Après 40 ans de brouille, la CDT et l’UMT ont mis de côté
leurs différends pour lutter contre le gouvernement Benkirane.
Les deux centrales ont été rejointes dans leur combat par la FDT.
Il y a encore quelque temps, il aurait été impensable de voir Noubir Amaoui, secrétaire général de la Confédération démocratique du travail (CDT), s’asseoir aux côtés de Miloudi Moukharik, son homologue au sein de l’Union marocaine du travail (UMT). Abdelilah Benkirane a pourtant réussi, sans le vouloir, à les liguer contre lui. Le 29 janvier, au siège de l’UMT, deux des plus anciennes centrales syndicales du pays ont décidé de mettre de côté leurs différends. La Fédération démocratique du travail (FDT), dirigée par Abderrahmane Azzouzi, était également de la partie. Leur mission commune : tirer la sonnette d’alarme et contrer la politique du gouvernement actuel. Les trois leaders évoquent même la nécessité de se soulever contre « la politique du fait accompli » d’un Exécutif qui reste « sourd aux revendications des masses». Devant un parterre de journalistes, Noubir Amaoui ouvre les hostilités. Avec son légendaire humour, cultivé dans la région de Ben Ahmed, il commence par qualifier l’équipe Benkirane de «gouvernement de gamins». Une boutade qui augure d’une grande tension dans les jours à venir.
Grèves en prévision
L’action collective des trois syndicats doit se concrétiser par la rédaction d’un mémorandum à l’attention du Chef du gouvernement. « Il devra être transmis à Abdelilah Benkirane le 6 février », annonce Abderrahmane Azzouzi. Le document reprend les revendications brandies par les trois centrales depuis la formation du gouvernement, il y a plus de deux ans. « Nous exigeons un vrai dialogue social, avec un calendrier précis et une réelle concertation. Le dialogue pour le dialogue, nous n’en avons que faire », enchérit Azzouzi. Après la remise du mémorandum, l’UMT, la CDT et la FDT envisagent de lancer un ultimatum au gouvernement. « Nous fixerons au gouvernement un délai pour nous répondre, sinon nous déciderons des mesures à prendre », affirme un dirigeant de l’UMT. Par mesures, il faut comprendre marches de protestations communes ou encore grèves sectorielles, voire grève générale. Pour ne rien arranger, les syndicats accusent le gouvernement d’avoir préparé une nouvelle mouture de la loi sur la grève, qui serait particulièrement liberticide. Sans parler de l’augmentation des prix du carburant et des pistes de réforme des caisses de retraites, qui jettent davantage d’huile sur le feu.
Chabat fait cavalier seul
Mais il n’y a pas que la grogne du front syndical qui menace de faire vaciller Abdelilah Benkirane. Hamid Chabat, secrétaire général et de l’Istiqlal et de l’Union générale des travailleurs au Maroc (UGTM), prépare aussi sa rentrée et, par la même occasion, une marche nationale à Rabat. « Nous mobilisons nos sections dans les régions pour organiser cette manifestation », affirme un dirigeant de l’UGTM. Pour une action concertée avec le trio CDT-UMT-FDT, il faudra cependant repasser. « Notre souhait est d’élargir l’action commune à tout le monde. Mais, dans le cas de l’UGTM, nous jugeons que les conditions ne sont pas encore réunies », justifie Abderrahmane Azzouzi. Outre la coalition syndicale, un front partisan de l’opposition est déjà monté au créneau. Le 27 janvier, les secrétaires généraux du PAM, de l’UC, de l’Istiqlal et de l’USFP se sont réunis chez Driss Lachgar, en présence des chefs de leurs groupes parlementaires respectifs. L’objectif est de coordonner l’action de l’opposition à tous les niveaux et, surtout, au sein de l’hémicycle. A l’orée de sa troisième année aux rênes du gouvernement, Abdelilah Benkirane sait désormais ce qui l’attend.
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