Le 27 mai, lors de la première réunion de la Commission nationale de son parti depuis son élection en tant que secrétaire général du PJD, Saad Eddine El Othmani a abordé, entre autres, la campagne de boycott. A cette occasion, le chef du gouvernement a annoncé le lancement d’une commission dédiée au suivi de la structure des prix des produits de la grande consommation, sans pour autant donner plus de détails.
Cette « promesse » s’ajoute la précédente commission, chargée quant à elle de suivre l’évolution des prix sur le marché. Objectifs de ce nouveau projet : protéger le pouvoir d’achat du consommateur et lutter contre les situations monopolistiques.
Les professionnels invités à coopérer, mais…
L’établissement des prix porte sur toutes les composantes ou les dépenses (par exemple, transports, stockage…) qu’engage un producteur pour fixer le prix final de vente. Cette structuration tarifaire permet également de mesurer les marges réalisées par les producteurs. Ce qui fait « qu’en l’absence de l’implication des professionnels, le gouvernement serait incapable de cerner la structure des prix”, explique Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des droits des consommateurs.
“Nous avons déjà alerté le gouvernement Benkirane – lorsqu’il menait sa réforme de la libéralisation des prix des hydrocarbures – sur la nécessité de connaître la structure des prix. En tant que fédération de défense des droits des consommateurs, il est de notre devoir d’être transparent sur cet aspect”, déclare-t-il.
La clé de voûte de cette future commission résiderait dans l’implication des professionnels. Laquelle fait toutefois douter le président de la FMDC. Les raisons de sa suspicion : la nature du système fiscal en place, ainsi que la problématique de la transparence. Bouazza Kherrati explique : “Lorsqu’on est dans un système démocratique et de transparence, personne ne va chercher à frauder. Mais, au Maroc, les gens ont peur du système fiscal, ce qui les entraîne à le faire. Cette fraude se matérialise, entre autres, par la tenue de plusieurs comptabilités : une pour le fisc et une autre en interne”. Et d’ajouter : “Prenons l’exemple du pain, comment peut-on établir sa structure de prix, puisqu’il comporte plus de 16 intrants… Seuls les professionnels en sont capables”.
« Poudre aux yeux »
Pour le président de l’association, l’annonce du chef du gouvernement n’est que « de la poudre aux yeux pour calmer les esprits. Au lieu de créer des commissions, il faut passer à l’action en mettant en place des mesures urgentes, comme réactiver le Conseil de la concurrence, activer le Conseil supérieur de la consommation et instaurer des institutions de régulation”. Et d’enchérir : “Créer une commission pour nous faire part de ses recommandations, ça ne règle pas le problème. Il y a déjà plusieurs instances de ce genre, mais elles ne résolvent pas les problèmes. Au contraire, elles les enterrent”.
Bouazza Kherrati suggère également de revoir le système fiscal qu’il trouve “répressif” au lieu d’être « citoyen« . Et ce, en « faisant face à la réalité du marché », qu’il juge “anarchique”, puisque les autorités n’arrivent pas à retracer les circuits des produits ni le nombre d’intermédiaires qui font augmenter les prix en spéculant.
Quant à la nécessité d’impliquer toutes les parties prenantes du marché dans le but de lutter contre les pratiques illégales touchant à la poche des consommateurs, Bouazza Kherrati appelle l’Etat à “faire adhérer tant les producteurs et les consommateurs que les médias. C’est le seul moyen pour limiter les déséquilibres”. Selon lui, “le gouvernement est en train de payer le prix de sa surdité aux sonnettes d’alarmes qui lui ont été lancées”, à travers l’inédite campagne de boycott.
Nous avons tenté de joindre le cabinet du chef du gouvernement afin d’obtenir plus de détails sur le sujet, sans succès.
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