Nabila Mounib, secrétaire générale du Parti socialiste unifié (PSU), était l’invité du Grand oral des Anciens de Sciences Po le 22 septembre à la Bourse de Casablanca. Tête de la liste nationale des femmes sous les couleurs de la Fédération de la gauche démocratique (FGD), elle répondait aux questions de TelQuel et Akhbar Al Yaoum, partenaires de l’événement. En introduction, le président de l’Association des anciens élèves de Sciences Po au Maroc, Ismaël Hariki, n’a pas manqué de relever la cocasserie, pour une candidate avec un programme qu’il a qualifié « d’extrême gauche », de le présenter dans « le temple du libéralisme ». « Quelle preuve d’ouverture et de tolérance ! » s’est-il exclamé.
Sauf que Nabila Mounib soutient qu’il n’y a pas de contradiction avec sa vision. « Nous sommes face à un pouvoir supra-étatique, exercé par les institutions financières internationales et néolibérales. Le Maroc est soumis à ce système néolibéral et n’y échappera pas. Même des gouvernements de gauche dans le monde ne sont pas parvenus à protéger les acquis sociaux », signifie-t-elle. Son programme fera-t-il fuir les futurs investisseurs ? « Notre projet économique, c’est un projet pour créer une compétitivité acceptable et donner envie à des entrepreneurs d’investir au Maroc. On est fier de notre Maroc stable, mais cette stabilité demeure précaire. Pour la pérenniser, il faut mettre les bases de la redistribution sociale » énonce-t-elle. « La première réforme économique est une réforme politique. Il faut ériger les fondements de l’État de droit et sortir de l’antichambre de la démocratie. Est-ce bien cela qui fait fuir les investisseurs ? Je pense au contraire que c’est ce qu’ils veulent, parce que ça implique la confiance » défend-elle, se positionnant contre l’économie de rente et le néolibéralisme.
« Il ne suffit pas de dire que nous prônons le multipartisme pour dire que nous avons la démocratie » poursuit-elle. Sur le volet politique, Nabila Mounib a diagnostiqué une « bipolarité artificielle » entre le PAM et le PJD. Selon elle, le PJD n’est pas seulement conservateur, mais « réactionnaire ». « Ils instrumentalisent le religieux à des fins politiques. Ils ont pour ça un terreau propice, puisqu’on a détruit l’école publique et l’espace culturel ». En face, le PAM : « On veut bien qu’on nous parle de modernisme démocratique, mais qu’est-ce qu’ils proposent pour ça ? Rien, parce qu’ils sont sortis de nulle part, dans la lignée des partis créés de toutes pièces. Ils n’ont jamais été autonomes », vilipende-t-elle. « La modernité devrait commencer par moderniser la politique, donc instaurer l’État de droit, la séparation des pouvoirs, lutter contre la corruption, la rente, exiger la reddition des comptes » énumère-elle, concluant qu’« il n’y a pas de modernisme ».
Pour elle, la question de la réforme de la constitution demeure à l’ordre du jour : « Une constitution qui concentre tous les pouvoirs entre les mains du roi, ce n’est pas une démocratie. La démocratie, c’est le pouvoir du peuple par le peuple. » Sur son rapport avec la monarchie, Nabila Mounib juge la bey’a [allégeance, NDLR] « archaïque ». « Elle doit être imprégnée de respect et non d’esclavagisme et d’humiliation. La loi doit clairement définir les prérogatives de la monarchie » atteste-t-elle.
Sur la question de la place de la religion, elle parle de « de lobbies internationaux qui poussent l’intégration des salafistes dans le jeu politique ». Dans le même temps, sur la question précise de la candidature d’Hammad Kabbadj, elle ne pense pas que sa candidature eut été invalidée s’il s’était présenté sous les couleurs du PAM. « Je pense que c’est l’État qui a implanté l’islamisme pour combattre la gauche », conclut-elle.
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