Le dernier roman de Milan Kundera – son 4e écrit en français – tourne en dérision l’esprit de sérieux qui caractérise notre époque.
Depuis La valse aux adieux (1976), Milan Kundera dit de chacun de ses livres que c’est son dernier. Eh bien non ! Après onze ans de silence, à 85 ans, il nous offre encore un petit bijou de légèreté : La fête de l’insignifiance. On entre à brûle-pourpoint dans l’intimité d’une bande d’amis. Alain est fasciné par les nombrils des jeunes filles ; Ramon voudrait voir l’exposition Chagall mais déteste faire la queue ; Caliban, comédien au chômage, aide Charles à organiser des cocktails et prétend ne pas parler français. Il y a aussi l’insignifiant Quaquelique, séducteur très efficace, et ce « connard » de D’Ardelo, qui s’invente un cancer au moment de fêter son anniversaire…
On les accompagne tour à tour, on écoute leurs petits mensonges, leurs profonds désirs, leurs insondables doutes et leurs souvenirs… Et c’est déjà la fin du livre. On savoure cette composition minimaliste et élégante, sans nécessité ni causalité, comme une improvisation de jazz, ou comme le vol capricieux d’une plumette dans une soirée mondaine ; on apprécie « ce non-sens qui le captivait justement parce qu’il n’avait aucun sens ». Un seul fil conducteur : les personnages se racontent, à eux-mêmes ou aux autres, des histoires et des blagues, plus ou moins drôles, graves ou chargées de sens. Ainsi Staline raconte une partie de chasse à ses proches si terrorisés qu’ils ne voient même plus que c’est une blague. Sous la plume de Kundera, l’absurde perd son caractère tragique et donne lieu à des scènes surréalistes. Cette drôlerie sans méchanceté et sans ironie est un véritable éloge de la bonne humeur. La sagesse du livre, c’est que la meilleure résistance au monde, c’est de ne pas le prendre au sérieux.
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