Le Hirak "financé par le Polisario"? Le rédacteur en chef d'Assabah s'explique, la défense veut porter plainte

Dans son édition du 5 juin, le journal Assabah avance que les militants du Hirak ont "perçu des financements du Polisario". Le rédacteur en chef du quotidien assure que ces lourdes accusations "sont vraies" et que "des choses plus graves encore" seront révélées dans les prochains jours.

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La Une du 5 juin du journal Assabah. © DR

La Une du journal Assabah du 5 juin a fait le tour de la toile ce matin. Et pour cause, le journal arabophone accuse certains militants du Hirak d’avoir « perçu de l’argent du Polisario ». Une assertion grave. Le journal ne publie pas ses preuves et ne cite pas de source. Alors que l’enquête suit son cours, Assabah explique que « l’un des accusés, qui est incarcéré en ce moment à Oukacha, a perçu des financements provenant du Polisario, sous prétexte de destin commun«  entre les régions du Sahara et du Rif, « toutes les deux anciennes colonies espagnoles« .

La même source ajoute que « plusieurs rencontres entre un responsable du Polisario et un des chefs de file du mouvement de protestation arrêté ont été constatées« . Toujours d’après Assabah, « une liste de personnalités vivant à l’étranger a financé les accusés afin de mener des activités de propagande pour ébranler l’unité territoriale. Une aide logistique a été donnée lors des manifestations à travers des drapeaux et des téléphones« . Le quotidien nuance toutefois ses propos, en faisant le distinguo entre des accusés « qui ont cherché à porter atteinte à la stabilité de l’Etat » et d’autres qui ont été « exploités, attirés par les slogans d’amélioration de la situation » socioéconomique du Rif.

Sur quoi s’est reposé Assabah pour émettre des accusations aussi lourdes, passibles de la peine de mort selon le Code pénal? Contacté par telquel.ma, Khalid El Horri, rédacteur en chef d’Assabah défend la démarche de son journal. « Avant la publication du papier, je n’ai même pas parlé avec le journaliste qui l’a écrit. Je ne lui ai pas non plus demandé de me divulguer ses sources. Je suis dans un rapport de confiance avec mes journalistes« , nous déclare-t-il. « Je ne peux pas violer le secret professionnel, mais je vous assure que dans quelques jours vous allez voir que les informations que nous avons publiées vont fuiter« , poursuit-il, insistant sur la « véracité » des accusations relayées par sa publication. Il promet au passage des révélations « plus graves dans les jours qui viennent« .

Pour rappel, vingt personnes ont été présentées le 3 juin devant le procureur du roi de la cour d’appel de Casablanca. Certains prévenus sont poursuivis pour « atteinte à la sécurité de l’Etat « , selon un communiqué du procureur du roi daté du 4 juin.

Le parquet a demandé une enquête sur la présumée implication des accusés dans « des crimes d’incendie, homicide volontaire, d’atteinte à la sûreté de l’État, perception de financement pour des activités de propagande, ébranlement de l’allégeance des citoyens à l’Etat marocain et aux institutions du peuple marocain« .

Après les interrogatoires, une personne a été relâchée sur ordre du juge d’instruction, tandis que les 19 autres ont été transférés à la prison d’Oukacha à Casablanca. La défense des détenus du Hirak assure pour sa part que les activistes ne faisaient que « manifester contre la marginalisation et l’exclusion » d’après Me Abdessadek Elbouchattaoui.

Mise à jour: le site d’information Ledesk.ma a contacté Me Abdessamad Elbouchtaoui, un des avocats de la défense, qui annonce qu’il compte porter plainte contre ce qu’il considère comme « une pathétique tentative de manipulation de l’opinion publique ». Pour ce dernier, « le hirak n’a jamais eu, ni de près, ni de loin de contacts avec le Polisario et encore moins des projets communs (…) il a toujours défendu l’unité nationale et territoriale du pays de manière transparente et affirmée », estime-t-il, cité par Ledesk.ma. 

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