Finance participative: le Conseil supérieur des oulémas submergé par les textes réglementaires

La finance participative s'installe de manière progressive au Maroc, mais la vitesse à laquelle avance le cadre réglementaire n'est pas suffisante pour les professionnels du marché. Et pour cause, un conseil de seulement douze oulémas doit valider la conformité à la charia de tous les textes avant qu'ils n'entrent dans le circuit législatif.

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Après les banques participatives, l’écosystème de la finance participative devrait s’étoffer de deux autres piliers pour être complet. Il s’agit d’une part, de l’assurance participative pour garantir les produits bancaires participatifs (mourabaha immobilier, automobile, bancassurance, investissement…), et d’autre part du marché participatif des capitaux, avec notamment les sukuks pour dynamiser le marché monétaire et par conséquent l’échange de cash entre les banques participatives.

« Nous sommes aujourd’hui fiers de réunir pour la première fois tout l’écosystème autour de ce débat sur le développement de la banque et de la finance participative au Maroc« , annonce Said Amaghdir, président de l’Association marocaine pour les professionnels de la finance participative (AMFP) en introduction de l’INF Forum, le 17 avril à Casablanca.

« L’idée est de réussir cette expérience au Maroc et ensuite l’exporter de manière progressive vers nos partenaires en Afrique« , poursuit-il. Les acteurs de la finance participative réunis dans ce forum sont dans les starting-blocks, mais font remarquer à l’unanimité la lenteur de l’évolution du cadre réglementaire.

Un écosystème au ralenti

Tous les textes relatifs aux projets de loi sur les produits participatifs (sukuk, mourabaha, takaful…) doivent recevoir l’aval des oulémas avant leur publication officielle. Une commission des finances participatives a d’ailleurs été créée à cet effet au sein du Conseil supérieur des Oulémas.

Cette nouvelle commission a notamment pour mission essentielle de statuer sur la conformité avec les préceptes de l’islam des produits des finances participatives proposés par les banques, les assureurs et les sociétés de titrisation à leurs clients.

Problème: une douzaine d’oulémas seulement siègent dans cette commission et le nombre de textes et la nouveauté des métiers de la finance participative submerge le petit groupe chargé de les étudier, et dont la moyenne d’âge se situe autour de 60 ans. Les professionnels estiment que ce nombre devrait être multiplié par 4 au minimum pour pouvoir sortir de ce goulot d’étranglement.

Projets sur les rails

La Bourse de Casablanca doit prochainement lancer son premier indice boursier charia compliant. Cet indice pourrait notamment servir de référence pour les assureurs takaful et les gestionnaires de fonds. Néanmoins, en plus d’attendre la validation de l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), le lancement de cet indice devra également attendre la validation des oulémas.

Et d’autres projets s’accumulent. Il s’agit, en matière d’assurance takaful, de la validation des conditions générales des produits d’assurance, de la validation de l’arrêté du ministère des Finances et enfin la validation de la circulaire.

Le marché de capitaux attend quant à lui le lancement de l’émission souveraine de sukuks, la mise en place de l’asset management participatif, ainsi que des organismes de placement collectif en immobilier (OPCI) participatifs.

Un marché mondial de 2.000 milliards de dollars

Le business model adopté par les autorités marocaines repose sur l’adaptation de cette nouvelle finance participative à l’éthique et à la performance. Grâce aux réseaux bancaires et assurances existants, ainsi que le hub financier Casa finance City, le Royaume dispose déjà de l’infrastructure nécessaire pour démarrer l’expérience localement, structurer l’offre et l’adapter pour d’autres partenaires en Afrique.

Avec ce chainon réglementaire manquant, le Maroc pourrait espérer capter une partie du volume d’affaires en finance participative, estimé à 2.000 milliards de dollars.

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