Reportage. A l’école publique, avec des enfants de migrants

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« Ba-tta-ri-yat »: le nez collé au tableau, Samuel, un petit Ivoirien, est appliqué mais encore un peu hésitant dans sa  diction, à l’image de la « nouvelle politique migratoire » du Maroc, confrontée à  de multiples défis dont la scolarisation de « milliers » d’enfants subsahariens.

Pour répondre aux critiques en même temps qu’à l’afflux de migrants aux  portes de l’Europe, le royaume s’est lancé ces derniers mois dans un vaste  processus de régularisations parmi les 30.000 clandestins, pour la plupart  originaires d’Afrique noire, qui se trouveraient sur son sol. Parmi eux, Samuel, 8 ans, scolarisé en classe de CE1 à l’école Imam Malik,  à Rabat, la capitale.
 

Plus de 100 enfants de migrants actuellement scolarisés

« Ba-tta-ri-yat » (« batteries »), lit-il, règle à la main, de manière encore  saccadée. Au milieu des 500 élèves de cet établissement du quartier populaire  de Mabella, le petit garçon dit toutefois se sentir comme un poisson dans l’eau. « Tout le monde est gentil. Les cours sont en arabe, c’est parfois un peu  dur. Mais on prend le temps de m’expliquer« , assure-t-il d’une voix fluette. Pour le Maroc, de plus en plus considéré comme pays d’accueil et non de  simple transit, la régularisation des clandestins constitue un challenge  éducatif, au-delà des seuls défis sécuritaire et administratif, ont récemment  relevé des ONG spécialisées. Dans ce contexte, le ministère de l’Education a émis en octobre 2013 une  circulaire sur « l’intégration des élèves étrangers issus des pays du Sahel et  subsahariens« , et ce sont des « milliers d’enfants » qui sont concernés, fait  valoir Vincent Tournecuillert, responsable de l’ONG « Terre des hommes ». Les pratiques restent « embryonnaires », mais elles représentent « un grand  pas vers l’expression d’une volonté politique d’intégration« , ajoute-t-il, en  marge de la présentation d’un rapport intitulé « Enfants migrants et école  marocaine ». D’après Halima Qassemy, membre de l’ONG « Oum El Banine » et principale  auteure de l’étude, ces enfants sont actuellement plus d’une centaine à être  scolarisés dans le royaume, la plupart dans la région de Rabat, à l’image de  Samuel.

Un début de melting pot ?
  

« Bien sûr, leur présence ici les poussent à affronter plusieurs défis. Ils  doivent apprendre la darija (l’arabe dialectal) pour communiquer et l’arabe  classique pour comprendre les manuels« , commente son institutrice, Bouchra  Mansouri.
Au fond de la classe un dessin du garçonnet représente une carte du Maroc  et de la Côte d’Ivoire, surmontée d’un coeur.  Les enfants subsahariens « sont accueillis de manière très naturelle et  considérés comme n’importe quel écolier marocain« , affirme à l’AFP le directeur  d’école, Mohamed Ahjam, la cinquantaine. « Ils ont des amis et je remarque parfois pendant la récréation qu’ils  montrent leurs danses: c’est une preuve d’échange culturel« , dit-il. M. Ahjanm assure que son établissement serait en mesure d’en accueillir  « plus ».
Mais, dans la pratique, la tâche ne paraît pas si simple. D’après les ONG,  certains enfants sont victimes « d’actes d’exclusion » de la part de petits  camarades, au point d’amener des parents « à les retirer de l’école », avance Mme  Qassemy.
 

Une dispense des matières  islamiques 

Parmi les recommandations du rapport figure ainsi un travail de  « sensibilisation » auprès de tous les acteurs, dont les parents d’élèves  marocains. « C’est l’éducation qui influence beaucoup l’attitude » des enfants,  juge-t-elle. Autres écueils, le manque de documents administratifs pour l’inscription,  d’autant que le processus de régularisation avance doucement –moins de 1.200  sur 15.000 demandes déposées–. Mais aussi le contenu des enseignements: à ce titre, l’ONG Oum El Banine  préconise une « dispense des matières islamiques » pour les enfants « d’autres  confessions ».

Quant aux lacunes en arabe, « l’académie a lancé des partenariats avec des  associations » afin de développer son enseignement dans « des classes  préparatoires », signale à l’AFP Laila El Marjani, chef du service de la carte  scolaire et de l’orientation.  Le 14 mai, alerté sur leur « isolement », le ministère de l’Education a par  ailleurs annoncé la mise en place d’un examen de fin de primaire en anglais, en  lieu et place du français, pour les enfants d’Afrique anglophone. La semaine passée, le ministre Rachid Belmokhtar s’est rendu, en personne,  dans une école primaire de Rabat pour témoigner de l’engagement du gouvernement.

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