Smyet bak ?
Haddou El Baz.
Smyet mok ?
Itto Oukhouane.
Nimirou d’la carte ?
I8 quelque chose, je ne m’en souviens jamais…
Il y a marqué quoi dans la case profession ?
Photographe, moussawir en arabe. C’est marrant à chaque fois que je passe à la douane, on me demande : “Moussawir privé ?”, genre est-ce que j’ai un studio, “oula sahafi (journaliste, ndlr)?”. Je réponds “fennane” (artiste).
Votre œuvre “Double life”, a été vendue en avril 2011 à Christie’s Dubaï à 40 000 dollars, mais vous n’avez pas touché un kopeck vu que c’est un collectionneur qui l’a mise en vente. Ça vous fait quoi ?
Le terrain des ventes aux enchères est très spécial. Tout le monde vous attend au tournant. Ce n’est pas sain pour le travail, d’autres pensent que oui… Je trouve ça très bien que l’œuvre soit vendue dans ce contexte-là. J’ai toujours envie de savoir où se trouve l’œuvre après ces échanges marchands, elle est accrochée où, qui peut la voir… Comment l’acheteur a payé son enchère ? Franchement, ça m’intéresse.
Votre record en termes de vente privée ou en maison de ventes aux enchères ?
Mon œuvre la plus chère se situe à 800 000 DH, c’est mon record comme vous dites, et c’est un collectionneur privé qui l’a achetée chez ma galerie à Casablanca.
Franchement, ça les vaut ?
Bien sûr que ça les vaut. C’est le prix d’un 4×4 haut de gamme comme j’en vois plein sur le boulevard d’Anfa.
L’art a fait de vous un homme riche ?
Non, peut-être que je m’y suis mal pris, mais j’espère que ça va venir. Pour mes enfants surtout… et moi (rires).
Vous avez récemment collaboré avec la créatrice de mode, Fadila El Gadi, qui a repris certains de vos dessins sur des vestes militaires. Vous faites des produits dérivés ?
Non, pas du tout. Il se trouve que Fadila m’avait aidé pour une œuvre que j’ai réalisée lors d’une exposition à l’Atelier 21, en 2009. Depuis on est devenus amis. Donc, quand elle m’a sollicité pour ces vestes, je lui ai rendu la pareille. En plus, elle a fait une belle installation de tout ça…
Vous avez aussi fait des T-shirts, représentant un homme en feu, avec à ses pieds une grenade et une mitrailleuse. Il paraît que l’imprimeur ne voulait pas faire de sérigraphie avec cette image, c’est vrai ?
Totalement. Il pensait que c’était une apologie du terrorisme. Fadila a dû lui expliquer que c’était un travail d’artiste, et j’ai dû lui faire un mot précisant en quoi consistait l’œuvre. Là on se rend compte de la peur que peuvent avoir les gens des images, dès qu’elles ne sont plus de consommation courante.
Vous avez récemment exposé une œuvre intitulée “Rien d’autre n’aura lieu”, montrant une étoile, et des photos où l’on peut distinguer des seins et des fesses de femmes. Ça correspond à quoi, votre tableau de chasse ?
Oh non pas du tout, ce n’est vraiment pas mon genre. Ce sont des proches et des amis… Et d’ailleurs il y a aussi des mains et des fesses de garçons, dont les miennes.
Le Printemps arabe vous a-t-il servi d’accélérateur de carrière, en suscitant un engouement pour les peintres originaires de cette région ?
Pas particulièrement. En fait il y a eu plusieurs périodes dans notre histoire proche. Pour aller vite, il y a eu les Chinois, puis les Indiens, l’Afrique noire et là c’est au tour des Arabes. C’est la mondialisation qui veut ça et c’est un de ses apports majeurs. Beaucoup d’artistes arabes existaient déjà, ils sont devenus nécessaires quand le monde arabe est devenu nécessaire. Mais c’est vrai que cela peut accélérer des situations plus que des carrières.
Récemment, Mounir Fatmi a exposé une œuvre à Toulouse, une installation avec une projection de versets coraniques, qui a suscité une polémique. Vous en pensez quoi ?
Alors justement, avec Mounir, que j’ai revu lors de Daba Maroc en Belgique, nous sommes restés sidérés par ce qui s’est passé au Printemps de Toulouse : il a retiré une de ses œuvres sur pression des imams et des musulmans du coin. C’est quand même fou que cette installation ait été montrée par un musée à Doha au Qatar sans que ça ne pose de problème, alors qu’en France, dans une banlieue, ça suscite ce genre de réactions. Mais c’est vrai qu’il y a eu l’épisode Mohamed Merah…
Vous avez grandi à Dunkerque, dans le nord de la France, et pourtant, vous n’avez pas l’accent chti…
Tant mieux, je m’excuse pour les Chtis, mais il n’est pas très beau cet accent (rires).
Il paraît que le mariage vous a assagi. C’est vrai ?
C’est vrai, c’est ce que les gens disent. Je devais en avoir besoin. C’était une décision réfléchie, après il suffit de tomber sur la bonne personne et c’est bon. Chama était là….
Récemment, vous avez fait une installation à Rabat où des étudiantes devaient raser un tapis sur lequel étaient posés des micros. C’était quoi le projet ?
C’est une manière de poser quelques questions. On rase un tapis, mais est-ce qu’on est en train de détruire quelque chose ou est-ce de l’esthétique ? ça dépend comment c’est fait… C’est une œuvre qui s’inscrit dans le contexte politique, au lendemain des Printemps arabes.
Vous arrive-t-il de vous autocensurer ?
Je me censure tout le temps dans ma vie de tous les jours… Sinon c’est impossible de vivre avec les autres.
Qu’est-ce qu’il faut faire pour vous énerver ?
Etre de mauvaise foi et être “addict” à ce travers… Pour moi c’est la trahison ultime.
Vous avez un début de tatouage sur l’avant-bras. C’est quoi, une erreur de jeunesse ?
Oui, une erreur de jeunesse… Je me rappelle d’un garage où passaient des films de c… et de garçons se tatouant leurs idoles sur le corps…
Votre côté faussement négligé, avouez que vous le cultivez…
Vous voulez dire que je m’habille mal ? Franchement, j’ai toujours eu beaucoup de mal avec mon apparence. Je me sens mieux depuis que j’ai compris que ce n’est pas grave d’être à l’aise. Mais j’aime ceux qui ont une gueule, un genre hors limites. Moi je ne sais pas le faire.
L’Atelier 21 produit vos créations et, en principe, vos clients sont obligés de passer par lui pour vendre vos œuvres. Il arrive qu’un client veuille court-circuiter la galerie qui vous représente ?
Oui, souvent. Mais ils ont bien compris qu’il n’y avait pas moyen…
Antécédents
1967. Voit le jour à El Ksiba, dans la province de Beni Mellal
1974. Part s’installer en France
1989. Passe et réussit le concours pour intégrer l’école des Beaux-Arts de Dunkerque.
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1992. Fait sa première exposition à Sète, dans le sud de la France.
1994. Réalise sa première vente lors d’une exposition à Paris.
2008. Se marie
2009. Devient père
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