Quelle est cette « cinquième saison » de la « météo métaphysique », celle qui clame « la vie ou la mort » ? Ce n’est pas la première fois que Abdellatif Laâbi aborde cette grave question dans ses poèmes. Ici, c’est avec sérénité qu’il imagine son absence et souhaite la bienvenue à ce « si cher inconnu ». Le poète en savoure les promesses d’étonnement et y projette les couleurs de ses amours et de ses rêves de liberté. « A supposer / une vie / que l’on créerait / librement / de A à Z ». Cet inconnu, il le peuplera de ses révoltes, du sentiment que « le règne de barbarie » / est éternel ». Il y emportera peu de son enfance si lointaine : « Tout ce que je peux dire / c’est que j’ai appartenu / à un monde disparu / et que je m’apprête / à disparaître avec lui ». Mais il n’y a rien d’amer dans ce recueil dont les deux parties, La saison manquante et Amour Jacaranda, se répondent et se font écho. L’amour, la mort, la liberté, la vie, tout procède du même combat, du même élan vital hostile à l’abattement et au tragique. Ce livre, délicatement mélancolique, rehaussé par les très belles encres du poète et peintre Claude Margat, n’est pas un adieu.
Amour Jacaranda projette dans l’infini cet amour « para siempre », avec ses joies, ses pudeurs, ses rires et ses audaces. Un demi-siècle d’épreuves partagées, de lettres échangées, de langues apprivoisées, de chansons. Restent les petits gestes quotidiens, les regards, les sourires, la lecture des « dernières nouvelles / du continent humain », et la contemplation sans cesse émerveillée du jacaranda, l’arbre emblème de l’amour, si étrangement beau et si humble… Comme les amants, le jacaranda fleurit au printemps. Et refleurit à l’automne…
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