Le très attendu rapport du Conseil supérieur de l’enseignement, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS), dont nous vous livrons les premières conclusions en exclusivité, dresse d’emblée un constat sans concession: l’école marocaine est l’épicentre des inégalités et disparités sociales. Pis, elle les aggrave.
L’institution dirigée par Omar Azziman pointe les tares du modèle éducatif marocain dans ce document, long de 54 pages, intitulé « Une école de la justice sociale, une contribution à la réflexion autour du modèle de développement« .
Dès les premières pages du rapport, le Conseil atteste que « les carences claires dans le domaine du développement humain engendrent des déficits dans l’éducation ». Il estime que qualifiant la mise en application de la stratégie 2015-2030 pour la mise à niveau de l’éducation nationale est « hésitante » , deux ans après sa conception. Le CSEFRS tire la sonnette d’alarme. « La crise de l’éducation est une crise structurelle et morale, car elle menace l’avenir des générations montantes et le destin du pays« , lit-on.
Pour l’institution, cette crise se manifeste de plusieurs manières dont le manque d’acquis chez les élèves, la non-compatibilité de ces acquis avec les besoins actuels et futurs du pays, l’acculturation quasi généralisée, la nature des valeurs apprises à l’école, l’absence d’égalité ou encore l’approfondissement des écarts.
Les disparités sociales déterminent la réussite scolaire
« Le déficit éducatif est aggravé par les disparités sociales produites et consacrées par l’école à tous les niveaux« , indique le rapport, ajoutant que « les irrégularités de la gouvernance et la résistance du système à tout renouvellement transforment toute volonté de changement en réformes incomplètes« .
Si le principe de mérite est la base de tout système d’éducation, le CSERFS relève que les disparités observées au niveau de la réussite scolaire en démontrent les limites, révélant que « l’origine sociale est le facteur principal« .
Selon les chiffres du Programme national d’évaluation des acquis (PNEA) en 2016 cités par le rapport, « l’influence sociale (80%) est largement plus déterminante que l’influence scolaire (20%) ». Le CSEFRS note ainsi que le concept de mérite personnel conduit à l’exclusion massive des élèves, « particulièrement en raison des retards accusés par la généralisation de l’enseignement obligatoire« .
Le Conseil rappelle que « les étudiants possédant un ordinateur et internet à domicile ont un taux de réussite en français et en mathématiques plus élevé (53%) que ceux qui en sont dépourvus (26%)« . De même, les élèves de 1ère Bac avec un parent titulaire du diplôme universitaire minimum obtiennent de meilleurs résultats (+64 pts en maths et +62 pts en sciences) que ceux ayant un parent qui ont seulement terminé le cycle du collège.
Ces disparités sont plus ou moins marquées en fonction du genre et du milieu géographique. Dans l’espace urbain, la moyenne des années de scolarisation des +15 ans s’élève à 7,13, contre 3,24 seulement dans le milieu rural, sachant que la moyenne nationale est de 5,64. Chez les hommes, cette moyenne est estimée à 6,52 contre 4,8 chez les femmes.
Les oppositions entre école privée et école publique, mais aussi entre écoles supérieures et facultés sont également pointées par le rapport. « Si l’école publique reste la plus prisée (84% pour le primaire et 91% pour le collège et le lycée), l’école privée reste le moyen d’assurer une éducation de qualité« , souligne le document.
Pour ce qui est de l’enseignement supérieur, les établissements à accès limité (écoles d’ingénieurs, grandes écoles…) attirent les élèves ayant les meilleures notes au baccalauréat, tandis que les établissements à accès ouvert (facultés…) accusent un taux d’abandon très élevé (64% des étudiants quittent l’établissement sans le moindre diplôme).
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