C’est à l’issue d’un long combat contre le cancer que Tajeddine Baddou s’est éteint dans la journée du 8 juin à l’âge de 75 ans. Cet ancien sociologue et démographe est surtout connu pour sa carrière de diplomate qui l’a notamment mené à Prague, Ottawa ou encore Rome. Mais c’est surtout en France que Tajeddine Baddou a marqué les esprits durant les deux années où il a occupé le poste de commissaire de l’année du Maroc en France. Retour sur le parcours de ce diplomate et homme de culture qui a permis à la culture marocaine de briller en France.
Un sociologue devenu diplomate
Initialement rien ne prédestinait Tajeddine Baddou à une carrière de diplomate. Fils de la figure de l’Istiqlal et ancien ministre des Habous, Mekki Baddou, Tajeddine Baddou décide de faire des études en lettres à Bordeaux après avoir obtenu son baccalauréat au lycée Descartes de Rabat. Il se tourne ensuite vers l’étude de l’économie et de la sociologie, à Nancy puis à Paris, avant d’obtenir un doctorat en démographie.
Un parcours qui lui permet d’intégrer l’Institut national de la statistique et de l’économie applique (INSEA) à Rabat durant les années 1970. En parallèle de sa carrière à l’INSEA, durant laquelle il se consacre notamment à des enquêtes sur les questions de fécondité et de vieillissement, il est également consultant pour le Conseil économique et social de l’ONU ainsi que le le Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP). Durant cette période, le chercheur mène également les délégations marocaines au Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et à l’Organisation Internationale du Travail (OIT).
Une expérience qui lui permet d’intégrer, en 1983, le ministère des Affaires étrangères en tant que Directeur de la coopération multilatérale. Trois ans plus tard, à l’âge de 43 ans, il est nommé ambassadeur du Maroc à Prague. Une fonction qui lui permet d’être aux premières loges pour assister à la révolution de velours tchécoslovaque qui mènera à la chute du régime communiste.
Chef d’orchestre
Après son passage à Prague, Tajeddine Baddou met le cap vers l’Amérique, plus précisément au Canada où il mène la représentation marocaine à Ottawa. Une fonction qui le pousse à arpenter le pays à la feuille d’érable en long et en large en y organisant de multiples conférences et expositions selon un article consacré au diplomate publié par Maroc Hebdo en 1999.
L’auteur de ce portrait, l’actuel directeur de la MAP Khalil Hachimi Idrissi, se souvient d’un« homme très distingué, aux allures british, ayant une très grande culture générale. C’était un homme de velours, quelqu’un de raffiné qui donnait une très belle image du Maroc». Des qualités qui lui permettront d’être désigné, en 1997, au poste de commissaire de l’année du Maroc en France par le roi Hassan II.
Un poste stratégique dans le cadre de cette manifestation culturelle voulue par le souverain et le président français Jacques Chirac. « C’était une période de réconciliation entre le Maroc et la classe politique française après les turbulences qu’ont connu les relations entre les deux pays lors de la présidence de François Mitterrand » se souvient Khalil Hachimi Idrissi. C’est d’ailleurs avec le neveu de l’ancien chef d’Etat français, Fréderic Mitterrand, que Tajeddine Baddou doit faire office de « chef d’orchestre » pour organiser cette manifestation culturelle qui s’est déroulée tout le long de l’année 1999.
Dernier défi
A l’issue de deux années de travail, les deux hommes parviennent notamment à organiser un match amical France-Maroc, à installer une reproduction du Bab El Mansour de Meknès sur la Place de la Concorde et à mettre en place une exposition consacrée à la gestion de l’eau au Maroc à la Cité des sciences de Paris. Au total ce sont près de 200 manifestations culturelles qui sont organisées sur le territoire français et qui permettent au Maroc « de ressortir avec une image de pays de culture » en France selon Khalil Hachimi Idrissi. Pour sa participation à l’organisation de l’année du Maroc en France, Tajeddine Baddou s’est vu décorer de l’insigne d’Officier dans l’ordre des Arts et des Lettres en 2011.
Une fois sa mission en France accomplie, Tajeddine Baddou termine sa carrière à diplomatique à Vienne et à Rome où il occupe la fonction d’ambassadeur. Six ans après son retrait de la scène diplomatique, il revient sur le devant de la scène culturelle, en 2014 lorsqu’il est nommé à la direction de la Fondation esprit de Fès. Un dernier défi que Tajeddine Baddou relève pendant près de deux ans permettant notamment au festival des musiques sacrées de Fès de faire la part belle au continent africain. Le diplomate a été inhumé ce samedi 9 juin au cimetière Achouhada de Rabat.
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