Message codé
C’est à ne plus rien comprendre à ce bled. Pourquoi le roi adresse-t-il un message de condoléances à Khalid Alioua ? Certes, c’est une tradition du Palais que d’avoir des mots compatissants quand ses fidèles serviteurs sont en deuil. Mais Khalid Alioua ne fait plus partie du club. Il n’est plus ministre, ni président de banque publique… Depuis neuf mois, c’est un détenu à la prison de Oukacha. Le Parquet qui le poursuit pour une affaire de “dilapidation de deniers publics” en a décidé ainsi. Une décision contre laquelle on peut s’insurger : pas besoin de mettre en taule un présumé auteur de “crime financier” avant que justice ne soit effectivement rendue. La présomption d’innocence voudrait qu’il soit libéré sous caution, le temps de son procès. On accorde d’ailleurs cela à certains, mais pas à d’autres : c’est toute la splendeur de notre Etat de droit… Et comme si ce n’était pas assez compliqué comme ça, on rajoute à la confusion avec cette nouvelle donne : ce message signé Mohammed VI, roi du Maroc, qui rend hommage à maman Alioua qui a su inculquer à ses enfants “les valeurs marocaines exemplaires”. Il faut souligner que Mohammed VI, le chef de l’Etat, a le pouvoir de nommer les membres du Conseil supérieur de la magistrature. Alors imaginez-vous dans quel état doit être le juge chargé de l’affaire. Le plus intègre, le plus indépendant des magistrats, se poserait des tas de questions : quelle interprétation faire de ce message ? Le fait qu’il n’ait pas été repris par l’agence officielle MAP (une première !) diminue-t-il de sa portée ? On le comprendra s’il se retrouve dans l’expectative attendant un déchiffrage de ce message par sa hiérarchie… En tout cas, les connaisseurs des rites du Makhzen l’ont reçu cinq sur cinq. Les uns après les autres, ils se sont pressés à la maison familiale des Alioua pour présenter leurs condoléances…
Milliardaires (mais pas trop) philanthropes
Ils sont trois de nos compatriotes à figurer dans le prestigieux classement Forbes. Othman Benjelloun (le magnat de la finance), Miloud Chaabi et Anas Sefrioui (des nababs de l’immobilier) sont nos trois ambassadeurs dans le club très fermé des milliardaires en dollars. Ils cumulent une fortune de 6,5 milliards de billets verts. C’est beaucoup, beaucoup d’argent. C’est le double de tout l’Impôt sur le revenu récolté chaque année par l’Etat, ou encore, c’est l’équivalent des dépenses de la Caisse de compensation, cette boîte de Pandore que nos politiques n’osent ouvrir de peur que tout le système ne parte en vrille. C’est démago, tout ça ? Sans doute, un peu, chouia, bezzaf… Ces big boss sont à la tête de puissants groupes économiques locaux. Ils font travailler beaucoup de monde et paient chaque année en impôts ce qu’un salarié moyen ne gagnerait jamais toute sa vie. Ils apportent donc beaucoup à la communauté, mais ils peuvent évidemment toujours mieux faire. Et il y a tellement de choses à faire, de projets à prendre en charge. Exemple : leurs fondations respectives peuvent racheter l’batoir pour le sortir des méandres de la bureaucratie du conseil de la ville (qui a même tenté de le transformer en parking) et le confier à ce collectif d’associations culturelles composé de militants comme on les aime et qui aimeraient faire de ces lieux une vraie fabrique culturelle. Être milliardaire en dollars, c’est classe ! Être milliardaire philanthrope, c’est le must ! C’est ce qui permet d’inscrire son nom dans la postérité…
Tourner la page
Snif, snif ! Trip’Tic c’est fini ! Cette rubrique va être mise en veilleuse pour quelque temps. Elle reviendra un jour, inchallah… Mais on ne va pas se quitter comme ça ! On va au moins prendre le temps de rendre hommage à tous ceux qui ont permis d’alimenter ces colonnes pendant plus de 50 numéros :
• Spéciale dédicace à Abdelilah Benkirane, notre Benky national, qui n’a jamais eu peur du ridicule. Avec son penchant pour les mauvaises vannes et son béguin pour les phénomènes paranormaux, il a toujours su nous remonter le moral en nous démontrant que le meilleur rôle que peut jouer un Chef de gouvernement marocain, est celui de guignol sur une télé tunisienne.
• Fikhater notre si chère équipe nationale dont les performances sportives ont toujours été inversement proportionnelles à la popularité de cette rubrique. Mais bon, leurs déboires n’ont jamais vraiment fait rigoler personne. C’est juste qu’il vaut mieux en rire qu’en pleurer…
• Salutations à tous ces parlementaires dont les frasques et les gags nous ont toujours servi de baromètre pour évaluer l’efficacité de notre institution législative. Entre celui qui jette une lettre au passage du roi avant d’être jeté en prison, celui qui joue au solitaire, l’autre qui montre son bide, la feuille volante rajoutée en douce dans un projet de budget, l’élu qui se fait tabasser par les flics sans que l’enquête ne donne rien de concret, c’était un régal ! Un festival de ratages…
Alors un grand merci à tous ces clients réguliers qui ont inspiré cette rubrique qui, espérons-le, vous a parfois arraché des sourires. De toute façon, il est trop tard pour vous en plaindre. Là on tourne cette page… Rendez-vous en page 4 !
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