50 investisseurs venus des quatre coins du monde se sont retrouvés au Radisson Blu Hôtel à Marrakech pour rencontrer les sociétés cotées à la Bourse de Casablanca, par l’entremise de la banque d’affaires CFG. Ils sont anglais, américains, scandinaves, sud-africains, mauriciens, qataris, koweïtiens, singapouriens… Et pour bon nombre d’entre eux, c’était la première fois au Maroc. La participation a connu une hausse de 20 à 25% par rapport à l’année précédente, « synonyme du dynamisme de la place casablancaise » commente le management de CFG. Pour l’occasion, la banque d’affaires a organisé de main de maître un séjour tout en folklore marocain. Mais au-delà faste du Palais Namaskar dans lequel s’est tenu la soirée de Gala à grand renfort de tam-tam et de danseuse orientale, quel est l’intérêt de ce rendez-vous annuel et quelle impression le Maroc économique et financier a-t-il fait à ces habitués des marchés dits « frontières» ou pré-émergents ?
Un portefeuille de 600 millions de dollars au Maroc
Comme dans tout speed-dating, le rythme des rencontres est soutenu : chaque investisseur rencontre en moyenne 7 à 8 sociétés émettrices par jour (25 sociétés marocaines et 4 tunisiennes au total). Ces dernières, qui doivent pitcher leurs résultats et répondre aux questions précises des investisseurs venus faire leur shopping boursier, nous avouent, au bout du 2ème jour, être fatigués. Mais l’intérêt pour elles est de concentrer l’effort qu’elles auraient fourni en un an sur deux jours, et donc d’être plus efficace, nous précise Souad Benbachir, Directeur Général de CFG Bank. « Cela permet également à la firme cotée d’être challengée car elle est benchmarkée par rapport à ses concurrentes dans d’autres pays des marchés frontières », poursuit-t-elle.
Au total, ces investisseurs étrangers pèsent 5000 milliards de dollars dans le monde, dont 600 millions au Maroc. Ils correspondent donc à 1/3 des investisseurs étrangers au Maroc, qui totalisent 1,8 milliards de dollars. Qui sont ces riches financiers qui misent sur le Maroc ? Ceux-ci « aiment rester discrets« , nous répond-on à CFG. Cette année, pour la première fois, des investisseurs marocains ont été conviés. Ils s’agit d’OPCVM, de compagnies d’assurances et de fonds de pensions.
Sur quels critères les investisseurs choisissent leurs entreprises ? Un investisseur sud-africain nous confie préférer les entreprises au domaine bien identifié et sans risque d’instabilité des prix et être particulièrement friand de celles qui ont un produit connu et reconnu pour son image de marque, ce qui apporte une garantie supplémentaire de stabilité. « Par exemple, je préfère investir dans une bouteille de Coca que dans un litre d’essence », nous dit-il.
La place casablancaise, attractive mais chère
« Les investisseurs trouvent que le Maroc est un pays organisé, ils ont une impression de fluidité », confie la DG de CFG Bank. Une impression vérifiée auprès de plusieurs investisseurs anglo-saxons interrogés par nos soins. Loin de l’image des chameaux à la sortie de l’avion, auxquels certains s’attendaient.
« Cette perception est confirmée par la croissance bénéficiaire de nos entreprises cotées, qui est plus élevées que dans d’autres pays. Il y a également un sentiment de stabilité politique combiné à un foyer de croissance, ce qui est unique dans la région« , poursuit Souad Benbachir. Contrairement à d’autres pays de marchés frontières, comme l’Egypte ou le Nigéria, le Maroc ne connaît pas de problème de volatilité des devises, ce qui est rassurant pour les investisseurs.
Mais l’un d’entre eux, originaire d’Afrique du Sud où le marché affiche des prix plus bas, nous confie que le Maroc est cher pour lui. « C’est un placement sûr mais cher, il faut trouver les bonnes opportunités d’entreprises qui montent », estime-t-il, nous indiquant être également allé à Casablanca pour rencontrer certains émetteurs directement à leur siège. Pour ceux qui le souhaitaient, CFG avait également organisé des visites de sites industriels de certains émetteurs.
Mais si le PIB en croissance du Maroc attire les investisseurs, ceux-ci regrettent que tous les secteurs industriels ne soient pas représentés au niveau de la Bourse de Casablanca.
Encore du chemin vers un Casablanca « hub africain » ?
Directeur délégué de CFG Bank capital Markets, Bachir Tazi analyse le marché marocain comme étant « petit en terme de taille et de liquidité, mais pas en termes de best practices où il se situe au niveau des standards internationaux, et même en termes de technologie où il est très avancé« . Il estime que la conjoncture est très favorable et que tous les voyants sont au vert pour que la place de Casablanca prenne son envol et devienne un vrai hub financier africain. « Mais malheureusement, on n’y est pas encore. On pourra parler de hub le jour où on aura plusieurs entreprises tunisiennes, ivoiriennes, etc. Pour les entreprises africaines qui pourraient prétendre à une cotation à l’étranger mais sont trop petites pour aller à Londres ou New-York, c’est idéal de venir à Casablanca pour lever 200 millions de dirhams par exemple. Nous sommes frustrés de ne pas y arriver encore. Il y a de l’appétit mais la machine met du temps à tourner », confie Younes Benjelloun, DG de CFG.
A l’issue des deux jours de rencontres effrénées, quelles retombées concrètes ? Difficile à quantifier car personne ne souhaite afficher au grand jour les opérations conclues ou en cours. Les responsables de CFG nous diront seulement que 2 ou 3 émetteurs ont su se faire particulièrement remarquer des investisseurs. Mais une chose semble certaine : poussées par une conjoncture favorable, les retombées sont de plus en plus grandes d’année en année et l’événement prend de l’ampleur.
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