Driss Azami El Idrissi: "S’il n’y a plus de liberté d’expression au sein du parti, le PJD n’existera plus"

Au congrès national du PJD (9 et 10 décembre), Driss Azami El Idrissi était le seul candidat à la succession de Benkirane à maintenir sa candidature face à Saad Eddine El Othmani. Le maire de Fès et ancien ministre du Budget revient dans cet entretien sur le scrutin, sur son poste de président du Conseil national ainsi que sur les défis auxquels le parti est confronté depuis plusieurs mois.

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Driss El Azami El Idrissi au Parlement. Crédit: Rachid Tniouni / TelQuel

Candidat au poste de secrétaire général du parti à la lampe face à Saad Eddine El Othmani, vous avez obtenu 48 % des voix, une différence de moins de cent voix. Est-ce dû à votre soutien à Abdelilah Benkirane ?

Je n’ai pas cette lecture. L’essentiel est que, malgré les difficultés et les turbulences traversées ces derniers mois, tout le monde ait pu s’exprimer de manière libre et que tous les congressistes aient pu voter en leur âme et conscience.

Le parti est-il renforcé depuis ce congrès ?

Il est difficile de répondre à cette question. Honnêtement, tout le monde craignait que l’ambiance au congrès soit mauvaise et que son déroulement en pâtisse. Il faut rendre hommage à Abdelilah Benkirane qui a joué un grand rôle en passant le témoin dans une période difficile et en faisant face à toutes les difficultés, et ce depuis son éviction de la tête de l’Exécutif jusqu’au congrès. Il a en quelque sorte amorti le choc et permis à tout le monde de s’exprimer.

On ne peut pas dire que les difficultés sont derrière nous, mais l’étape du congrès a été franchie – ce qui est très important. Maintenant, le gouvernement doit faire son travail, car nous avons pris des engagements avec les citoyens qu’il faut honorer. Il faut également mener un travail interne pour renforcer le dialogue et avoir une lecture commune du contexte politique pour que le parti puisse regagner en force.

Pendant le congrès, El Othmani a laissé entendre qu’il était prêt à démissionner s’il n’était pas élu à la tête du parti. Cela ne vous a-t-il pas fait envisager de retirer votre candidature?

Maintenir ma candidature était tout à fait normal. Dans le parti, il n’y a pas d’autocandidature. Une fois que les militants vous proposent et que vous atteignez le seuil, vous avez le droit de vous désister.

En ce qui me concerne, j’ai décidé de maintenir ma candidature, car il n’est pas normal qu’après neuf mois de débat houleux, durant lesquels de nombreuses opinions ont été exprimées, il y ait une seule candidature lors du Congrès. Nous sommes en démocratie. Maintenir ma candidature, c’était permettre aux congressistes de délibérer, de discuter, mais aussi de choisir.

Abdelali Hamieddine et Amina Maa El Ainine, qui étaient favorables à un troisième mandat de Benkirane, ont été écartés du secrétariat général du PJD. Certains évoquent des petits calculs qui n’illustrent pas cette démocratie interne dont se targue le parti…

Je n’ai pas de jugement à porter sur cela. Les statuts disent que c’est le secrétaire général qui choisit son secrétariat général. Il assume par conséquent la responsabilité de ses choix. C’est donc à lui de se justifier quant à la composition du secrétariat général.

Le secrétariat général a certes des compétences, mais celles du Conseil national, que je dirige, sont encore plus importantes et plus stratégiques, car d’un point de vue hiérarchique il se situe au deuxième rang après le Congrès national.

Au sein de cette instance, toutes les opinions peuvent s’exprimer et même influer sur les décisions. Je n’ai pas de crainte par rapport à la diversité des opinions au PJD. La liberté d’expression, je la lisais dans les statuts, dans les papiers, mais je l’ai aussi vécue lors des derniers mois. Les gens tiennent à s’exprimer et ils n’ont peur de personne au sein du parti, quel que soit son rang. S’il n’y a plus de liberté d’expression au sein du parti, le PJD n’existera plus.

En 2016, près de deux millions d’électeurs ont voté pour le PJD. Le parti est-il capable de tenir ses promesses dans une majorité où il ne contrôle pas des portefeuilles économiques importants?

C’est écrit noir sur blanc dans la déclaration finale du congrès: nous soutenons le gouvernement, mais nous le soutenons pour que ses engagements envers les citoyens soient honorés. Un gouvernement, ce n’est pas une question de portefeuilles économiques.

Le gouvernement c’est une équipe avec un chef, un agenda et un programme qui a été voté. Le chef du gouvernement a tous les atouts entre ses mains, c’est à lui de faire son travail, et nous sommes là pour le soutenir afin que ses engagements soient tenus. Parce que nous voulons avoir un bilan à défendre lors des prochaines élections.

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