Pour un collectif d’experts comptables, la loi 127-12 sonnait comme une « destruction de la profession« . Ces derniers ont affiché leur mécontentement lors d’une manifestation le 13 juin devant le ministère de l’Économie et des Finances. Ils comptent à nouveau donner de la voix le 15 juillet pour dénoncer le texte de loi régulant leur profession.
Alors que ce texte datant d’août 2015 les écarte de l’agrégation, les comptables indépendants se mobilisent pour amender les critères leur permettant d’accéder à l’Organisation professionnelle des comptables agréés du Maroc (OPCA).
Leur action s’est d’ailleurs intensifiée à l’approche de la publication de la liste des comptables agréés ou indépendants autorisés à exercer, qui sera dévoilée « d’ici quelques jours » par le ministère des Finances selon Mohamed Zrirate, président de l’Organisation syndicale des professionnels de la comptabilité au Maroc (OSPCM).
Deux ans de mobilisation
La lutte commence en 2015, lorsque le ministère de l’Économie et des Finances pousse à réglementer la profession des comptables. « Le gouvernement voulait aller vite pour s’aligner enfin sur les normes internationales« , explique Mohamed Zrirate, président de l’OSPCM. La loi du 20 août 2015 qui réglemente l’activité et la profession des comptables dans le royaume est alors votée.
Problème: entre 2.200 et 2.400 comptables indépendants ne répondent pas aux critères établis. Ils se retrouvent sans aucune agrégation et sans la possibilité d’intégrer la structure ordinale, l’OPCA, qui compte désormais 1.851 membres. Parmi les critères exigés, les candidats doivent notamment être titulaires d’au moins une licence en économie obtenue dans une université publique, et justifier de cinq ans d’expérience.
En deux ans, les comptables indépendants ont réussi à amender plusieurs articles de la loi. « Nous avons aussi réussi à obtenir des sièges au Conseil national, duquel nous étions pourtant exclus et nous avons prolongé le délai de dépôt de dossier de 12 à 24 mois« , explique Mohamed Zrirate.
La lutte continue
« Nous demandons un amendement de la loi afin que toute personne inscrite sur le tableau fiscal professionnel avant la date de la publication de la loi de 2015 puisse être comptable agréé« , nous explique Redouane Sobai El Idrissi, président de l’Association marocaine des comptables de la région Casablanca-Settat, opposé à l’effet rétroactif de la loi 127-12. Il n’est toutefois pas opposé à l’organisation de la profession, précise-t-il.
La coalition des comptables indépendants refuse aussi l’examen, qui permet aux comptables indépendants d’obtenir l’agrégation au bout de 10 ans. « Nous souhaitons l’amendement de l’article 103. Nous sommes déjà comptables, nous disposons des patentes pour exercer notre métier », continue Redouane Sobai El Idrissi.
De son côté, Issam El Maguiri, président de l’ordre des experts-comptables, soutient qu’il faut « un minimum de compétences et de formation« . « L’examen est une nécessité pour tirer la profession vers le haut« , explique-t-il.
Mohamadi El Yacoubi, président de l’OPCA qui soutient les indépendants, propose un amendement pour que ces derniers suivent plutôt une formation continue, au lieu de passer l’examen au bout de 10 ans.
Selon lui, ces comptables ont déjà leur portefeuille de clientèle dont ils assurent la comptabilité et la gestion des revenus fiscaux. « Mais ces professionnels ne peuvent pas rester comme des électrons libres, sans structure ordinale. Il faut trouver un moyen de les intégrer », explique-t-il alors que l’OPCA agit pour assainir une profession qui était anarchique jusqu’à 2015.
« Une fois porteurs de l’agrément, ils auront à respecter le règlement intérieur et le code de déontologie et des devoirs professionnels, et bénéficieront des mêmes droits et obligations que les autres professionnels des chiffres« , assure fermement le président de l’OPCA.
En attente d’une réaction du ministère
La coalition des comptables indépendants a proposé plusieurs amendements aux partis politiques afin qu’ils soient déposés au parlement. « Nous sommes allés voir Abdelkrim Choukri du PAM, Driss Lachgar de l’USFP, Hakima Fasly, ex-responsable de la commission des finances du parlement et un parlementaire du PJD« , nous confie Redouane Sobai El Idrissi. « Nous avons aussi déposé un dossier au ministère des Finances pour montrer les défaillances de la loi », renchérit Zrirate qui affirme que des « réactions positives pour changer la loi ont été obtenues au niveau du ministère et des partis contactés ». Affaire à suivre.
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