La nécessité de ratifier le projet de loi relatif à l’Acte constitutif de l’Union africaine a forcé les acteurs politiques à accélérer la cadence en vue d’élire un président pour le parlement. Cette élection aura lieu à 16h, en présence des élus de la nation. Sauf que, l’absence de majorité et d’opposition déclarées pose un véritable casse-tête politico-juridique, et risque de déboucher sur une nouvelle crise.
Le seul point à l’ordre du jour de la séance de ce lundi est l’élection du président de l’assemblée. Au cours de la semaine, les députés devront s’atteler à élire les présidents des différentes commissions, notamment la commission des Affaires étrangères qui doit examiner le texte relatif à l’Union africaine avant que ce dernier ne soit voté en séance plénière.
La présidence du parlement promise à Lahbib Malki
Lahbib Malki, candidat de l’USFP, semble le mieux placé pour succéder à Rachid Talbi Alami selon les diverses sources contactées par Telquel. En effet, le député socialiste peut compter, outre le soutien de son parti, sur l’alliance RNI-UC-MP menée par Aziz Akhannouch. Cette alliance lui garantirait une majorité confortable pour son élection, d’autant que le PAM a annoncé le 16 janvier son soutien à sa candidature.
Cette hypothèse soulève des questions d’ordre juridique, car le règlement interne du parlement oblige chaque groupe parlementaire à déclarer s’il appartient à l’opposition ou à la majorité, et réserve la présidence de deux commissions à l’opposition. Si Malki est porté au perchoir par une coalition RNI-UC-MP-USFP avec le soutien du PAM, cette alliance constituerait-elle la majorité, plaçant le PJD dans l’opposition avec ses alliés du PPS et de l’Istiqlal ? C’est tout le casse-tête de ces élections.
Le constitutionnaliste Abderahim Manar Slimi explique que dans ce cas de figure, »on sera automatiquement dans un gouvernement de minorité composé du PJD, de l’Istiqlal et du PPS » une situation qui peut être déclinée en deux scénarios. « Soit le parlement n’accorde pas sa confiance au gouvernement minoritaire, ce qui débouchera immédiatement sur des élections anticipées. Soit il vote la confiance et la fait tomber ensuite par le vote d’une motion de censure, ce qui donnera également lieu à des élections anticipées« . C’est une situation où l’opposition sera majoritaire et fixera son agenda au gouvernement minoritaire, conclut Slimi.
La course contre la montre du PJD
Le PJD, qui a réuni son groupe parlementaire durant la matinée du 16 janvier, semble s’être résolu à ne pas présenter de candidat au perchoir. Cependant, « tous les scénarios sont encore possibles« , à en croire Saadeddine El Othmani, président du conseil national du parti de la lampe, qui s’exprimait en marge de la réunion de sa formation. Si la candidature de Lahbib Malki obtient l’aval du parlement avant la formation d’un gouvernement, la situation serait alors inédite, avec un parlement d’une couleur politique différente du gouvernement en gestation.
Abdelilah Benkirane pourrait alors être forcé de constituer un gouvernement minoritaire et dans l’incapacité d’obtenir le vote de confiance du parlement, à moins de revenir sur sa décision de ne pas s’allier à l’USFP et l’UC qui font partie du « pack » proposé par Akhannouch. Dans une tentative de débloquer la situation, Abdelilah Benkirane avait proposé au chef du RNI la présidence du parlement. Il s’est heurté au refus d’Akhannouch.
Le vote de la loi 01-17, et demain ?
Outre l’élection de Lahbib Malki, la seule chose dont l’issue semble certaine à l’issue de cette session parlementaire est le vote par les députés du projet de loi 01-17 relatif à l’acte constitutif de l’Union africaine. Les partis s’accordent en effet à dire que cette cause dépasse les intérêts partisans.
Une fois cette formalité remplie, la politique pourra reprendre son cours, et l’absence de majorité pour le futur gouvernement Benkirane risque de conduire à une reprise du blocage. Un scénario de sortie de crise évoqué dans la presse, et confirmé à Telquel par des sources proches du PJD, parle d’un gouvernement PJD-RNI-MP-UC, avec le soutien de l’USFP en dehors du gouvernement.
La constitution de 2011 n’apporte aucune réponse dans le cas où le gouvernement n’obtient pas la confiance du parlement: le roi passera-t-il le relais au chef du parti arrivé second, en l’occurrence le PAM? Chargerait-t-il un autre dirigeant du PJD de former le gouvernement, ou convoquera-t-il des élections anticipées ?
Quelle qu’en soit l’issue, le pays se retrouvera dans une situation inédite. Les prochains jours s’annoncent décisifs pour l’histoire constitutionnelle du Maroc, puisqu’ils éclaireront sur la suite à apporter si des situations semblables se présentent lors des prochaines législatures.
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