En se rapprochant de l’Angola, le Maroc veut confirmer sa percée en Afrique australe

Les deux pays ont signé un accord relatif à la coordination de leurs efforts politiques ce lundi 19 juin à Rabat.

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Nasser Bourita et le ministre des Relations extérieures angolais, Tete Antonio, en 2017 Crédit: Rachid Tniouni / TelQuel

« Pour la première fois en l’espace de 20 ans, un ministre des Affaires étrangères angolais est reçu par le Maroc« , se réjouissait Nasser Bourita, à l’issue de sa rencontre avec son homologue angolais Georges Chikoti ce lundi 19 juin à Rabat.

La rencontre a été marquée par la signature d’un accord relatif à la concertation politique entre les deux pays. Cette rencontre, organisée à l’initiative du Maroc, se tient au lendemain de la rencontre de Georges Chikoti avec le ministre des Affaires étrangères de la RASD.

Inimaginable il y a quelque temps, cet enchaînement est révélateur de la nouvelle politique africaine du Maroc impulsée par le roi Mohammed VI, selon Nasser Bourita.  » Il y a des moments où l’on s’est tourné le dos pendant des années. Cette visite s’inscrit dans une volonté d’ouvrir une nouvelle page dans les relations bilatérales. Nous voulons des relations bilatérales fortes. Cette visite s’inscrit dans l’orientation de Sa Majesté le roi pour que le Maroc s’ouvre sur de nouvelles régions en Afrique particulièrement en Afrique australe« , a souligné le chef de la diplomatie marocaine.

Témoignage de cette volonté de s’ouvrir vers cette région que l’on dit « acquise aux  adversaires » du Maroc, le déplacement du roi en Tanzanie et la réception par Nasser Bourita des ministres des Affaires étrangères de la Zambie, du Lesotho ainsi que du Swaziland. « Il n’y a pas de zone infranchissable. Le Maroc tend la main à tous les pays africains pour partager, expliquer et construire un avenir en commun« , affirme le ministre marocain.

Des pays avec lesquels le Maroc souhaite développer une relation « pragmatique« , affirme Nasser Bourita. Dans le cas de la relation entre le royaume et l’Angola, le ministre des Affaires étrangères évoque notamment une coopération dans les domaines comme le tourisme, l’agriculture ainsi que la formation professionnelle. Du côté angolais, le Maroc constitue un partenaire dans le cadre de la « politique de diversification » menée par ce pays qui ne veut plus dépendre des cours du pétrole.

Une coopération qui ne sera pas impactée par les « questions qui ont séparé » les deux pays pendant « plusieurs années« . Une référence à peine voilée au différend du Sahara qui a également été discuté lors de la rencontre entre le chef de la diplomatie angolaise et celui de la RASD. A l’issue de celle-ci, George Chikoti avait affirmé que l’UA resterait le principal acteur, aux côtés de  l’ONU, à trouver une solution à la question du Sahara. Un avis que ne partage pas Nasser Bourita qui a réaffirmé que la résolution de ce « différend régional » est « entre les mains des Nations Unies« .

Le ministre marocain espère néanmoins que l’accord signé entre les deux pays permettra de coordonner leurs efforts à « Rabat, Luanda, Genève, New York et Addis-Abeba« . Nasser Bourita souhaite que Luanda puisse parvenir à coordonner ses efforts pour la résolution du conflit du Sahara avec le Maroc, ou du moins adopter une position de « neutralité » dans ce conflit.

Mettre fin aux divisions

Interrogé par Telquel.ma sur l’application de cet accord lors du prochain sommet de l’UA, le ministre des Affaires étrangères angolais a déclaré: « Sur le suivi de la question du Sahara, si nous avions adopté une certaine position, c’est parce que le Maroc était parti et il n’y avait pas d’interlocuteur. Aujourd’hui le Maroc est revenu et nous avons un interlocuteur. Cela nous permettra de parler directement au Maroc en termes politiques lors du prochain sommet de l’Union africaine. Mais le thème central du prochain sommet de l’UA est la jeunesse et nous n’avons pas de différence à ce sujet« .

De son côté, Nasser Bourita a affirmé que cet accord de concertation est de « bon augure à la veille du sommet de l’Union africaine. C’est le premier sommet auquel le Maroc participera en tant que membre. Le Maroc entend participer à tous les points de l’agenda, et l’accord de concertation politique avec l’Angola nous permet d’échanger sur la réforme de cette Union africaine et d’éviter la logique de sous-région [et] d’adopter une logique plus continentale« .  Pour le ministre des Affaires étrangères, les deux pays s’inscrivent dans la même logique, car l’Angola est membre de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), tandis que le Maroc est membre de l’UMA, et « entend adhérer » à la CEDEAO.

Reste désormais à savoir si le royaume  récoltera les fruits de sa politique « pragmatique » lors du prochain sommet de l’UA qui se tiendra au mois de juillet prochain à Addis-Abeba.

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