La Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) a organisé, du jeudi 14 au samedi 16 septembre à Casablanca, ses toutes premières Journées portes ouvertes. Un exercice de communication qui s’inscrit dans la volonté de l’institution de se rapprocher du citoyen. Dès le premier jour, l’affluence était au rendez-vous. Ambiance.
« Bonjour, où se trouve l’entrée, s’il-vous-plaît? » Un policier indique courtoisement la porte principale de la Foire internationale. Il est 11h15. Le salon vient à peine d’ouvrir, que les badauds se pressent déjà devant les portiques de sécurité.
L’allée centrale de l’enceinte fourmille d’officiers en uniforme de cérémonie, les doigts gantés de soie, la casquette impeccablement vissée sur la tête. Dans un coin, une femme frotte discrètement la veste de sa collègue. Pas question de laisser une tache de craie salir la respectabilité de l’institution.
Derrière les visiteurs montrant patte blanche pour accéder à la grande halle, une trentaine d’hommes armés fait soudain irruption. Ils portent baskets, pantalons noirs, t-shirts crème et gilets pare-balles estampillés « GRI » – Groupes de recherche et d’intervention, dont deux nouvelles unités ont été créées cette année à Fès et Salé.
Près des barrières qui bordent le gigantesque espace de démonstration, deux d’entre eux s’avancent, tantôt en faisant des saltos, tantôt en donnant des coups de pied dans le vide. Deux autres s’empoignent. Le premier menace le second avec un couteau. La lame ne tarde pas à voler, sous l’effet d’une violente prise de judo, terminée en clé de bras sur le sol bétonné.
La scène tout juste évacuée, six motardes de la police nationale entrent en piste. Elles s’immobilisent tous gyrophares allumés, près des caméras de télévision. L’une d’elles met pied à terre. Pendant vingt minutes, elle répond aux questions des innombrables journalistes, sous le contrôle très étroit d’une chargée de communication de l’administration centrale.
Les ronflements des moteurs laissent bientôt place aux tambours de la fanfare. En tête de cortège, un éclaireur lance un bâton qu’il rattrape toujours avec élégance. « C’est ça que j’aurais aimé faire!« , s’écrie Kamel. Le jeune licencié en techniques commerciales a déposé trois candidatures pour intégrer le prestigieux corps habillé. À chaque fois, son dossier a été ignoré. Motif : sa taille, inférieure au minimum masculin requis (1,73m).
Accompagné d’un ami, le garçon de 23 ans se dirige vers le chapiteau dressé juste en face. Au centre d’une carrière improvisée, un écuyer effectue des tours de manège debout, à cheval sur deux étalons galopant côte-à-côte. « On est très contents de voir ça au Maroc. Mais c’est vrai que ce n’est pas forcément ce qu’on attend de notre police« , commente Kamel, un brin sarcastique.
Une cavalière objecte que si ce genre de spectacle relève de leur devoir de représentation, l’essentiel de leurs missions consiste à assurer la sécurité aux abords des manifestations culturelles et sportives, ainsi qu’à intervenir dans les terrains difficiles d’accès pour les engins motorisés. Une école spécialisée a été créée pour eux au sein de l’Institut royal de police de Kénitra. Depuis son ouverture en 2002, elle a vu défiler plus de 400 élèves.
À l’intérieur de la Foire, le stand de la brigade équestre concentre l’attention des curieux, qui n’hésitent pas à prendre des selfies avec les répliques grandeur nature des chevaux. Un peu plus loin, l’atelier portrait-robot lui fait de la concurrence. Diplômés des Beaux-Arts, les artistes-policiers expliquent aux enfants leurs techniques de dessin à main levée, qui leur permettent de mieux retranscrire les expressions faciales des criminels décrits par les témoins.
Venu avec une classe de 6e du collège privé Rahmouni Potentiel, Jospin Yangoulma apprécie la démarche de la DGSN. « Dans un contexte de lutte anti-terroriste, c’est important que les enfants sachent comment réagir s’ils identifient quelque chose de suspect« , développe le professeur de français. Il n’a pas achevé sa phrase que ses élèves se mettent à courir vers la sortie. Sur les écrans géants, retransmettant en direct les images de la caméra-grue du plateau, ils ont repéré un nouveau déploiement des Brigades régionales d’intervention (BRI).
Cette fois-ci, c’est un grand car bleu qui s’est arrêté au milieu de la plateforme. Deux braqueurs montent à bord. Presque aussitôt, les 4×4 d’intervention déboulent en trombe. Leurs dérapages dégagent une forte odeur de gomme et d’essence, qui flottera un bon moment dans l’air.
Les commandos encerclent le véhicule, tandis que les tireurs d’élite se positionnent aux quatre coins de la salle. Sur une musique de film, deux agents cagoulés descendent en rappel du plafond. « Là, c’est tout de même un peu trop!« , glose un vieux monsieur. « La théorie est nettement plus facile que la pratique. Quand ça arrive réellement, il y a toujours des paramètres qu’on ne maîtrise pas« , poursuit le sage.
Les faux assaillants sont rapidement neutralisés, sous les youyous du public. En attendant que les exercices pratiques reprennent, les parents emmènent leurs progénitures voir les robots et tout l’attirail des démineurs. « Je ne savais pas que la police marocaine disposait de tous ces moyens« , s’émerveille Yacine. Gendre et beau-frère de policiers, ce MRE de Belgique photographie son fils devant la combinaison verte de 41kg, dont les plaques d’acier peuvent amortir le choc de 500 grammes d’explosifs. « Il n’a que trois ans, mais il n’arrête pas de dire « police, police »!« , s’amuse le jeune papa.
Vers 17h, les officiels débarquent pour une inauguration en grande pompe, entourés d’une armada de gardes du corps. Au cœur de la cohue, quatre randonneurs déambulent innocemment, sacs sur le dos, chaussures montantes jusqu’aux chevilles. Ces touristes italiens s’apprêtaient à visiter la Mosquée Hassan II voisine, lorsqu’ils ont remarqué un mouvement de foule. « Je ne connais pas vraiment la portée de cet événement« , admet Loredana, la chef du groupe. « Mais si ça peut améliorer les rapports entre la population et sa police, alors c’est très bien!«
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