Dans un entretien accordé à L’Economiste, la patronne d’Inwi s’explique sur la mise en demeure adressée à Maroc Telecom, ainsi que la saisine de l’ANRT. Elle dénonce les pratiques anticoncurrentielles de l’opérateur historique.
La PDG du 3e opérateur du télécommunications revient sur les raisons qui ont poussé Inwi à adresser une mise en demeure à Maroc Telecom et à saisir l’Agence nationale de la réglementation des télécommunications (ANRT) dans un entretien accordé à L’Economiste, publié le 10 janvier.
Nadia Fassi Fihri dénonce les entraves imposées par Maroc Telecom (IAM) au dégroupage, alors que la fin du monopole de l’opérateur historique sur les lignes fixes et l’ADSL est actée. Pour la Présidente directrice générale d’Inwi, la mise en demeure adressée à IAM « dépasse le cadre d’un simple litige opposant deux opérateurs. Elle est déterminante pour l’avenir du secteur et pour le développement de l’économie numérique de notre pays. Après avoir été précurseur en matière de télécoms, le Maroc est aujourd’hui l’un des rares pays où l’opérateur historique détient encore 99% du marché du fixe et de l’ADSL« .
Selon Nadia Fassi Fihri « le consommateur marocain est privé de son droit de choisir librement son fournisseur d’accès, avec des répercussions regrettables sur la qualité de services. C’est une situation inacceptable. Les expériences internationales ont démontré qu’aucun opérateur ne peut développer, seul, un marché de cette taille« . Pour la patronne d’Inwi, l’arrivée de la concurrence dans le mobile a permis de développer ce secteur et d’arriver à plus de 130% de taux de pénétration au bénéfice des trois opérateurs et de tous leurs clients.
Le partage des infrastructures, une obligation
Nadia Fassi Fihri affirme à L’Economiste que le dégroupage n’est pas une option, mais une nécessité. Elle estime ainsi que dupliquer une infrastructure fixe et une boucle locale n’a aucun sens du point de vue économique, en plus d’être une hérésie en matière d’aménagement urbain (nouvelles tranchées, nouvelles prises dans les foyers…).
« Maroc Telecom, qui a opéré en situation de monopole pendant plusieurs années, dispose de cette infrastructure de cuivre [boucle locale]. D’ailleurs, en libéralisant le secteur, le législateur a ordonné à Maroc Telecom de partager, selon des conditions équitables, cette infrastructure avec d’autres opérations afin de leur permettre de proposer des offres de téléphonie et de haut débit fixe », explique la PDG d’Inwi.
Il faut dire aussi que le dégroupage évite de lourds investissements, mais il y a des redevances. Dans ce sens, le partage d’infrastructures évite les investissements non productifs. « Le dégroupage a un coût, notamment les reversements à l’opérateur historique en contrepartie de l’utilisation de cette infrastructure. Partout dans le monde, c’est d’ailleurs une source de revenus récurrente pour les opérateurs historiques. En plus de ces frais payés à Maroc Telecom, nous investissons lourdement pour raccorder nos clients à cette boucle locale et leur offrir un service de qualité« , tient-elle à préciser.
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Pratiques discriminatoires
Nadia Fassi Fihri demande à l’Autorité de régulation de constater les pratiques discriminatoires et anticoncurrentielles dont Inwi estime faire l’objet, notamment des délais plus longs pour le raccordement, des coûts plus élevés et une qualité de service moindre. « La réglementation est pourtant claire! L’opérateur historique est obligé de fournir aux opérateurs tiers un service identique à celui délivré à ses propres équipes internes. Nous demandons à l’ANRT de trouver les moyens opérationnels et coercitifs nécessaires pour astreindre Maroc Telecom à cesser ses pratiques et à permettre une ouverture effective du marché« , poursuit-elle.
Fin du monopole d’IAM ?
Quant au monopole de fait exercé par Maroc Telecom, Nadia Fassi Fihri explique que l’opérateur historique détient toujours 99,9% du marché. L’avertissement adressé par l’ANRT à Maroc Telecom en octobre 2016 vient, dans ce sens, sanctionner les entraves au dégroupage. Sans oublier que l’ensemble des pratiques internationales montrent que les acteurs ne se contentent pas de promesses et de bonnes intentions. « Le secteur a perdu plusieurs années de concurrence et d’opportunités de développement de l’économie numérique », conclut Fassi Fihri. De son côté, IAM qui s’est toujours défendu d’un quelconque abus de position dominante, réclame « un dégroupage équitable« .
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