Le but de l’amendement au projet de loi de finances 2018 (PLF 2018) introduit par le PJD , le RNI, l’UC, l’USFP, le PPS et l’Istiqlal est de « supprimer ce qui reste de subventions pour le sucre dont bénéficient les entreprises productrices de boisson dans le cadre de la Caisse de compensation« , d’après une note de présentation rédigée par les élus et que Telquel.ma a pu consulter.
Les six partis veulent « élever les taxes imposées aux boissons gazeuses et non gazeuses contenant des taux élevés de sucre, et les boissons contenant des édulcorants ». Dans le détail, l’amendement suggère de faire passer la taxe intérieure de consommation de 30 à 50 dirhams par hectolitre pour toute boisson sucrée contenant plus de 50 grammes de sucre par litre.
Pour les boissons contenant moins de 50 grammes de sucre par litre, la taxe intérieure de consommation serait de 40 dirhams par hectolitres contre 30 dirhams actuellement. Même si le PLF 2018 a été adopté à la première Chambre, les élus des six partis souhaitent faire adopter leur amendement lors du passage du texte à la Chambre des conseillers, le 20 novembre.
Lutter contre l’obésité et le diabète
Pour soutenir leur amendement, les auteurs évoquent les dangers que peuvent représenter les boissons sucrées à la fois pour la société, mais aussi l’économie nationale. La note de présentation cite notamment la dernière étude du Haut Commissariat au plan (HCP), réalisée en 2011, selon laquelle 10,3 millions d’adultes marocains, dont 63,1% de femmes, sont en situation d’obésité ou de préobésité. Le texte cite également un rapport de l’Organisation mondiale de la santé datant de 2016 selon lequel 14% des enfants sont obèses.
Le même rapport suggère une taxation sur les boissons sucrées, afin de « faire baisser la consommation de ces produits et de faire reculer le nombre de cas d’obésité, de diabète et d’autres maladies chroniques et coûteuses« .
La note mentionne aussi un rapport réalisé par le cabinet McKinsey en 2014 selon lequel le coût annuel des traitements contre l’obésité pour les finances publiques marocaines s’élève à 24 milliards de dirhams par an.
Selon les élus à l’initiative de l’amendement, l’obésité et le diabète contaminent aussi l’équilibre financier des caisses d’assurances et fragilisent la pérennité du système. Ils rendent déficitaire le bilan de l’assurance maladie obligatoire (AMO) dont les ressources augmentent de 10 %, alors que ses dépenses enregistrent une hausse de 17 %.
Les recettes obtenues grâce à ces taxes pourraient être investies en premier lieu dans la santé et notamment dans la lutte contre l’obésité et le diabète. Elles pourraient également encourager des activités sportives, en particulier pour les enfants. Elles permettront également de financer le secteur agricole et de subventionner les fruits « sains ».
Un combat de 18 ans
Ce nouvel amendement n’est qu’un épisode d’un long combat mené contre les subventions pour le sucre et entamé il y a 18 ans. En 1999, le gouvernement Youssoufi, sous la houlette d’Ahmed Lahlimi alors chargé des Affaires générales, décide de ne plus subventionner le sucre utilisé par les industries. Le produit était alors subventionné à hauteur de deux dirhams/kilogramme.
Six ans plus tard, en 2005, l’État décide de réinstaurer cette subvention pour les biscuitiers et confiseurs marocains suite à une crise traversée par ce secteur. En 2009, ce sont les fabricants de boissons gazeuses qui bénéficient à nouveau de cette subvention suite à une décision signée par les ministres de l’Industrie, des Affaires générales et des Finances respectivement dirigés à l’époque par Ahmed Reda Chami, Nizar Baraka et Salaheddine Mezouar.
La décision signée par les trois ministres autorisait une subvention à hauteur de 1 dirham par kilogramme de sucre représentant un coût de 70 millions de dirhams par an pour la Caisse de compensation.
L’histoire ne s’arrête pas là, puisqu’en 2010 le groupe USFP parvient à faire adopter un amendement au projet de loi 2011 pour faire augmenter la taxe intérieure de consommation pour les producteurs des boissons contenant du sucre. Alors fixée à 20 dirhams/hectolitre, cette taxe augmente à 30 dirhams/hectolitre après l’intervention du parti de la rose compensant ainsi le coût de la subvention accordée aux fabricants de boisson gazeuse.
Si les élus adoptent cet amendement, le Maroc suivrait les traces de pays comme la France, le Royaume-Uni ou encore le Mexique qui ont adopté des mesures similaires.
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