Mustapha Bakkoury : «Nous serons prêts à gouverner en 2016»

Objectif élections. Le secrétaire général du Parti authenticité et modernité évoque l’action du gouvernement et les enjeux qui attendent sa formation. Grande révélation, cet ancien technocrate compte bien se lancer dans la bataille électorale.

Entre deux voyages à l’étranger, Mustapha Bakkoury nous donne  rendez-vous un dimanche dans un palace de Rabat. En tenue décontractée, le patron du PAM et de l’agence solaire (MASEN) répond à nos questions avec aisance. Depuis ses premiers pas dans la politique, d’abord au Mouvement pour tous les démocrates, ensuite en se frottant à l’aile gauche du parti, l’homme a bien fait du chemin. Aujourd’hui, il nous parle avec l’assurance d’un zaïm politique, doublé d’un haut commis de l’Etat qui sait ce qu’il fait en attendant les prochaines élections en 2016.

Cela fait presque deux ans que vous êtes à la tête du PAM. Qu’avez-vous réalisé et que vous reste-t-il encore à accomplir ?

Le PAM est une organisation qui a une dynamique et il restera toujours beaucoup de choses à faire. Nous voulons un PAM ambitieux, en phase avec la société, capable d’anticiper et d’apporter des solutions. Je vous mentirais si je vous disais que nous sommes dans cette situation, mais nous travaillons dans un état d’esprit qui nous permettra d’y arriver.

Depuis sa création, le PAM est dans l’opposition. Est-ce une fatalité ?

C’est un choix que nous assumons et je crois que c’est le contraire qui aurait été une erreur. Pour réussir la construction du parti, il est plus intéressant de le faire dans l’opposition. D’ailleurs, nous nous y sentons à l’aise et nous assumons notre rôle sans le moindre complexe. Les dernières péripéties de la majorité gouvernementale nous ont confortés dans ce choix et la question de rester ou non dans l’opposition ne s’est même pas posée.

Que reprochez-vous exactement au gouvernement et au PJD en particulier ?

Les élections de 2011 n’étaient pas comme les autres. Elles devaient créer une dynamique à la hauteur des attentes des Marocains, qui étaient des attentes de rupture. C’est une responsabilité historique et exceptionnelle, qui s’ajoute à la responsabilité classique d’un gouvernement dans la gestion des affaires. Mon principal reproche à cet Exécutif, c’est qu’il n’a jamais donné l’impression de prendre cette dimension en compte. Cette majorité n’a appréhendé ni le contenu, ni la philosophie de la nouvelle Constitution. C’est un Exécutif qui a manqué et manque toujours de cohérence et d’homogénéité.

Dans quel sens ?

Le souci premier du PJD a été d’arriver à une majorité numérique, de s’imposer, puis de se maintenir. Quand on agit de la sorte, on est rattrapé par le temps et on en paie le prix. A mon avis, les ingrédients et les raisons de l’échec du gouvernement Benkirane I sont toujours là. S’il n’y a pas un changement d’état d’esprit et un effort particulier pour arriver à une nécessaire homogénéité, il ne faudra pas s’étonner si on revit le même scénario avec un nouvel éclatement de la majorité.

Où en êtes-vous dans le travail de coordination avec les autres principaux partis de l’opposition ?

Il est normal qu’il y ait une cohérence dans les rangs de l’opposition. Tout le monde attend qu’on joue notre rôle de force de critique et de proposition d’alternatives indépendamment des considérations partisanes. D’ailleurs, la Constitution ne parle pas de partis d’opposition, mais de l’opposition comme un bloc. A partir de là, je considère qu’il est du devoir de ses composantes de coordonner leur action sous toutes les formes possibles, en premier lieu au niveau du parlement.

Le ralliement du RNI à la majorité ne vous prive-t-il pas d’un allié de taille ?

Nous avions un projet d’alliance à la veille des élections. Après, nous avons commencé à nous coordonner au sein de l’opposition et cela a donné de bons résultats. Maintenant, au-delà du clivage majorité-opposition, nous avons une proximité avec le RNI et des valeurs démocratiques en partage. L’essentiel restera toujours de renforcer le front démocratique et de faire que les acquis accumulés jusque-là deviennent irréversibles.

Serez-vous prêts à diriger le gouvernement en 2016 ? 

Inchallah ! Cette ambition est au cœur de notre travail. Mais nous voulons d’abord renforcer notre position au niveau local. Nous sommes fiers des expériences du PAM dans plusieurs villes et de leurs répercussions sur la vie des citoyens. En 2016, nous comptons partir au front avec une ambition nationale.

Idéologiquement, où vous situez-vous exactement ?

Notre thèse est une réponse au fait que les Marocains ne s’identifient plus aux partis politiques. Je définirais le PAM comme une démocratie sociale. Un parti qui croit que la démocratie est un levier pour tout le reste : le développement, l’épanouissement, les droits de l’homme. Quand on parle de « Tamghrabit », cela signifie s’appuyer sur des valeurs et les accompagner par un fonctionnement institutionnel moderne.

Le front progressiste que vous cherchez à établir en Afrique du Nord et dans le monde arabe a-t-il vocation à contrer les islamistes ?

Il y a des courants démocratiques et progressistes dans plusieurs pays, qui veulent promouvoir la cohabitation des différences, des minorités… Il faut donc que les politiques apportent une réponse à cette ambition, sinon nous sommes condamnés à opposer des idéologies qui vont s’entretuer. Nous cherchons à travailler ensemble et à affiner le débat, sans interférer dans les spécificités des pays. Cette initiative n’est dirigée contre personne et la dimension religieuse doit y être présente.

Le fait de n’avoir jamais mené de bataille électorale n’affaiblit-il pas votre position aux yeux d’une frange du parti ?

Quelqu’un s’est-il plaint de cela ? En 2009 et 2011, me présenter aux élections était techniquement impossible. Mais tôt ou tard, je le ferai. C’est un devoir de se livrer au verdict des urnes lorsqu’on est chef de parti.

PROFIL

1980 : Obtient son diplôme d’ingénieur des Ponts et Chaussées

1989 : Devient responsable du pôle « banques d’affaires » de la BMCI

2001 : Nommé par le roi directeur général de la CDG

2008 : Intègre le Mouvement pour tous les démocrates créé par Fouad Ali El Himma

2009 : Désigné à la tête de l’Agence marocaine de l’énergie solaire (MASEN)

2012 : Elu SG du PAM

 

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