Marrakech : Un fqih poursuivi pour le viol de plusieurs mineures

Le procès du fqih, arrêté pour avoir abusé sexuellement d'une dizaine d'enfants d'un douar dans la région de Marrakech, débutera le 26 juin.

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Le père de l'une des victimes. Crédit photo : capture d'écran vidéo Hespress

Le douar Bah Louane, dans la province d’El Haouz, près de Marrakech, est sous le choc. La semaine dernière, une dizaine de familles ont porté plainte contre le fqih du douar. Elles l’accusent d’avoir abusé sexuellement de leurs filles mineures. L’homme a été arrêté jeudi 24 mai, puis traduit le dimanche 27 mai devant le Parquet général de Marrakech. L’homme est actuellement en prison. Son procès débutera le 26 juin prochain.

Le fqih, âgé d’une quarantaine d’années, est depuis 20 ans prédicateur à Bah Louane. Il enseigne le coran aux jeunes enfants du village après la sortie de l’école. Parfois, lorsque les imams ne sont pas là, il assure la prière du vendredi. Ce « professeur » était jusque là « aimé et respecté de tous », nous affirme Omar, membre de l’AMDH Marrakech qui a suivi l’affaire de près.

Drame collectif

Le scandale a éclaté avec la fuite, quelques jours plus tôt, d’une jeune fille du douar âgée de 17 ans après qu’un homme lui a demandé sa main. Elle s’est enfuie vers Rabat. Quand son père et la police de l’Ourika l’ont enfin retrouvée, la jeune fille a déclaré qu’elle avait été violée quand elle avait 10 ans par ledit fqih.

« Elle a dit aux gendarmes qu’il continuait même de violer d’autres filles du douar », nous explique Omar. En effet, quelques jours après seulement la révélation de la jeune fille, les familles de sept autres jeunes filles, âgées de sept à douze ans, ont déposé plainte contre le fqih pour le même motif. Selon nos sources, il y aurait également deux autres jeunes filles qui auraient déclaré avoir été victimes de violences sexuelles en 2014 et en 2010 respectivement.

Dans une vidéo publiée par le site Hespress (voir ci-dessous), le père de l’une des victimes raconte : « Comme tout le village, au début je n’y ai pas cru. Puis j’ai eu une conversation avec ma fille pour lui demander si elle aussi avait été victime. Elle m’a dit que oui et elle m’a tout raconté en détail ».

Dans la même vidéo, le père de la première victime raconte qu’il y avait, en effet, des signaux d’alerte : « A un moment, ma fille ne voulait plus prendre des cours de coran et ne voulait plus partir à l’école ». Selon Omar, membre de l’AMDH, la jeune fille aurait déjà fait trois tentatives de suicide avant sa fuite. Encore sous le choc, le père de la victime ajoute : « Quand ma fille était plus jeune, elle revenait de l’école et partait ensuite prendre des cours de coran avec le fqih à la mosquée. Nous avions confiance en lui. Mais en réalité, il abusait sexuellement d’elle ».

Le douar en colère et solidaire

Le lundi qui a suivi la comparution du fqih devant le procureur, les gens du petit village se sont rendus à la mosquée. « Ils ont détruit tout ce qu’il y avait dans la chambre du prédicateur », affirme Omar. Selon les témoignages, c’est dans cette chambre qu’il violait les enfants. « Parfois, il demandait aux élèves de son cours de nettoyer la mosquée. Ensuite, il demandait à l’une d’entre elles de laver sa petite chambre. C’est là qu’il la violait », nous explique Omar. Dans la vidéo publiée par Hespress, le père de l’une des victimes raconte qu’après avoir abusé de l’enfant le fqih lui donnait une datte pour le récompenser.

Selon un autre membre associatif local, les jeunes victimes sont dans un état psychologique critique. Le procureur a demandé à ce que ces dernières voient un psychiatre. L’AMDH essaye actuellement de mettre les familles en lien avec un psychiatre du CHU de Marrakech. « D’après le père de la première victime, les petites filles vont très mal. Mais tout le douar est très solidaire. Aucun père n’a rejeté sa fille. Au contraire, ils savent qu’elles sont en souffrance et que ce sont elles les victimes », nous assure Omar.

Cela fait plusieurs fois que l’AMDH lance l’alerte sur ce type de pratiques. « On a enregistré des cas de pédophilie dans les mosquées de plusieurs douars, comme à Chichaoua, à Taroudant ou encore autour de Marrakech », se désole le militant. Pour lui, la solution au problème est, en partie, d’ordre politique : « Ce genre de prédicateur n’est pas payé par l’Etat et ne dépend pas du ministère des Habbous. Il est choisi et payé par les gens du bourg. Il faudrait que ces fqihs soient sous la tutelle du ministère pour être contrôlés ».

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