Saga. Au moment où ses confrères fermaient boutique au début des années 1990, Aziz El Hajouji s’est lancé dans un projet de joaillerie de grande envergure. Une entreprise qui brille aujourd’hui dans le secteur du luxe.
Nichée à Sidi Maârouf, à l’extrémité de Casablanca, la façade soignée d’OroMecanica tranche avec les sombres bâtiments de la zone industrielle. Cette usine-showroom accueille chaque jour quelque 400 visiteurs venus faire leurs emplettes à la source plutôt que dans l’une des 5200 boutiques de joaillerie du Maroc qui vendent les bijoux fabriqués ici. Les gammes proposées, de l’abordable au grand luxe, sont aussi attrayantes pour la femme de classe moyenne que pour Lalla Meryem, qui arbore une mdema OroMecanica sur l’une des photos qui trônent dans le bureau de Aziz El Hajouji. Fondateur et président de la société, ce dernier s’est constitué son empire avec la patience et la minutie d’un orfèvre.
De l’atelier au comptoir
Aziz El Hajouji a commencé sa carrière dès l’âge de 14 ans, en tant qu’artisan-bijoutier dans un petit atelier d’orfèvrerie à Casablanca. La joaillerie, il l’a apprise sur le tas, perfectionnant sa technique au fil du temps. Deux ans après, il gère une boutique de cinq employés. Ce saut de l’atelier au comptoir lui permet d’apprendre les méthodes de vente et de se renseigner sur les exigences des clients. Fort de cette expérience, il décide de se mettre à son propre compte. Les débuts sont rudes, mais l’entrepreneur persévère et réussit son coup. Il se fait un nom dans le milieu de la bijouterie et pense déjà à sa prochaine aventure. OroMecanica n’est encore qu’une idée qui va lentement se frayer un chemin vers l’accomplissement… « Dans le contexte de l’époque, monter une société de joaillerie relevait de l’absurde pour la plupart de ceux que j’ai rencontrés », témoigne El Hajouji, qui finira par concrétiser son ambition en 1997. OroMecanica démarre avec une production à faible volume, mais se taille une part non négligeable du marché de la bijouterie. La raison de son succès ? « L’originalité, la différence, l’innovation. C’est ce qui faisait défaut aux professionnels du secteur, qui se contentaient de reproduire des modèles de bijoux déjà existants », répond El Hajouji. Aujourd’hui, OroMecanica emploie 24 artisans, qui créent 10 modèles de bijoux par jour.
L’usine à bijoux
OroMecanica a vu le jour avec un pactole de 6 millions de dirhams. « Durant les trois premières années d’existence de l’entreprise, le chiffre d’affaires n’était pas des plus satisfaisants », nous confie El Hajouji. Mais à partir des années 2000, les choses commencent à s’améliorer et OroMecanica dégage ses premiers bénéfices. « On nous a aidés à tous les niveaux pour mener à bien notre projet, et ainsi sortir le domaine de la bijouterie de la crise qu’il traversait ». Actuellement, OroMecanica réalise un chiffre d’affaires de 450 millions de dirhams et produit 5 kilos de bijoux par jour. Ses créations sont présentes dans toutes les joailleries du royaume, et partout recopiées par les petits ateliers de bijouterie. L’une de ses spécificités : ses employés ont tous été formés en interne. En collaboration avec l’Office de la formation professionnelle et de la promotion du travail (OFPPT), les futures recrues de la société effectuent une période d’apprentissage avant d’être embauchés. Sur les 1600 formés par l’entreprise, 920 y travaillent actuellement. Parmi eux, 80 handicapés, dont certains se retrouvent même propulsés à des postes à responsabilité. Les plus studieux des apprentis ont la possibilité de se rendre à l’étranger pour poursuivre leurs études aux frais de la société, et ainsi faire profiter OroMecanica de leur expertise. Le credo d’El Hajouji : « Que les gens grandissent avec la société, et que la société grandisse avec eux ». Les formateurs, eux, sont pour la plupart japonais ou thaïlandais et se chargent d’initier les employés aux nouvelles techniques de joaillerie. « Nous essayons d’être en phase avec les dernières évolutions du métier », se félicite El Hajouji. Il ne prive d’ailleurs pas de nous le prouver en nous faisant visiter l’atelier équipé de machines de marquage et de gravure laser, chalumeaux de nouvelle génération, machines de polissage…
Objectif export
Pour l’avenir, El Hajouji voit grand. De la fenêtre de son bureau, au premier étage, il nous montre une série de bâtiments situés en face du siège actuel. « C’est notre nouvelle usine. Elle sera opérationnelle dès mars 2014 ». S’étendant sur plus de deux hectares, elle englobera, en plus des sites de production, une école de formation pour initier aux rudiments du métier, ainsi qu’un musée, un club pour le personnel et un nouveau showroom. L’investissement, d’une valeur de 200 millions de dirhams, est le fruit d’une convention signée avec l’Etat en 2004. Après le marché marocain, OroMecanica partira à la conquête de l’étranger : 80% de la production de la nouvelle usine sera en effet destinée à l’export. « Cette unité est le fruit de 17 années de labeur », souligne El Hajouji, qui compte tirer sa révérence lorsqu’elle sera ouverte. « Il faut se retirer pour laisser la place aux jeunes générations », conclut-il sagement. Pour la suite, El Hajouji n’a rien à craindre. Enfants, petits-enfants et employés sont prêts à prendre la relève.
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