Mohammed VI a prononcé un discours alarmiste sur la situation de l’administration publique. Présidant l’ouverture de la première session parlementaire de la nouvelle législature, le 14 octobre, le souverain a consacré l’essentiel de son allocution aux tares de l’administration publique. Il a ainsi critiqué le retard entrepris par les administrations en matière de décentralisation. « S’il fallait que tous les dossiers soient traités au niveau de l’Administration centrale à Rabat, quelle serait alors l’utilité de la décentralisation, de la régionalisation et de la déconcentration administrative que nous nous employons à consolider depuis les années 1980 du siècle dernier ? », s’est-il interrogé. « Je suis évidemment fier de traiter directement avec mon peuple et de régler ses problèmes simples. Je continuerai à le faire, toujours à son service. Mais est-ce que les citoyens me demanderaient d’intervenir si l’Administration faisait son devoir ? » a-t-il poursuivi, tout en déplorant : « Il est certain qu’ils y ont recours précisément parce qu’ils se trouvent face à des portes fermées ou parce que l’Administration fait preuve de négligence dans les prestations qu’elle leur fournit, ou encore pour se plaindre d’une injustice qu’ils ont subie ».
Critique royale des expropriations
Le souverain a également critiqué le manque d’efficacité du travail des administrations publiques, et le trop grand nombre de fonctionnaires qui y travaillent. « Les administrations et les services publics accusent de nombreuses carences relatives à la faible performance et à la qualité des prestations qu’ils fournissent aux citoyens. Ils pâtissent également de la pléthore des effectifs, du manque de compétence et de l’absence du sens de responsabilité chez de nombreux fonctionnaires », a-t-il déploré, tout en soulignant son archaïsme : « L’administration souffre essentiellement d’une culture ancienne chez la majorité des Marocains. » Comme exemple de l’injustice dont souffre les citoyens dans les administrations publiques, le roi a pointé du doigt les expropriations abusives : « De nombreux citoyens se plaignent des affaires d’expropriation, soit parce que l’Etat ne les a pas indemnisés pour leurs biens, soit parce que l’opération d’indemnisation traîne pendant de longues années au préjudice de leurs intérêts, ou encore parce que le montant de l’indemnisation est en deçà des prix de vente en vigueur, et bien d’autres raisons encore. L’expropriation doit être effectuée en cas d’extrême nécessité d’intérêt général et l’indemnisation doit se faire conformément aux tarifs en vigueur à la date d’exécution de ladite opération, avec une simplification des procédures d’obtention de ladite indemnisation.
Le statut du terrain exproprié ne devrait pas être modifié par son affectation à des usages commerciaux ou sa cession à des fins de spéculation immobilière », a-t-il martelé.
Plaidoyer en faveur du e-gov
Le monarque s’est également attaqué à l’inefficacité des guichets uniques, sensés faciliter les investissements. « Il est vrai que certains investisseurs, dans certains cas, soumettent des dossiers incomplets. Mais au lieu que le guichet leur vienne en aide en leur présentant une liste de solutions pour les motiver, on constate que les choses sont rendues encore plus compliquées pour eux, en les astreignant à une série de restrictions et de contraintes. Avec cette mentalité et la poursuite obstinée de tels comportements, le guichet unique restera vain et inutile », explicite-t-il. Le roi a également insisté sur la mise à niveau des fonctionnaires : « En effet, la situation actuelle nécessite de porter un intérêt particulier à la formation et la mise à niveau des fonctionnaires, qui forment le maillon essentiel dans la relation du citoyen avec l’Administration. Elle requiert aussi de leur offrir un environnement de travail convenable et de mettre en œuvre les dispositifs d’incitation, de reddition de comptes et de sanction. » Le roi s’est également attelé à la problématique de la numérisation de l’administration en soutenant sa vulgarisation : « l’utilisation des nouvelles technologies contribue à faciliter l’accès, dans les plus brefs délais, du citoyen aux prestations, sans qu’il soit nécessaire de se déplacer souvent à l’Administration et de s’y frotter, car c’est là la cause principale de l’extension du phénomène de corruption et du trafic d’influence. »
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