. Et c’est une manière de faire le lien entre des peuples très soudés historiquement.

Comment le Maroc contribue à cette 11e édition du festival ?

L’État marocain a apporté son soutien à tous les niveaux. C’est un soutien logistique, intellectuel, mais aussi de grands sponsors. Je ne pourrai malheureusement pas vous donner plus de détails.

Aujourd’hui, l’Afrique est très en vogue dans l’imagerie de la mode occidentale. Est-ce qu’à travers ce festival, vous militez pour la construction d’une industrie de la mode africaine ?

Contrairement à ce que beaucoup de chefs d’État et responsables pensent, la mode est une question sérieuse et il n’y a qu’à voir la popularité de la mode africaine en Europe et ailleurs. C’est un secteur qui peut générer de l’argent, créer de l’emploi et c’est très bon outil diplomatique. À travers ce festival, j’ai envie d’aider, de former et de développer des projets aux côtés de nouveaux et jeunes créateurs. Ce qui importe pour moi aujourd’hui est d’établir des industries de mode 100% africaines. Je me bats pour que des marques africaines puissent être produites au Maroc, en Algérie ou à Bamako…Et pour donner de l’élan à cette ambition, je milite pour que la fédération africaine des créateurs de mode, dont je suis président, pousse avoir un poids dans ce combat. D’ailleurs, j’aimerai que le siège de l’association prenne place à Rabat.

 

 

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