AKAA, la foire d'art parisienne dédiée aux œuvres contemporaines d'Afrique

Avec près de 40 galeries exposantes, les artistes du continent et de la diaspora pourront être admirés le temps d'un week-end (du 10 au 12 novembre) à Paris, ville culturelle incontestée.

Par

Patrick Willocq, The art of survival, Courtesy Vision Quest

« Also Known As Africa » (AKAA) est la première et seule foire parisienne d’art dédiée à l’art contemporain et au design africains. Dans la continuité de la première édition, l’évènement met en exergue la diversité des artistique du continent. Victoria Mann, fondatrice et directrice d’AKAA, nous explique que « l’ambition est de créer un endroit où tous les acteurs de la scène contemporaine d’Afrique, que ce soit du marché ou de l’institutionnel, puissent se retrouver, dialoguer, faire des rencontres et du business à Paris. À l’époque, c’était un vrai défi de monter cette foire à Paris alors que maintenant c’est une évidence que cette foire se retrouve dans une des capitales du monde de l’art« .

La première édition a pu réunir près de 15.000 visiteurs sur 3 jours et demi avec presque 5.000 personnes présentes lors du vernissage. La directrice affirme même que « Beaucoup d’exposants ont très bien vendu« . Ceci a contribué à faire de cette rencontre « un rendez-vous incontournable pour cette scène contemporaine d’Afrique » dès la première édition.

Pour cette édition, AKAA proposera 38 galeries exposantes dont deux galeries marocaines: la Loft Gallery à Casablanca et la Voice Gallery à Marrakech.

10% d’artistes marocains

Sur une sélection de plus de 140 artistes cette année, une quinzaine représentera le Maroc. Parmi eux, Moa Bennani, Hicham Benohoud, Nour Eddine El Ghomari, Mohamed Hamidi, Omar Mahfoudi, Amina Rezki et Abderrahim Yamou seront présentés par la Loft Gallery, qui présentera également Stella & Claudel.

Jacques-Antoine Gannat, chargé de développement de la galerie, explique que sa participation à la foire « s’inscrit dans un essor, un renouveau de l’intérêt pour la création contemporaine africaine avec beaucoup d’artistes qui sont de plus en plus exposés et de plus en plus collectionnés aussi bien en Afrique qu’à l’international« . Il ajoute que « le Maroc est une passerelle entre l’Afrique subsaharienne et l’Europe. Il était donc tout à fait logique de participer à cette foire« .

Les Marocains Mourabiti, Sara Ouhaddou et Houda Terjuman seront quant à eux présentés par la Voice Gallery qui présentera également Owanto et Eric Van Hove. Son fondateur et directeur, Rocco Orlacchio, nous indique que sa motivation était « de développer une nouvelle relation avec le marché parisien« .

Il explique également que « malgré de nombreuses participations à plusieurs foires internationales, c’est la première fois que la galerie a l’occasion de montrer ses artistes à Paris, d’autant plus qu’ils sont connectés avec la scène française« .

Il en profite également pour rappeler que « le Maroc aujourd’hui est prêt à laisser l’art s’exprimer en sortant des stéréotypes orientalistes encore trop présents » notant que « l’art doit être autant qu’il doit transmettre« .

Des galeries internationales réputées présenteront également des artistes marocains. La galerie Dominique Fiat, par exemple, présentera l’artiste en vogue Safaa Erruas et la très talentueuse Majida Khattari. La galerie Dupre & Dupre, quant à elle, présentera un solo show du célèbre Mohamed Lekleti. Hicham Lahlou, designer marocain, sera lui représenté par Arts Design Africa.

Pour Victoria Mann, « le Maroc est un pays très riche d’artistes qui trouve sa place sur une plateforme internationale et diverse. Alors qu’on est dans un monde où toutes les frontières sont en train de se durcir et de séparer les cultures les unes des autres, le monde de l’art montre qu’il y a moyen de les dissiper et d’aller chercher des échanges intraculturels ».

