Terrorisme. Le Maroc, ce précieux partenaire

Les autorités marocaines multiplient les démantèlements de cellules terroristes. La coordination entre Rabat et Madrid 
en matière de renseignement y est pour beaucoup.

Cela se passe aux premières heures du 14 mars. Des policiers espagnols arrêtent trois individus à Melilia : un Espagnol converti à l’islam et deux Français qui s’apprêtent à rejoindre la Syrie. Au même moment, la police marocaine interpelle trois Marocains à Laroui, près de Nador. Enfin, un ressortissant tunisien est cueilli par la Guardia civil à Malaga. Selon le ministère de l’Intérieur espagnol, ces sept personnes constitueraient le noyau dur d’une dangereuse cellule terroriste qui opère entre plusieurs pays et qui aurait déjà envoyé des dizaines de volontaires au jihad en Syrie. L’opération a été coordonnée par les services de renseignement marocains, espagnols et américains. Mais le rôle du Maroc a été plus que déterminant puisque ses propres services pistaient M.A., le ressortissant espagnol converti à l’islam et tête pensante présumée de la cellule, depuis au moins cinq ans.

As du renseignement

M.A., 53 ans, a vécu de longues années à Laroui avant d’échapper à une rafle de la police marocaine en décembre 2012 et de s’installer à Melilia, d’où il aurait continué à diriger sa cellule. Mais son dossier a été partagé avec les Espagnols et les Américains qui se sont mis à le surveiller à leur tour. « La coordination est l’approche la plus efficace. Tout l’enjeu actuellement est de réunir le maximum d’informations et savoir en tirer profit », explique Mohamed Darif, politologue et spécialiste des mouvances islamistes, qui poursuit : « Dans tout ce processus, le Maroc est devenu un acteur vital et un important partenaire dans la lutte contre ce phénomène transnational ».

Selon une source sécuritaire, c’est l’implication du Maroc dans la traque des cellules terroristes qui a permis d’en démanteler plusieurs, en Espagne et en Belgique notamment, mais aussi dans d’autres pays comme les Pays-Bas. « Le Maroc s’est doté de sa propre stratégie et la coordination DGST-BNPJ lui a été d’un grand secours, sans parler du recours aux nouvelles technologies de l’information, qui s’est révélé très utile », commente notre interlocuteur. Entre mai 2003 et mai 2013, les autorités ont ainsi démantelé 113 cellules et mis en échec 266 attentats, dont 114 à l’explosif. Comme elles ont pu empêcher 108 assassinats et arrêté un total de 1256 personnes.  

Gare aux loups solitaires

Aujourd’hui, l’Espagne, qui vient de commémorer le dixième anniversaire des attentats du 11 mars 2004, redoute par-dessus tout ce que les experts en lutte antiterroriste appellent les loups solitaires : ces activistes qui font partie d’une cellule sans jamais rencontrer les autres membres et qui pourraient passer à l’acte de manière individuelle. Mais il y a aussi les convertis à l’islam comme M.A. « Les convertis qui rejoignent les rangs jihadistes cherchent toujours à se démarquer, mais des organisations comme Al Qaïda leur font rarement confiance. C’est ce qui les pousse à prendre plus d’initiatives », analyse Mohamed Darif, qui affirme que, du côté des pays d’Afrique du Nord, ce sont les Maghrébins naturalisés européens qui sont source d’inquiétude.

Mais les services de renseignement marocains ont pu largement contrecarrer ce mode opératoire en investissant les sites jihadistes et en noyautant les milieux salafistes, aussi bien au Maroc que dans les pays qui présentent des risques, l’Espagne, la France et la Belgique en premier lieu. Aussi bien au niveau de la DGSN que de la BNPJ, des services spéciaux ont été créés spécialement pour traquer les jihadistes sur Internet et cela semble donner des résultats probants. 

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