Finaliste, le lundi 14 mars, du prestigieux prix Marius Lavet, qui récompense le parcours d’ingénieurs, à la fois inventeurs et entrepreneurs, Rachid Yazami ne fait que confirmer son statut de chercheur jamais rassassié. Derrière cette carrière inspirante se cache le parcours d’un enfant de la médina de Fès, passionné de chimie.
« Là mon pote, tu es entré dans l’histoire », pense-t-il. Nous sommes en 2014, quelques jours seulement après avoir obtenu le Prix Draper, l’équivalent du Nobel. Rachid Yazami se souvient avoir pris soudain conscience du chemin parcouru en 40 ans de carrière.
Des fusées à la batterie
Avant de devenir le co-inventeur de la batterie Li-ion, qui équipe tous les smartphones, ordinateurs et objets nomades du monde, Yazami a développé depuis son enfance une passion indéfectible pour la science. « Très jeune déjà, j’étais passionné par la science et la technologie. Je dévorais les magazines scientifiques tels que Science et Vie ou Science et Avenir », nous raconte le chercheur franco-marocain.
Le petit Rachid Yazami apprend en observant. Son père, habitué à résoudre les conflits entre clients et vendeurs de lait, disposait d’un thermomètre et d’un densimètre. Très vite, il se rend compte que la densité du lait dépend de la température et de la teneur en eau. « C’était pour moi une initiation pratique à la physique des fluides », glisse-t-il. En se rendant régulièrement dans l’atelier de son grand-père maître zelligeur, Rachid découvre aussi les notions de géométrie dans l’espace, de périodicité et d’art graphique, par le biais de l’observation. « Cet environnement si riche, ainsi qu’une curiosité innée, ont certainement formé le socle du scientifique que je suis devenu. » A 11 ans, il effectue sa « transition intellectuelle de l’alchimie vers la science moderne », dit-il. Dans son petit laboratoire installé dans sa chambre, Rachid crée des fusées, remplit des ballons d’hydrogène et fabrique des avions en papier.
A l’affût des défis
Après avoir fréquenté les lycées Moulay Rachid et Moulay Driss à Fès, Rachid Yazami s’envole vers la France pour y poursuivre ses études. Il intègre ensuite le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) puis de prestigieuses universités pour y enseigner et mener ses recherches, notamment sur les batteries.
En accumulant les expériences, Rachid Yazami se fait progressivement un nom. Il avoue ressentir un sentiment de satisfaction à chaque projet abouti, tout en prenant soin d’évoquer le prochain challenge. « Quand j’ai développé les batteries à ion-fluor, à partir du brevet de base, on a déposé une douzaine de nouveaux brevets pour améliorer chaque aspect de cette batterie. Cela a pris une bonne dizaine d’années ». Pas de quoi le pousser à se reposer sur ses lauriers. « Thomas Edison a déposé 1093 brevets rien qu’aux USA. Avec les 114 brevets que le Bureau européen des brevets m’accorde, je me sens très humble devant ce grand inventeur ».
« Modeste » et « pointilleux » sont les termes choisis par ses amis d’enfance pour le décrire. Pour lui, chaque problème résolu « ouvre la porte à un autre problème. » Toujours à l’affût d’un nouveau défi, le chercheur serait-il un éternel insatisfait?
Aujourd’hui, l’université de Singapour lui offre un cadre idéal pour réaliser des projets ambitieux. Mais le natif de Fès n’oublie pas pour autant son pays d’origine. « Je ferai tout pour que le Maroc puisse bénéficier de mes recherches dans la mesure du possible. J’ai pas mal de projets au bled et j’espère que l’on en verra les fruits très bientôt », annonce-t-il. Il espère inspirer les jeunes pour qu’ils se disent: « Rachid Yazami l’a fait, je peux le faire aussi »
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