Le dernier roman de Mohamed Berrada reprend l’exploration de l’âme humaine et du monde, avec l’histoire en filigrane.

Raji, fraîchement licencié en histoire, est diplômé chômeur et papillonne entre sa camarade partie en Angleterre, une inconnue rencontrée en boîte et une jeune veuve styliste. C’est par cette dernière qu’il reçoit une proposition de travail de la part du Professeur Rahmani, qui cherche un assistant pour un projet de livre sur l’histoire du Maroc contemporain et sur son avenir. Au cœur de cette recherche, plusieurs interrogations, sur le sens qu’avait la résistance à la colonisation et les espoirs placés en l’indépendance, sur la crise actuelle et sur l’engagement du troisième millénaire. Plutôt qu’un travail académique, Raji franchit le pas de l’expérimentation et décide d’écrire un roman dont les personnages illustreront les différentes étapes de ce dernier demi-siècle. Sous sa plume, soucieuse de restituer ce que sa mémoire saturée risque d’oublier, se succèdent donc trois personnages d’âges différents, trois parcours ancrés à diverses époques, trois univers mentaux : Taoufiq Sadiqi, né en 1931, qui a dû renoncer à poursuivre ses études en France en raison de la mort de son père ; l’avocat Falih Hamzaoui, né en 1956 ; la psychologue Nabiha Samaân, née en 1956. Chacun se raconte, dévoile ses valeurs, s’interroge sur les notions de justice, de liberté et de modernité.

Comment écrire l’histoire ? Comment, tout simplement, écrire ? Ce sont toujours ces mêmes questions que pose, d’un roman à un autre, Mohamed Berrada. Plutôt que de livrer une fresque romanesque, il découpe ses livres en fragments qui se font écho. Comme chez Patrick Modiano, c’est presque toujours la même histoire, la même mélodie mélancolique… Et c’est cette petite musique qui fait sa touche si singulière.