« Dans un esprit de transparence et de clarté, j’ai décidé de m’exprimer auprès de chacun d’entre vous aujourd’hui« , écrit Baldo Valverde, le président du directoire du Crédit du Maroc dans une lettre adressée à l’ensemble des collaborateurs et que nous avons pu consulter.
Assurant s’être occupé personnellement du dossier, il plaide l’erreur: « Je sais que vous avez été particulièrement affectés par un épisode malheureux lié à la prime d’ancienneté. Je comprends votre inquiétude légitime et tiens à vous déclarer qu’il ne s’agissait en aucun cas d’un acte intentionnel, mais d’une mauvaise affectation dans le traitement complexe des primes d’ancienneté« . Notre enquête avait pourtant révélé que les membres du directoire du Crédit du Maroc étaient informés du problème depuis 2015.
Baldo Valverde annonce la signature d’un protocole d’accord avec les responsables syndicaux portant sur 7 points aboutissant à une régularisation de l’assiette pour le calcul de la prime: « le complément de situation pour les employés/gradés et l’acompte de participation pour les cadres seront intégrés dans le salaire de base« .
Si le protocole d’accord prend effet au 1er janvier 2018, la situation sera régularisée pour les exercices 2016 et 2017, soit 2 ans qui correspondent au délai de prescription judiciaire. Courant janvier 2018, chaque employé devrait recevoir un courrier nominatif l’informant de sa situation personnelle.
Convention ou loi?
À ce problème propre au Crédit du Maroc s’ajoute un autre, qui pourrait impacter plus largement le secteur bancaire. Il existe deux barèmes fixant les primes d’ancienneté : celui de la convention collective du secteur bancaire de 1956 (signée par toutes les banques hormis la BCP), et celui du Code du travail de 2004.
Le premier, qui est moins avantageux pour les salariés, n’a pas été mis à jour suite à l’entrée en vigueur du Code du travail, et la règle légale est claire: la priorité est donnée à l’application des barèmes qui sont les plus avantageux pour les salariés.
Le Crédit du Maroc se basait sur le barème moins avantageux de 1956, et aucune mention n’est faite d’une régularisation par rapport au barème de la loi dans la lettre adressée aux collaborateurs.
Le jugement de la Cour d’appel dans l’affaire du lanceur d’alerte Reda El Ouadi se base sur le barème du Code du travail de 2004 pour recalculer sa prime, ce qui pourrait ouvrir la voie à des actions judiciaires des salariés de toutes les banques se basant sur le mauvais barème. Et les écarts entre les deux barèmes sont conséquents: de 2% entre 3 et 5 ans d’ancienneté, ils grimpent à 18,5% au-delà de 26 ans, toujours en défaveur de la convention.
Opération de com’ pour « tracer un chemin de la confiance«
Le président du directoire profite de l’annonce de la régularisation pour tenter de rebooster la confiance des salariés: « ensemble, nous allons relever un défi contre les éléments extérieurs dont le but est de mettre à mal notre maison, saper notre moral et en définitive casser notre outil de travail commun et nuire à l’image de notre banque. Ensemble, nous allons tracer un chemin où chacun d’entre nous retrouvera la confiance et la fierté d’appartenir à la grande famille Crédit du Maroc ».
Alors que le député Omar Hejira a saisi le gouvernement de ce scandale, demandant le respect du barème de la loi, des parlementaires de la seconde chambre pourraient à leur tour s’emparer de l’affaire.
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