« Il y a des dérapages dans les relations entre d’un côté certains laboratoires pharmaceutiques, fabricants de produits esthétiques et de dispositifs médicaux, et de l’autre, certains professionnels de santé, associations de malades et médias« , assène Mustapha Brahimi, député PJD, membre de la commission des secteurs sociaux à la Chambre des représentants.
Si le phénomène est connu de tous et dépasse largement les frontières marocaines, le député, sur la base de ses échanges avec la CNOPS et la CNSS pour préparer le texte de loi, relève que « certains médicaments très onéreux sont plus vendus que d’autres équivalents moins chers, car certains laboratoires sponsorisent des associations de malades pour qu’elles fassent pression sur les organismes gestionnaires d’assurance afin que ces médicaments soient remboursés« .
Pour Mustapha Brahimi qui préfère taire les noms des médicaments qu’il a en tête, une chose est sûre: « 70% des médicaments prescrits au Maroc sont des princeps, là où 70% de ceux prescrits aux États-Unis sont des génériques« . Notons que le pays de Donald Trump s’est doté d’une loi « anti-cadeau » de transparence dans le secteur pharmaceutique dès 1974.
Le dérapage dénoncé par le député est loin d’être le seul. Les formations médicales continues, dont certaines s’apparentent pour le député à du « tourisme médical », sont également dans le viseur du texte de loi. « Certaines formations ne sont pas très crédibles. Certains professionnels de santé sont pris en charge avec toute leur famille et parfois même leur employée de maison dans des hôtels 5 étoiles, et voyagent en classe affaire« , détaille-t-il.
Le secteur est également gangrené par les nombreux dons et cadeaux faits aux professionnels de santé par le secteur des laboratoires pharmaceutiques privés, qui pesait en 2016 pas moins de 9 milliards de dirhams (hors marchés publics) selon l’association marocaine de l’industrie pharmaceutique (AMIP).
2.000 dirhams au maximum par an et jusqu’à 100.000 dirhams d’amende
Pour limiter ces excès, le groupe PJD préconise de plafonner les dons à 2.000 dirhams par an, qu’ils soient destinés aux professionnels de santé, aux associations de malades ou aux médias généralistes ou spécialisés. Ces dons devront être déclarés auprès du secrétariat général du gouvernement après avis de l’ordre professionnel concerné, afin que l’information soit publique et consultable par tout le monde.
En cas de non-déclaration ou de non-respect du plafond, les sanctions iront de 50.000 à 100.000 dirhams d’amende pour les personnes morales. Elles pourront également être privées de soumissionner aux marchés publics pour 1 an ou de pratiquer une activité commerciale, professionnelle ou associative.
Pour les personnes physiques, une amende représentant l’équivalent de 5 à 10 fois la valeur du don est prévue. Et en cas de récidive dans un délai de 5 ans, la sanction sera doublée.
Pour ce qui est des formations continues, une déclaration de non-conflit d’intérêts devra être remplie et déposée en amont par les professionnels de santé.
La proposition de loi pourrait être examinée en commission des secteurs sociaux de la Chambre des représentants d’ici avril 2018, à l’ouverture de la prochaine session parlementaire.
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