Long-métrage. Quatre ans après Fissures, son premier long-métrage, le réalisateur de 37 ans revient avec Fièvres. L’occasion d’évoquer le parcours d’un cinéaste qui n’a pas peur de prendre des risques.
La dernière fois que le frère cadet de Nabil Ayouch avait fait parler de lui, c’était en 2011, à l’apogée du M20. A l’époque, il avait décidé de filmer les manifestations – où il s’était pris des coups – en perspective d’un documentaire, qui n’a finalement pas vu le jour. « Quand j’ai revu les images filmées, j’ai compris qu’il n’y avait pas de quoi faire un documentaire. Le tout ressemblait à un reportage qui aurait pu passer dans les journaux télévisés de 2M ou TF1. Et pour moi, faire un film qui n’a pas de propos et où il n’y a aucune réflexion cinématographique, ça ne sert absolument à rien », explique cet ancien journaliste, qui a travaillé pour plusieurs chaînes de télé françaises. Mais depuis cet épisode, l’eau a coulé sous les ponts. Aujourd’hui, Hicham Ayouch fait l’actualité parce qu’il est de retour avec un nouveau long-métrage. Fièvres, sélectionné en compétition officielle lors du dernier Festival du film de Marrakech (FIFM), a marqué les esprits et raflé un trophée, celui de la meilleure interprétation masculine. Didier Michon (14 ans à peine) et Slimane Dazi, les deux acteurs principaux, ont remporté le prix ex-æquo. Une consécration pour eux, mais aussi pour le réalisateur, qui avoue que « le tournage a été très éprouvant psychologiquement ».
Relation père-fils
Pour son deuxième long-métrage, Hicham Ayouch a brouillé toutes les pistes. Ceux qui s’attendaient à un film dans la lignée de Fissures, sorti en 2009, ont fait fausse route. Cette fois-ci, le réalisateur ne zoome plus sur le triangle amical et amoureux de trois adultes à Tanger, mais sur une relation père-fils très compliquée dans une cité en France. Côté réalisation, les deux films sont également très différents. « J’essaie de me renouveler dans chaque film, de ne pas rester cantonné à un genre cinématographique en particulier. Mais le plus important pour moi, c’est de raconter des histoires intéressantes et de faire passer des émotions », explique-t-il. Mission accomplie, puisqu’en regardant Fièvres, le spectateur passe par différents états émotionnels, tout comme les personnages principaux. Le tandem composé par Didier Michon et Slimane Dazi, dans le rôle du fils et du père, est totalement bluffant. L’ambiance dans laquelle ils évoluent est pesante, parfois suffocante. Mais Ayouch arrive à mettre de la poésie dans cet univers parfois tellement oppressant qu’il en est insupportable. Mais pourquoi avoir choisi d’ancrer l’histoire de son nouveau film en France et non pas au Maroc ?
Entre deux rives
« Il y a des phases où j’ai besoin d’être au Maroc et d’être inspiré par les Marocains, et parfois c’est la France et les Français. Je n’ai pas envie de choisir entre les deux. Je ne me considère ni comme un réalisateur marocain, ni français, mon identité est multiple. Je suis avant tout un conteur d’histoires », affirme Ayouch. Reste à espérer que Fièvres connaîtra une vie cinématographique plus intense que celle de Fissures. Le premier film du réalisateur, pourtant très prometteur, n’avait pas explosé le box-office marocain. Et pour cause, en 2009, les distributeurs ne s’étaient pas bousculés au portillon après sa projection au FIFM et au Festival national de Tanger, sûrement dérangés par quelques scènes d’amour et d’ivresse jugées trop osées. Seul l’un d’eux avait finalement sauté le pas, mais le film n’était resté en salle que quelques semaines seulement. Un véritable gâchis, en somme. Hicham Ayouch ne se décourage pas pour autant : « Pour le moment, je n’ai pas encore trouvé de distributeurs en France ou au Maroc pour Fièvres. Je sais que ce ne sera pas évident, parce que même si les acteurs sont très bons, ce ne sont pas des stars. Ce n’est pas un film commercial. Mais je vais me battre ». Dont acte.
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