Pour son premier passage devant l’hémicycle depuis le remaniement ministériel, le Chef de l’Exécutif a été forcé de s’exprimer sur le Sahara. Pour ne rien dire.
Le thème de la séance mensuelle du parlement, consacrée aux politiques publiques, a été changé à la dernière minute. Jusqu’à la veille, Abdelilah Benkirane avait prévu de réserver son passage devant la première chambre, le 26 novembre, au programme du Millenium Challenge, soit la même thématique abordée devant les conseillers le 2 août dernier. Mais face à l’insistance de l’opposition, qui lui avait adressé une lettre dans ce sens le 11 novembre, il n’a pas eu d’autre choix que de parler du Sahara, même si le théme était plutôt vague : « La politique étrangère de notre pays et la défense de l’intégrité territoriale ». « C’est la question qui est au-devant de l’actualité et on voulait savoir où on en était », explique un député de l’opposition. Face à un hémicycle inhabituellement calme, Abdelilah Benkirane a pris son temps pour enchaîner des tirades enflammées, sans la moindre donnée chiffrée. Et surtout pour tresser des lauriers au roi et à son rôle dans la défense du dossier du Sahara. Pour Abdelilah Benkirane, tous les Marocains sont des « soldats » quand il s’agit de défendre l’intégrité territoriale. Et aucune concession ne sera faite sur le moindre grain de sable des régions du sud.
Comme le roi
Abdelilah Benkirane a réservé une bonne partie de son allocution devant les députés à l’Algérie, avec certains passages qui rappellent le discours de Mohammed VI du 6 novembre. « Nous sommes des frères et cela ne changera jamais. On ne choisit pas ses frères, mais il faudra les supporter », a déclaré le Chef du gouvernement. Avant d’ajouter qu’il n’était pas question de remettre en cause l’intégrité territoriale du Maroc face à « un voisin qui a mobilisé des moyens considérables ». Par la suite, Benkirane a parlé des acquis réalisés par le Maroc au niveau international. Pêle-mêle, il cite les puissances étrangères qui ont réservé un bon accueil au plan d’autonomie, mais aussi le nombre de pays qui ont retiré leur reconnaissance à la RASD. Abdelilah Benkirane a toutefois admis que relever le défi du Sahara nécessite d’accélérer les réformes et de concrétiser les recommandations du rapport élaboré par le Conseil économique, social et environnemental.
« Le Chef du gouvernement n’a pas été convaincant. Il n’a présenté aucun bilan sur la question parce qu’il n’en a pas », estime Mehdi Mezouari, député USFP. Le jeune élu ittihadi va plus loin en accusant Abdelilah Benkirane de « concéder tout le dossier à d’autres cercles du pouvoir, alors qu’il doit être le premier à monter au front ».
Des « gaffes »
Moins dur est le ton adopté par les autres composantes de l’opposition. « Les députés, pour la plupart, ne voulaient pas gêner le Chef du gouvernement sur un dossier aussi sensible », explique un parlementaire. « Il aurait au moins dû nous dire ce que son équipe a fait pendant deux ans pour le dossier du Sahara car il n’est guère suffisant de rappeler le consensus national sur la question », réagit Milouda Hazib, présidente du groupe parlementaire du PAM. Cette dernière émet le souhait de voir le gouvernement s’exprimer sur quelques « gaffes » commises par des ministres et qui ont coûté cher au Maroc. « En plus du Koweït où un ministre est allé à la rencontre de groupes islamistes locaux, des déclarations hâtives nous ont attiré beaucoup d’ennuis avec la Russie et la Chine », accuse Milouda Hazib. En somme, la séance du 28 novembre était un non-événement. Et le fun n’était pas de la partie, comme de coutume…
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