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Job pas si facile

Etre parlementaire, ce n’est pas la joie tous les jours. A croire qu’ils se font chier à mort nos élus. Prenez l’exemple de ce député pris, en flagrant délit, en train de jouer au solitaire sur sa tablette. Bon, ça renseigne sur le niveau de nos représentants : ils ne sont même pas assez futés pour jouer au Texas Holdem en ligne, ni même à la dame de pique. Mais ce n’est pas une raison pour lui tomber dessus. Pour lui, c’était le seul moyen de ne pas s’assoupir au cours de cette séance marathonienne meublée de discours creux qui sonnent comme une berceuse. Tentez l’expérience : si vous ne faites pas la sieste au bout d’un quart d’heure devant la retransmission des séances de travaux du parlement sur Al Aoula, on vous rembourse le prix de ce magazine (un somnifère en prime est offert aux 10 premiers). Autre exemple : le vote du projet de Loi de Finances pour lequel il fallait tenir jusqu’à 4h du matin. Il n’y a eu d’ailleurs que les islamistes du PJD pour tenir le coup. Eux étaient prêts à veiller jusqu’à la prière d’Al Fajr pour sauver le budget de leurs imams du gouvernement. Il y a donc de quoi se demander pourquoi des gens en pleine possession de leurs facultés mentales acceptent de faire ce job de parlementaire. La noble mission de servir l’intérêt général ? Mon œil ! Peut-être le salaire ? Ou plutôt le réseau que l’on se constitue entre la buvette de l’hémicycle, le café Balima et le Grand comptoir. C’est un peu notre K Avenue, là où le lobbying se pratique dans l’informel…

 

Marocains et (pas trop) fiers

Des indices nous font croire que nous vivons dans l’un des pays les plus prospères de la région, d’autres indices nous révèlent que nous avons atterri dans une contrée où il ne fait pas bon naître. Mais il y a des chiffres qui ne trompent pas : 67 000 de nos concitoyens ont décroché cette année une nationalité européenne. Ils ont bien fait, vu toutes les misères que l’on vit au “plus beau pays du monde”. Voici au moins quatre bonnes raisons pour suivre l’exemple de nos binationaux 9afzine :

• Le seul pays intéressant où l’on peut se rendre sans visa avec un document de voyage aux armoiries du Kingdom, c’est la Turquie. Le Bosphore, la mosquée bleue, la piaule de Mouhaned… Ok c’est sympa. Mais c’est champêtre comparé à une virée à Manhattan ou à Hollywood Bd, librement accessible pour les passeports rouges.

• Chez nous, on peut contribuer toute sa vie à une couverture médicale (publique de surcroît), et le jour où on se retrouve métastasé jusqu’à la moelle, il faut malgré tout faire d’interminables allers-retours pour une histoire de paperasse. Pire encore, l’euthanasie est illégale…

• On sera encore et toujours déçus par notre équipe nationale de football. Alors qu’il suffit de dribler l’Office des changes, de déborder d’euros pour se payer quatre murs à Marbella et ainsi devenir socio de la Roja et hurler avec Xavi et Iniesta “campeones, campeones”…

• Une bonne scolarité des enfants, sous d’autres cieux, est garantie par l’Etat. Chez nous, on commence à épargner pour ses rejetons avant même d’enlever son slip. Heureusement que la contraception a été admise pour palier la débandade de notre système éducatif…

 

La question qui tue

Il y a de ces AFFAIRES qui vous collent à la peau. Un peu comme une cicatrice de jeunesse. Prenez Salaheddine Mezouar. D’un bleu en politique en 2002, il s’est retrouvé propulsé patron d’un parti à sa couleur. Juste parce qu’il avait la tchatche d’un rassembleur. Mais la realpolitik a fini par le rattraper et il s’est retrouvé relégué au rôle de simple zaïm d’un parti de l’opposition. Un figurant, en gros. Ces jours-ci, il a une scène à jouer sous les spotlights, une réplique à donner à l’arrière-plan de Benkirane qui vient de souffler sa première bougie aux affaires : “Le gouvernement est nul”. Sauf qu’il n’y a pas un seul support médiatique crédible pour tendre le micro au président du RNI sans l’interpeller sur son AFFAIRE. Et son temps de parole utile, Mezouar l’a réservé aux confrères d’Al Massae qui se sont arrangés pour lui balancer “la dernière question qui tue” : ses primes faramineuses du temps où il était ministre des Finances, son petit jeu de hak-ara avec le Trésorier du royaume pour un bonus mensuel de 80 000 dirhams. Bien sûr, comme une vierge effarouchée l’ex-argentier du royaume rétorque : “Cette prime est légale et accordée de manière transparente”. Ben voyons ! C’est tellement transparent qu’on poursuit les fonctionnaires soupçonnés d’être à l’origine de la fuite des documents par lesquels est arrivé le scandale ; et sa prime est tellement légale (mais pas éthique) que son prédécesseur et son successeur y ont renoncé. Mezouar conclut en criant à la manipulation et promet de divulguer en temps voulu les instigateurs de cette affaire. Tant mieux, ça sera une autre bonne raison pour rouvrir ce dossier…

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