Autrement dit Afrique

Au-delà d’une foire qui ne montrerait que des artistes africains, AKAA s’engage à montrer aussi bien les artistes issus de la diaspora que les artistes qui revendiquent un lien, quel qu’il soit, avec ce continent. Que ce soit une expérience, un voyage, une passion, une rencontre, une collaboration ou une résidence, cette plateforme internationale vise à montrer des artistes de partout dans le monde qui ont envie de revendiquer ce lien envers l’Afrique.

AKAA va plus loin que l’art contemporain africain. On veut vraiment montrer une Afrique qui est plurielle, une Afrique qui est universelle et qui ne se cantonne pas aux frontières d’un continent. C’est même de là que vient notre titre « Also Known As Africa » qui veut dire « autrement dit Afrique ». C’est une manière pour nous de poser une seule question: quelle est votre Afrique ?

Victoria Mann, fondatrice et directrice d’AKAA

La scène contemporaine dite africaine n’a pas de frontières, elle est énergique, abondante, fougueuse et exubérante. Le marché de l’art d’Afrique est en pleine ébullition et cette année, plusieurs exhibitions internationales le mettaient à l’honneur à Rabat, Paris, Londres ou encore New York.

Pour Rocco Oriacchio, « il n’y a pas d’étiquette africaine« . Le galeriste insiste sur l’universalité de l’art « qui vient de n’importe où« précisant que « l’art de bonne qualité n’a pas d’origine« , et que malgré « une géographie qui les rapproche, les pays africains ont tous une culture qui leur est propre« .

L’expert insiste sur le fait que ce zoom mis sur la création africaine est un prétexte de montrer des artistes qui méritent de dépasser les frontières. L’objectif est d’AKAA est, en ce sens, de pérenniser l’intérêt pour les artistes en relation avec l’Afrique et de dépasser le simple effet de mode.

Autour de l’art

Cette année, un nouvel espace prendra forme durant la foire. Il s’agit d’AKAA Underground, né d’une « volonté de donner au grand public un espace qui leur appartient« , d’après Victoria Mann. Cet espace ambitionne de devenir un lieu de rencontre, pour discuter avec un artiste, pour faire une pause ou même prendre un café.

AKAA Underground est un café éphémère des arts et des rencontres. Une programmation assez riche, faite d’ateliers et de discussions plus intimes et conviviales que les discussions données dans l’auditorium dans le cadre des rencontres AKAA, est annoncée.

Il y aura aussi des performances et des signatures de livres, la librairie AKAA se trouvant au même endroit. L’espace sera investi par l’artiste sud-africaine Lady Skollie. D’après la fondatrice, c’est un espace « qui va avoir du succès, qui a pour vocation de créer une communauté AKAA et qui est évidemment pour le public« .

Cette année, les rencontres AKAA se forment autour du thème de « la guérison ». Comme lors de l’édition précédente, conversations, projections de films et représentations artistiques donneront au public l’occasion de rencontrer des artistes, des conservateurs et d’autres amateurs d’art.

C’est Salimata Diop, jeune curatrice franco-sénégalaise vivant à Londres et directrice de la programmation culturelle d’AKAA qui animera ces discussions en interrogeant les artistes qui utilisent leur processus créatif comme un moyen d’exorcisme par rapport à une mémoire qui est collective ou individuelle. Comme chaque année, elle construit son programme de conférences et de tables rondes autour d’une thématique, et invite les artistes et autres acteurs culturels à y débattre.

À l’instar de Rachid Koraichi, artiste algérien qui a investi l’entrée de la foire avec une oeuvre monumentale, cette année Bili Bidjocka, artiste camerounais, présentera une de ses oeuvres gigantesques.

D’après Simon Njami, commissaire d’exposition, essayiste, critique d’art camerounais, et membre du comité de sélection de la foire, « l’espace créé par Bili Bidjocka est indubitablement imprégné d’une dimension sacrée. Son installation nous invite à retrouver un état de pureté« .

Il indique également que « toute l’installation nous invite à la méditation et à l’introspection, à une cérémonie profane de la rémission et la guérison où toute la douleur du monde peut être emportée, tant que nous sommes réceptifs et ouverts […] C’est une ode à la paix – pas comme une intention naïve de refaire le monde, mais, plus ambitieusement, comme un désir de nous changer« .

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