La commission mixte pour la défense des détenus islamistes a organisé le 19 janvier une conférence réunissant un parterre de prédicateurs et de défenseurs des droits de l’Homme proche des mouvements islamistes. L’interdiction de la fabrication et de la commercialisation de la burqa par les autorités locales de plusieurs villes du Royaume a été abordée à cette occasion.
Absence de justification légale
Pour l’heure, le ministère de l’Intérieur n’a toujours pas officiellement expliqué les motifs de cette décision. Une absence de communication qui selon Mohamed Haqiqi, membre de la Ligue internationale des droits et des libertés — relativement discrète jusque-là —, signifie l’absence de décision officielle émanant de Rabat. « Tout ce que nous savons pour le moment, c’est que le pacha de Taroudannt a envoyé une notification aux commerçants vendant des burqas », a-t-il déclaré. Il estime par ailleurs qu’il n’y a « aucune justification légale » à cette mesure qui constitue à ses yeux « un empiétement sur les prérogatives des institutions législatives et exécutives« .
Abdelmalek Zaâzaâ, avocat et ex-président du forum Karama des droits de l’Homme, a appelé quant à lui, au lancement d’une « bataille juridique avec le ministère de l’Intérieur, notamment en portant plainte contre le ministre de tutelle devant le tribunal administratif« . Une plainte qui aurait pour but de faire annuler « une décision illégale et anticonstitutionnelle« , car « le ministère de l’Intérieur n’a pas consulté le conseil supérieur des oulémas » avant d’appliquer cette directive.
Mohamed Zehari, membre de l’Istiqlal et secrétaire général de coalition internationale des droits de l’Homme, estime de son côté que la consigne transmise aux marchands par les représentants de l’Intérieur est un « abus injuste, car contraire aux traités internationaux relatifs aux droits de l’Homme« .
« Guerre à l’Islam »
Cette conférence a également été marquée par l’intervention de Mohamed Salmi, coordinateur de la commission des droits de l’homme d’Al Adl Wal Ihssane. Pour lui, le département de Mohamed Hassad a déclaré « la guerre à l’Islam ». Pour rappel, la Jamaâ avait réagi à l’intervention des représentants de l’Intérieur à travers un communiqué dans lequel elle « s’indigne » d’une mesure qui « cible des catégories du peuple marocain dans le choix d’un vêtement qui ne représente aucun danger pour la sécurité publique et ne heurte pas les bonnes mœurs« .
L’interdiction de la production et de la commercialisation de la burqa a également suscité des réactions dans les milieux progressistes. Contacté par Telquel.ma, le militant et intellectuel amazigh Ahmed Assid s’était réjoui de cette décision, affirmant que la burqa « n’est pas islamique. C’est une invention des wahhabites pour marginaliser la femme. On lui a imposé ce costume, mais on considère que c’est un choix ». L’ancienne ministre de la Femme, Nezha Sqalli, avait salué « une très bonne décision » tout en notant que « la mesure ne s’est pas attaquée aux femmes, mais aux circuits de vente de cet instrument d’oppression des femmes« .
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