Christopher Ross « ne retournera jamais au Sahara ». C’est ce qu’a affirmé le ministre des Affaires étrangères, Salaheddine Mezouar, le 7 novembre, à l’agence de presse espagnole EFE. Si, côté marocain, ce n’est pas la première fois que le royaume hausse le ton à l’égard de l’envoyé personnel de Ban-Ki Moon pour le Sahara, les propos de Mezouar semblent entrer dans le cadre d’une plus large offensive menée par le Maroc contre les instances onusiennes s’occupant du dossier du Sahara.
Preuve en est le sit-in organisé devant les locaux de la Minurso au lendemain du discours de la Marche verte. Et ce n’est pas tout. Mohammed VI s’est déplacé en personne, à bord de sa berline, pour saluer les foules amassées devant les locaux de la mission onusienne. Tout cela, sans oublier le contenu du discours du 6 novembre, dans lequel le monarque a réitéré la position marocaine selon laquelle « l’autonomie élargie était le maximum que pouvait proposer le Maroc ». Alors, comment expliquer ce nouveau ton adopté par le royaume ?
Fait accompli
« C’est simple, le Maroc veut appliquer la politique du fait accompli », juge Taher Abouzaid, membre de la commission administrative de l’USFP. Ce dernier, originaire du Sahara, estime que le sit-in organisé devant le siège de la Minurso était une « erreur ». « Ce que ne comprennent pas ces jeunes, qui ont été envoyés manifester devant la mission, c’est que c’est Hassan II lui-même qui a admis l’idée du référendum d’autodétermination et que c’est encore lui qui a accordé à la Minurso le droit de s’installer à Laâyoune », explique le militant socialiste.
Mais alors quel message Mohammed VI voulait véhiculer en s’affichant aux côtés de ces manifestants ? « C’est celui de dire à la communauté internationale que le Maroc a tout donné, et qu’aujourd’hui il passe à la vitesse supérieure et investi des milliards de dirhams dans des territoires qui lui appartiennent », avance Abouzaid. Une politique du fait accompli qui intervient au moment même où le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki Moon a appelé « toutes les parties dans la région […] de tirer profit des efforts intensifs menés par (Christopher Ross) pour faciliter le lancement de vraies négociations dans les prochains mois ».
Un risque d’isolement ?
Mais alors cette escalade ne risque-t-elle pas de pousser le Maroc à l’isolement ? Pour l’instant, à en croire les spécialistes, le Maroc n’a pas encore franchi le Rubicon. « On pourra parler si le Maroc chasse la Minurso de Laayoune. Là, effectivement, le Maroc courra sérieusement un risque d’isolement », estime Abouzaid. « L’objectif de notre diplomatie est de rendre la vie difficile à Christopher Ross, et ainsi pousser Ban Ki Moon à changer d’envoyé personnel», estime le politologue El Hassan Boukantar, qui précise tout de même : « la mission de Christopher Ross entre dans le cadre d’une résolution onusienne. Le Maroc n’a pas intérêt à arrêter sa coopération avec lui ».
De son côté, l’ONU par la voix de son porte-parole Stephane Dujarric a déclaré, lundi 9 novembre, que Christopher Ross avait « tout le droit de visiter le Sahara occidental ». De quoi augurer de lendemains tendus entre le Maroc et les Nations unies.
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