En plus de dresser un diagnostic du secteur, le dernier rapport du Conseil économique et social associe à chaque mal le remède approprié.
Le secteur de la santé va mal, ce n’est plus un secret. C’est pourquoi le Chef du gouvernement a saisi, en novembre 2012, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) afin d’évaluer la situation. Ce à quoi le CESE s’est attelé. Ses équipes ont épluché une centaine d’études consacrées au sujet, mené des enquêtes dans les régions d’Agadir et d’Al Hoceïma et auditionné des acteurs du secteur, parmi lesquels le ministre de la Santé, El Hossein El Ouardi. Un an plus tard, la copie a été rendue. Le rapport de 112 pages, intitulé « Les soins de santé de base : vers un accès équitable et généralisé », a été rendu public le 9 décembre.
Plus de génériques
Le CESE propose tout d’abord d’élaborer une « politique nationale » regroupant plusieurs stratégies sectorielles. « Il ne faut pas regarder les recommandations séparément », explique Hakima Himmich, membre du CESE et rapporteuse principale. Les solutions sont interdépendantes et ne sauraient être appliquées séparément. Parmi la cinquantaine de recommandations émises, le CESE évoque l’accès aux médicaments et préconise une utilisation accrue des génériques, qui ne représentent
aujourd’hui que 42% de la consommation globale. Quitte à modifier les lois actuelles, adoptées et amendées en fonction des accords internationaux relatifs à la propriété intellectuelle, pour y introduire toutes les flexibilités auxquelles un pays à droit lorsqu’il s’agit de santé publique. Mieux, le CESE conseille de prendre garde à certains traités comme l’Accord commercial anti-contrefaçon (ACTA), en attente de ratification au parlement, ou l’Accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA), en cours de négociation avec l’Union Européenne, susceptible de freiner la recherche marocaine en matière de génériques. La question de la santé est politique, et le CESE a eu le courage de ne pas éluder cet aspect.
Le Conseil met également l’accent sur la nécessité du partenariat public-privé. Une thématique qui revient souvent dans le discours des politiques et des professionnels, mais dont les contours ne sont jamais précisés. Le rapport du CESE a le mérite de nous éclairer à ce sujet. A ce jour, il n’existe qu’une seule expérience de ce genre et elle concerne l’hémodialyse : plus de mille patients nécessitant ce traitement sont pris en charge par des médecins du privé et dûment remboursés par l’Etat. Un exemple de réussite que le CESE préconise de la généraliser.
Soins inaccessibles
Le constat le plus préoccupant du rapport reste l’inégalité dans l’accès aux soins, dû à l’inégalité entre les régions. Un quart de la population réside à plus de dix kilomètres d’un centre de soins de base et ne peut s’y rendre qu’au prix de plusieurs heures à dos de mulet ou à pied, alors que Casablanca concentre à elle seule 30% du nombre total de lits d’hôpitaux et de cabinets médicaux du pays. Le CESE préconise donc la mise en place d’un réseau de transport sanitaire, ou encore l’affectation obligatoire de tous les nouveaux médecins généralistes recrutés par le ministère dans une zone défavorisée, pendant un an. Le Conseil estime que la régionalisation doit devenir un « principe d’organisation » et que les compétences humaines comme les moyens financiers doivent être transférés à des directeurs régionaux. Puissent ces recommandations être entendues et se traduire dans les faits.
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