Mourad Elajouti, un avocat stagiaire du barreau de Casablanca, relate dans un post Facebook supprimé depuis, une altercation avec le ministre de la Justice, Mustapha Ramid. Tout part d’une boutade sur le statut actuel du chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, que le ministre de la Justice a moyennement appréciée. L’affaire a très vite été reprise par plusieurs médias, et dénoncée comme une atteinte à la liberté d’expression.
L’histoire remonte au 17 février à Casablanca. À la sortie d’une conférence organisée par l’Association marocaine des juges et le ministère de la Justice à la Maison d’avocat de Casablanca, « Mustapha Ramid a engagé une discussion avec des jeunes, des responsables et des membres du corps judiciaire« , raconte Mourad Elajouti. « Je lui ai posé une question pour savoir comment on peut qualifier la situation actuelle du chef du gouvernement par rapport au Code du travail, si on considère le blocage actuel comme un cas de force majeure pouvant conduire à la résiliation du contrat de travail« , pouvait-on lire sur son post. Mais, poursuit-il, « j’ai pris soin de préciser juste après que ma question n’était pas sérieuse et qu’elle avait pour but de détendre l’atmosphère ».
Une précision qui n’a rien changé, puisqu’elle a provoqué la colère du ministre. « Il m’a dit que je suis malpoli, que je ne suis pas courtois et que j’ai besoin d’être rééduqué« , le jeune avocat. Mustapha Ramid a, selon lui, demandé ensuite son nom. « Je lui ai donné mon nom et j’ ai précisé que je suis avocat stagiaire au barreau de Casablanca. Il m’a rétorqué que je devrais d’abord finir mon stage avant de commencer à prendre la parole« , pouvait-on encore lire dans le post.
« Je respecte et valorise le travail du ministre »
Face à la situation, les membres du corps judiciaire, qui ont assisté à la scène, ont demandé à Mourad Elajouti de présenter ses excuses au ministre. « Je lui ai présenté mes excuses à deux reprises, mais il ne les a pas acceptées ajoutant qu’il savait ce qu’il ferait de mon cas« , indique-t-il dans sa communication.
Mourad Elajouti, qui maintient que sa question « n’avait rien d’offensant« , se dit « vexé par la réaction et les propos du ministre tenus devant des responsables judiciaires qu’il côtoie tous les jours« . « Pour un ministre de la Justice et de Liberté, on se pose des questions sur sa façon de se comporter avec les citoyens sur des sujets politiques. Il use de son statut dans la fonction publique pour menacer ceux qui le contredisent« , continue l’intéressé.
Contacté par Tequel.ma pour plus de détails, l’avocat stagiaire n’a pas souhaité faire de commentaires faisant valoir son obligation de « réserve pour toute déclaration à la presse sauf après avis du bâtonnier« .
Il a toutefois posté une nouvelle publication sur son compte Facebook où il s' »excuse« dans le cas où son précédent statut, « publié de bonne foi« , aurait « porté atteinte au ministre« . « Je n’ai aucune animosité politique. Je respecte et valorise le travail du ministre à la tête de son département« , ajoute-t-il , remerciant au passage ses collègues « pour leur soutien« .
« C’est au bâtonnier de prendre les mesures »
De son côté, Mustapha Ramid, joint par Telquel.ma, explique qu’il « prenait des photos » à la sortie de la conférence lorsqu’il a entendu quelqu’un lui « parler de loin, d’une manière sarcastique » sans pouvoir distinguer ses propos, nous assure-t-il. « Cela a attiré mon attention. Je me suis renseigné, et on m’a dit que c’était un avocat stagiaire. Je lui ai demandé son nom, ce qu’il m’a donné« , poursuit Ramid. « Il n’a pas le droit de me parler sur ce ton, et ce n’est pas une façon convenable de s’adresser à quelqu’un« , assure le ministre de la Justice.
Ramid confirme par ailleurs avoir refusé les excuses du jeune stagiaire, mais réfute l’idée de vouloir prendre des sanctions à son encontre, contrairement à ce qui a été relayé dans la presse. Il explique qu’il va en revanche en référer au bâtonnier « pour qu’il lui apprenne le respect de ses confrères aînés« . « Je ne peux pas demander de sanctions disciplinaires, c’est au bâtonnier de prendre les mesures contre cet avocat. Je n’ai pas ces prérogatives. Il faut rappeler à ce garçon que les manières professionnelles n’acceptent pas ce genre de comportements qui ne sont pas convenables », conclut le ministre de la Justice.
Pour qu’une mesure disciplinaire soit prise à l’encontre de l’avocat stagiaire, elle doit être validée par les deux tiers des membres du barreau.
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