Festival d'Essaouira: N3rdistan ou l'énergie vitale

La musique du groupe franco-marocain est indéfinissable mais bouillonne. Et ce n'est pas le public international qui s'est massé devant la scène de la plage qui s'en plaindra.

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Walid Benselim, chanteur de N3rdistan. Crédit : Yassine Toumi

De l’énergie et de l’hypnose. Walid Benselim, le chanteur du groupe se plante derrière son micro et tend son bras, couvert d’une étole verte, vers la foule, dos à l’océan Atlantique, qui borde la Corniche d’Essaouira. Incantations – voire transe -, rap, pop, rythmes planants ou rapides, le quatuor de musiciens ne se refuse rien, ce 14 mai, sur la scène de la plage du festival Gnaoua et musiques du monde d’Essaouira. Né en 2011, le groupe se compose des Casablancais Walid Benselim, au chant, et Widad Brocos, au chant et au clavier, mais aussi des Français Benjamin Cucchiara, au kora [instrument de musique à cordes de l’Afrique de l’Ouest, ndlr] et à la flûte peule et Cyril Canerie, à la batterie.

Si dans la presse, les références à la nature « engagée » de leurs textes ou de leur musique occupent souvent les premières lignes des articles qui leur sont consacrées, la définition les étouffent. « Mais c’est quoi un artiste désengagé ? » interroge du tac au tac Walid Benselim. Certainement pas l’un d’entre eux, ce soir. Après quelques morceaux, la jeune femme derrière le clavier, Widad Brocos, en robe ajustée grisée, bondit de son estrade pour accompagner Walid Benselim dans un rap électrique. « Toutes les musiques nous inspirent. Au Maroc, il y a la musique gnaoua, le melhoun et même le chaabi. Même si cela ne se ressent pas toujours, elles font partie de notre ADN musical », confie le jeune meneur. Et toutes les langues aussi.

Les petits frères et soeurs d’Hoba hoba spirit

Le darija se taille la part du lion dans leur répertoire. Saupoudré d’un peu d’anglais quand le leader de N3rdistan prend un haut-parleur pour demander « Show me what’s democracy looks like ! » [« Montre-moi à quoi ressemble la démocratie ! », en français, ndlr], et Widad Brocos de répondre : « That’s not what democracy looks like ! » [« Ce n’est pas ce à quoi la démocratie ressemble ! », en français, ndlr] dans une ambiance punk. Sans oublier l’arabe classique et les adaptations des textes des grands poètes arabes, tels Mahmoud Darwich ou Ahmed Matar. Une énergie et une linguistique qui n’est sans rappeler leurs grands frères, les Hoba hoba spirit.

« C’est un grand groupe, qui a une énergie de ouf sur scène. Ce qu’on partage avant tout, c’est l’amour pour la musique, pour le darija et l’arabe classique », s’enthousiasme le chanteur, touché par la comparaison. En backstage, à la fin du concert, Walid Benselim répond d’une voix nouvelle et douce à nos questions, l’air serein. Lui et ses musiciens ont tout donné. « Nous faisons de la musique pour le public et c’est la rencontre, que nous permet ce festival, qui nous porte », confie-t-il, pas refroidi pour un sou par le vent qui fouette son afro. « J’adore le vent, c’est plein d’énergie », glisse-t-il. Encore elle !

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